Maxime Gorki – Le chant du Faucon – Chant II.

Petites nouvelles russes - Maxime Gorki - La couleuvre et le faucon
La couleuvre et le faucon

Maxime Gorki - Le chant du Faucon

(1899)

Максим Горький - Песня о Соколе

 

Chant II.

«В ущелье лёжа, Уж долго думал о смерти птицы, о страсти к небу.

«И вот взглянул он в ту даль, что вечно ласкает очи мечтой о счастье.

«— А что он видел, умерший Сокол, в пустыне этой без дна и края? Зачем такие, как он, умерши, смущают душу своей любовью к полётам в небо? Что им там ясно? А я ведь мог бы узнать всё это, взлетевши в небо хоть ненадолго.

«Сказал и — сделал. В кольцо свернувшись, он прянул в воздух и узкой лентой блеснул на солнце.

«Рождённый ползать — летать не может!.. Забыв об этом, он пал на камни, но не убился, а рассмеялся…

«— Так вот в чём прелесть полётов в небо! Она — в паденье!.. Смешные птицы! Земли не зная, на ней тоскуя, они стремятся высоко в небо и ищут жизни в пустыне знойной. Там только пусто. Там много света, но нет там пищи и нет опоры живому телу. Зачем же гордость? Зачем укоры? Затем, чтоб ею прикрыть безумство своих желаний и скрыть за ними свою негодность для дела жизни? Смешные птицы!.. Но не обманут теперь уж больше меня их речи! Я сам всё знаю! Я — видел небо... Взлетал в него я, его измерил, познал паденье, но не разбился, а только крепче в себя я верю. Пусть те, что землю любить не могут, живут обманом. Я знаю правду. И их призывам я не поверю. Земли творенье — землёй живу я.

«И он свернулся в клубок на камне, гордясь собою.

«Блестело море, всё в ярком свете, и грозно волны о берег бились.

«В их львином рёве гремела песня о гордой птице, дрожали скалы от их ударов, дрожало небо от грозной песни:

„Безумству храбрых поём мы славу!

„Безумство храбрых — вот мудрость жизни! О смелый Сокол! В бою с врагами истёк ты кровью... Но будет время — и капли крови твоей горячей, как искры, вспыхнут во мраке жизни и много смелых сердец зажгут безумной жаждой свободы, света!

„Пускай ты умер!.. Но в песне смелых и сильных духом всегда ты будешь живым примером, призывом гордым к свободе, к свету!

„Безумству храбрых поём мы песню!..“»

Petites nouvelles russes - Le Faucon dans les flammes

« Lovée dans sa crevasse, longtemps la Couleuvre pensa à la mort de l’oiseau et à son amour passionné pour le ciel.

« Et son regard se porta vers cet espace lointain, qui de toute éternité fascine les yeux de ceux qui rêvent de bonheur.

« - Que voyait donc le Faucon dans ce désert sans borne ? Pourquoi les êtres de son espèce une fois morts, troublent-ils les cœurs par leur désir de rejoindre le ciel ? Qu’y a-t-il là-haut de si clair pour eux ? Ne pourrais-je apprendre tout cela en tentant de voler moi aussi, juste un moment ?

« Sitôt dit sitôt fait : s’enroulant sur elle-même, tel un mince ruban scintillant au soleil, la voilà qui s’élance dans les airs.

« Qui est né pour ramper jamais ne volera !... Oubliant la leçon, la couleuvre s’écrasa lourdement sur les pierres… Elle en réchappa pourtant et éclata de rire.

« - Eh bien ! c’est donc ça la beauté de voler : juste une chute !... Que les oiseaux sont ridicules ! Sans rien connaître de la terre, s’ennuyant dès qu’ils sont au sol, ils n’aspirent qu’à rejoindre le ciel et cherchent à vivre dans son immensité déserte. Mais là-haut tout n’est que vide : des flots de lumière, certes, mais sans nourriture ni appui pour le corps. Pourquoi alors un tel orgueil ? Pourquoi ces reproches ? Est-ce seulement afin de camoufler la pure folie de leur désir et ainsi dissimuler leur inaptitude aux choses de la vie ? Que les oiseaux sont ridicules !... Mais leurs discours ne me tromperont plus ! Je sais tout maintenant ! J'ai vu le ciel, je m’y suis jetée. J'ai mesuré sa profondeur, j’ai enduré la chute. J’ai survécu, plus confiante en moi que jamais à présent. Que ceux qui sont incapables d’aimer la terre ferme continuent donc à vivre dans le mensonge ! je connais – moi - la vérité. Je ne me fierai plus à leur appel. Créature de la terre je suis, sur la terre je vivrai !

« Et fière d’elle, La Couleuvre s’enroula sur sa pierre.

« La mer scintillait, tout n’était que lumière et les vagues, grondantes, frappaient le rivage.

« Dans leurs rugissements retentit la chanson du fier oiseau. Les rochers sous leurs coups en tremblèrent, le ciel frémit de ce chant redoutable :

"Chantons et rendons gloire à la folie de tous ces audacieux !

"La folie de ces braves est la sagesse de la vie. Ô valeureux Faucon ! Luttant contre tes ennemis tu fus saigné à mort. Mais le temps viendra où les gouttes chaudes de ton sang, telles des étincelles, éclaireront les ténèbres qui emprisonnent la vie. Ton sang embrasera une myriade de cœurs intrépides, de fous assoiffés de lumière et de liberté !

"Voici que tu es mort !… Mais dans le chant de ces âmes fortes et courageuses tu resteras à jamais un immortel exemple, un fier appel à la liberté, à la lumière !

"Chantons et rendons gloire à la folie de tous ces audacieux !... »