Maxime Gorki – Le chant du Faucon – Epilogue
Maxime Gorki - Le chant du Faucon
(1899)
Максим Горький - Песня о Соколе
Epilogue
...Молчит опаловая даль моря, певуче плещут волны на песок, и я молчу, глядя в даль моря. На воде всё больше серебряных пятен от лунных лучей... Наш котелок тихо закипает.
Одна из волн игриво вскатывается на берег и, вызывающе шумя, ползёт к голове Рагима.
— Куда идёшь?.. Пшла! — машет на неё Рагим рукой, и она покорно скатывается обратно в море.
Мне нимало не смешна и не страшна выходка Рагима, одухотворяющего волны. Всё кругом смотрит странно живо, мягко, ласково. Море так внушительно спокойно, и чувствуется, что в свежем дыхании его на горы, ещё не остывшие от дневного зноя, скрыто много мощной, сдержанной силы. По тёмно-синему небу золотым узором звёзд написано нечто торжественное, чарующее душу, смущающее ум сладким ожиданием какого-то откровения.
Всё дремлет, но дремлет напряжённо чутко, и кажется, что вот в следующую секунду всё встрепенётся и зазвучит в стройной гармонии неизъяснимо сладких звуков. Эти звуки расскажут про тайны мира, разъяснят их уму, а потом погасят его, как призрачный огонёк, и увлекут с собой душу высоко в темно-синюю бездну, откуда навстречу ей трепетные узоры звёзд тоже зазвучат дивной музыкой откровения...
...L’horizon opalescent de la mer est silencieux. Les vagues, dans une douce musique, roulent sur le sable. Portant mon regard au loin, je me tais. Les reflets de la lune sur les eaux s’irisent en mille taches argentées... Notre marmite frémit doucement.
L'une des vagues, enjouée, s’avance sur le rivage. Bruissante de défi, elle rampe vers la tête de Raghim.
- Où vas-tu ainsi ? Allez, allez ! Raghim lui fait un geste de la main, et la vague se retire docilement.
Cette façon qu'a Raghim de parler à la vague, comme si elle possédait une âme, n'a, pour moi, rien de ridicule ou d’effrayant. Tout ce qui nous entoure semble étrangement vivant, plein de tendresse et de douceur. La mer est si profondément calme : on sent que dans son souffle plein de fraîcheur - qui remonte vers les montagnes encore pénétrées de la chaleur du jour - se cache tant de puissance et tant de force retenue... Les motifs dorés des étoiles écrivent sur le ciel bleu nuit quelque chose de solennel, quelque chose qui enchante l'âme et confond l’esprit ; doux prélude à quelque révélation.
Tout est en sommeil, mais dans un sommeil si tendu qu'il semble que, une seconde encore et tout se réveillera, entonnera une harmonieuse mélodie faite d’accords indéfinissablement suaves. Ces sons raconteront les secrets du monde, les révéleront à l’esprit – le consumant ensuite, telle une flamme fantomatique. Avec eux, ils emporteront l’âme dans l'abîme bleu de la nuit. Et là-haut, à sa rencontre, les motifs tremblants des étoiles vibreront aussi de l’ineffable musique de la révélation…
Le Chant du Faucon (Песня о соколе) - 1967 - réalisé par Boris Stépantstev (Борис Степанцев)
Note du traducteur :
'Le chant du Faucon' n'a fait l'objet, à ma connaissance, d'aucune traduction récente en français. La seule référence que j'ai trouvée est une parution des Chants I. et II. (sans le prologue ni l'épilogue) datant de 1921, dans le journal 'Le Travailleur' - organe de la Fédération communiste de l'Yonne. Lire.
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Alexandre Pouchkine – L’aigle et le corbeau
conte kalmouk
Александр Сергеевич Пушкин : Орёл и ворон
Pouchkine introduit dans La Fille du capitaine (Капитанская дочка) un court conte : ‘L’aigle et le corbeau’. Gorki avait-il en tête ce récit lorsqu’il écrivit Le chant du faucon ? il n'est pas interdit de le penser.
Ces deux fables développent en effet un thème identique, celui de deux animaux que tout oppose. Au cœur de leur confrontation est posée l'antique question du choix d'existence : que vaut-il mieux, une vie brève et glorieuse ou une vie longue et obscure ?… Bernard Pollet.
Однажды орёл спрашивал у ворона: скажи, ворон-птица, отчего живёшь ты на белом свете триста лет, а я всего-на-всё только тридцать три года? — Оттого, батюшка, отвечал ему ворон, что ты пьёшь живую кровь, а я питаюсь мертвечиной. Орёл подумал: давай попробуем и мы питаться тем же. Хорошо. Полетели орёл да ворон. Вот завидели палую лошадь; спустились и сели. Ворон стал клевать, да похваливать. Орёл клюнул раз, клюнул другой, махнул крылом и сказал ворону: нет, брат ворон; чем триста лет питаться падалью, лучше раз напиться живой кровью, а там что бог даст!
« Un jour l’aigle demanda au corbeau : — Dis-moi, oiseau-corbeau, pourquoi vis-tu en ce bas-monde trois cents ans, et moi, en tout et pour tout, seulement trente et trois années ? — Parce que, mon compère, lui répondit le corbeau, tu te nourris de sang frais et moi de charogne. — L’aigle pensa : « Essayons, nous aussi, de nous nourrir de même »... Bien !... L’aigle et le corbeau volèrent ensemble. Ils aperçurent la dépouille d’un cheval, descendirent et se posèrent. Le corbeau se mit à becqueter, puis à faire l’éloge de la pitance. L’aigle donne un premier coup de bec : une fois, deux fois… Alors il agite son aile et déclare au corbeau : — Non, corbeau, mon frère, plutôt que durant trois cents ans manger de la charogne, mieux me vaut m’abreuver une seule fois de sang frais..., et après, advienne ce que Dieu voudra ! »
(Extrait du roman 'La Fille du capitaine', Chapitre XI, 1836.)
Remerciements :
- Svetlana Weiss qui m’a accompagné tout au long de la traduction ;
- Olga Moutouh pour sa relecture, ses remarques et ses corrections ‘côté russe’ ;
- Bernard Pollet pour la relecture ‘côté français’.
Lecture :
- Valéry Lekarev (Валерий Лекарев) et Dimitri Nagiev (Дмитрий Нагиев) en russe, et Bernard Pollet en français, pour la lecture du 'Chant du Faucon' ;
- Svetlana Weiss, en russe, et Bernard Pollet en français, pour la lecture de 'L'aigle et le corbeau'.
Conception Web : Eléna Ogievetsky – EK-PRINT-WEBDESIGN, que je remercie chaleureusement.