• Valse de guerre – Dans la forêt près du front

    Georges Vinogradov (Георгий Виноградов) - 1945

    Dans la forêt près du front

    В лесу прифронтовом

    (La valse d’automne - Осенний вальс)


    Paroles de Mikhaïl Issakovski (1942) - Musique de Matveï Blanter (1943)

    Слова Михаила Исаковского (1942) - Музыка Матвея Блантера (1943)

    Lors d’un moment de répit entre deux combats, les soldats se souviennent de leur vie d’autrefois, loin du front...

    С берёз, неслышен, невесом,
    Слетает жёлтый лист.
    Старинный вальс «Осенний сон»
    Играет гармонист.
    Вздыхают, жалуясь, басы,
    И, словно в забытьи,
    Сидят и слушают бойцы -
    Товарищи мои.

    Под этот вальс весенним днём
    Ходили мы на круг;
    Под этот вальс в краю родном
    Любили мы подруг;
    Под этот вальс ловили мы
    Очей любимых свет;
    Под этот вальс грустили мы,
    Когда подруги нет.

    И вот он снова прозвучал
    В лесу прифронтовом,
    И каждый слушал и мечтал
    О чём-то дорогом;
    И каждый думал о своей,
    Припомнив ту весну.
    И каждый знал - дорога к ней
    Ведёт через войну.

    Пусть свет и радость прежних встреч
    Нам светят в трудный час.
    А коль придётся в землю лечь,
    Так это ж только раз.
    Но пусть и смерть в огне, в дыму
    Бойца не устрашит,
    И что положено кому -
    Пусть каждый совершит.

    Так что ж, друзья, коль наш черёд,
    Да будет сталь крепка!
    Пусть наше сердце не замрёт,
    Не задрожит рука.
    Настал черёд, пришла пора, -
    Идём, друзья, идём.
    За всё, чем жили мы вчера,
    За всё, что завтра ждём.

    Du bouleau, sans un bruit et légère
    Une feuille jaunie se pose sur le sol.
    L’accordéoniste joue une vieille valse :
    «Rêve d’automne »¹.
    Les basses soupirent et se plaignent,
    Et, comme s’ils rêvaient,
    Les soldats – mes camarades -
    S’assoient et écoutent.

    Par un jour de printemps, sur cette valse
    Nous allions danser ;
    Sur cette valse, dans notre terre natale
    Nous chérissions nos amoureuses ;
    Sur cette valse nous saisissions la lumière
    Des yeux de nos aimées ;
    Et en écoutant cette valse, sans elles,
    Nous étions emplis de tristesse.

    Et voilà qu’à nouveau elle retentit
    Dans la forêt près du front,
    Et chacun en l'entendant a rêvé
    A ce qui lui était le plus cher ;
    Et chacun pensait à l’aimée,
    En se souvenant du printemps passé.
    Et chacun savait que la route qui conduisait à elle
    Passait par la guerre.

    Puissent la lumière et la joie des rencontres d’autrefois
    Nous éclairer dans ces heures difficiles.
    Et si un jour nous devons reposer en terre,
    Ce sera pour toujours.
    Mais que la mort par le feu et dans la fumée
    N’effraie pas le soldat,
    Et que ce qui doit advenir à chacun
    Puisse s’accomplir.

    Et alors, mes amis, puisque c’est notre tour,
    Il faut que l’acier soit solide !
    Puisse notre cœur ne pas se glacer
    Et nos mains ne pas trembler.
    Notre tour est venu, il est temps,
    En avant ! mes amis, en avant !
    Pour tout ce que nous avons vécu hier,
    Pour tout ce que nous espérons du lendemain !

    1. C'est pour cela que cette chanson est aussi appelée ‘La valse d’automne’ (осенний вальс).

    Quelques mots sur cette valse...

    Voici ce que déclarait son compositeur : "...Je voulais donner au soldat l'occasion de "communiquer" avec ses proches, d'exprimer ses pensées les plus intimes, de leur parler de ce qu’il vivait.. (…) Sa mélodie sonne aussi comme un appel au combat, elle appelle à lutter contre un ennemi haï." M. Blanter.

    Extrait du film ‘Officiers’ (Офицеры) - 1971

    La valse est reprise dans le film ‘Officiers’ (Офицеры), réalisé en 1971 par Vladimir Rogovoïe (Владимир Роговой), montrant l'âpreté des combats et de la guerre - Voir sur Youtube le film ‘Officiers’ en version colorisée (2010) .

    Serge Gainsbourg - Une vieille valse (Старинный вальс) - 1974

    C’est à ma connaissance, la seule chanson en russe enregistrée par Serge Gainsbourg, lui-même fils d'immigrants russes juifs et rescapé de la Seconde guerre mondiale.

    Petites nouvelles russes - Valse de guerre - Serge et Charlotte Gainsbourg

    Sur cette mélodie, Serge Gainsbourg a écrit une chanson pour sa fille Charlotte : Ecoutez sur Youtube 'Zéro pointé vers l'infini' (1986).

    'Dans la forêt près du front' ou 'Valse d'automne',
    Les origines de cet air...

