Episode 03 – Le destin

Petites nouvelles russe - Kouprine - Le Destin - L'auberge rouge
L'auberge rouge

Судьба́ – Le destin

 

Третий эпизо́д - Еpisode trois

В темноте́ торопли́во оседла́ли они́ ло́шадь и му́ла, вы́ехали на доро́гу и до тех пор е́хали поспе́шно, пока́ за ни́ми не смо́лкли то́пот ног и я́ростные во́згласы, доноси́вшиеся с постоя́лого двора́. Но когда́ ста́ло ти́хо, оте́ц вдруг кру́то придержа́л му́ла, ощу́пал вокру́г себя́ рука́ми и приказа́л сы́ну:

- Стой! Вороча́й наза́д!

Сам же нетерпели́во поверну́л му́ла и, погоня́я его́ пле́тью, понёсся во весь опо́р. Сын за ним.

Опя́ть въе́хали во двор. Загляну́ли в о́кна кофе́йной, прислу́шались. Там тишина́, как в моги́ле. Горя́т ла́мпы. Люде́й снача́ла не вида́ть. То́лько пото́м, присмотре́вшись, заме́тили по́ полу тру́пы и лу́жи кро́ви. Окли́кнули хозя́ина, прислу́жников. Нет отве́та. Должно́ быть, испуга́лись резни́ и попря́тались и́ли убежа́ли в лес.

Бро́сил купе́ц пово́дья на ру́ки сы́ну. Бы́стрыми шага́ми подня́лся по крыльцу́, зашёл в ко́мнату, подошёл к тому́ са́мому ме́сту, где они́ то́лько что у́жинали, нагну́лся над ла́вкой, - и сын уви́дел сквозь окно́, как оте́ц по́днял с сиде́нья и переки́нул че́рез плечо́ о́ба ко́жаные мешка́, свя́занные верёвкой. То́лько тут по́нял сын, что второпя́х они́ забы́ли захвати́ть э́ти мешки́.

Но, вы́йдя на двор, купе́ц не вы́молвил ни сло́ва в объясне́ние. Пристро́ил мешки́ к седлу́, вскочи́л на му́ла и протяну́л е́го ара́пником под живото́м.

Petites nouvelles russes - Le destin - Main de Fatma

Dans l'obscurité, père et fils harnachèrent à la hâte le cheval et le mulet puis déguerpirent. Et aussi longtemps que les exclamations furieuses et les piétinements de l’auberge se firent entendre ils poussèrent le train. Quand tout devint silence, le père retint brusquement sa monture, tâta ses flancs et ordonna à son fils :

Arrête ! Fais demi-tour !

Lui-même, avec impatience, obligea le bourricot à se retourner, le fouetta de sa cravache et s'élança à toute l’allure, son fils trottinant derrière lui.

Ils entrèrent dans la cour de l’auberge. Tous deux jetèrent un coup d’œil par les vitres et tendirent l’oreille. A l’intérieur régnait un silence de mort. Les lampes étaient toujours allumées.

D’abord, ils ne virent personne. Ce n'est qu'après avoir regardé de plus près qu'ils remarquèrent des corps sans vie gisant dans des flaques de sang. Ils hélèrent le propriétaire, appelèrent les gens de la maison, sans réponse. Tout le monde, effrayé par le massacre, avait dû se cacher ou s'enfuir dans la forêt toute proche.

Le marchand confia les rênes du mulet à son fils. À pas rapides, il gravit les marches du porche ; il entra dans la salle, se rendit à l'endroit où tous deux avaient dîné et se pencha au-dessus du banc. Le fils vit à travers la fenêtre son père saisir et jeter sur son épaule les deux sacs en cuir que celui-ci avait eu la prudence de lier au siège par une corde. C'est alors seulement que le fils comprit que dans leur urgence à déguerpir son père en avait oublié les sacoches !

En sortant dans la cour, le marchand ne prononça aucun un mot, ne donna aucune explication. Il attacha les sacoches à sa selle, sauta sur le mulet et gratifia l’animal d’un coup de cravache sur la panse.