    Parfois aussi appelée ‘La valse d’automne’ (осенний вальс), sa mélodie serait librement inspirée de deux autres valses écrites des années auparavant par le compositeur anglais Archibald Joyce :  ‘Remembrance’ (Souvenirs) – 1914 - Ecoutez sur Youtube, et Dream of Autumn’ (Rêve d’automne) – 1908 - Ecoutez sur Youtube, que jouaient, paraît-il, les musiciens à bord du Titanic lorsque  le navire sombra. .

    Cette dernière valse était devenue populaire, avant la Seconde guerre mondiale, en URSS. De nombreux paroliers y rajoutèrent leur vers ; des vers profondément nostalgiques mais toujours plein d'espérance, correspondant, certains diront, à ‘l’âme russe’ (?).

    Interprétée par Lidia Rouslanova (Лидия Русланова)

    Musique d'Archibald Joyce (1908) - Paroles de Vasili Lebedev-Kumach (Василий Лебедев-Кумач)

    Petites nouvelles russes - Valse de guerre - Осенний сон

    Ветер осенний листья срывает,
    Вся природа грусти полна.
    Только надежда не умирает —
    Сердце знает: придёт весна.
    И печали, и ненастья —
    Всё, как дождь осенний, пройдёт.
    Будет радость, будет счастье,
    И горячее солнце взойдёт!
    Полно вам плакать, клёны, берёзы,
    Старых листьев вам не собрать.
    Полно ронять вам крупные слёзы,
    День весенний придёт опять.
    Скоро минует осень разлуки,
    Лист зелёный вырастет вновь,
    Вновь обоймут нас милые руки,
    Будет радость, придёт любовь.

    Le vent d'automne arrache les feuilles,
    Toute la nature est pleine de tristesse.
    Seul l'espoir ne meurt pas -
    Le cœur sait bien : le printemps viendra.
    Et la tristesse et le mauvais temps,
    Tout comme la pluie d'automne, passeront.
    Il y aura de la joie, il y aura du bonheur
    Et un plein soleil se lèvera !
    Cessez donc de pleurer, érables, bouleaux,
    Vous ne pouvez conserver vos vieilles feuilles.
    Cessez de verser de grosses larmes :
    Les jours du printemps reviendront.
    L'automne de la séparation bientôt s’enfuira,
    Et les feuilles reverdiront.
    De belles mains nous étreindront à nouveau,
    Il y aura de la joie, l'amour reviendra.

    Ecoutez sur Youtube une autre version de la valse 'Rêve d'automne'  tout aussi nostalgique interprétée par Lioudmila Zykina (Людмила Зыкина) – sur des paroles de Vadim Malkov (Вадим Малков)...

    Source : Lire (en russe) 'Rêve d'automne', l'histoire d'une valse.

  • Valse de guerre – Dans la tranchée

    Denis Koroliov (Денис Королёв)
    Sur des images du film 'La bataille de Stalingrad (Сталинградская битва) de 1949

    Dans la tranchée

    В землянке


    Paroles d'Alexei Sourkov (1941) - Musique de Constantin Listov (1942)

    Слова Алексея Суркова (1941) - Музыка Константина Листова (1942)

    L'accordéon chante et le soldat se souvient de l'aimée...

    Бьётся в тесной печурке огонь,
    На поленьях смола как слеза.
    И поёт мне в землянке гармонь
    Про улыбку твою и глаза.

    Про тебя мне шептали кусты
    В белоснежных полях под Москвой.
    Я хочу, чтобы слышала ты,
    Как тоскует мой голос живой.

    Ты сейчас далеко-далеко,
    Между нами снега и снега.
    До тебя мне дойти нелегко,
    А до смерти - четыре шага.

    Пой, гармоника, вьюге назло,
    Заплутавшее счастье зови.
    Мне в холодной землянке тепло
    От моей (твоей) негасимой любви.

    Le feu grésille dans le petit poêle
    Sur les bûches la résine s’écoule pareille à une larme
    L'accordéon chante dans le gourbi de la tranchée,
    Me rappelant tes yeux et ton sourire.

    Les buissons ont chuchoté me parlant de toi
    Dans les champs enneigés autour de Moscou.
    Je veux que tu puisses entendre
    Combien ma voix toujours vivante se languit.

    Tu es si loin, si loin maintenant.
    Entre nous : de la neige, encore de la neige.
    Combien il me sera difficile de te rejoindre,
    Alors que la mort, elle, n’est qu’à deux pas d’ici¹.

    Chante, accordéon, pour contrarier la tempête
    Rappelle-moi mon bonheur perdu.
    Pour moi, dans cette froide tranchée, je me réchauffe
    Pensant à mon (ton)* éternel amour.

    * Selon les versions.

    1. En russe : 'à quatre pas'.

    L'histoire de cette valse...

    Comme de nombreux écrivains soviétiques (cf. Vassili Grosman), lors du déclenchement de la Grande guerre patriotique (1941-1945), Alexei Sourkov (Алексей Сурков) devient correspondant de guerre. Pris dans la débâcle de l’Armée rouge, en automne 1941, il échappe de justesse à la mort, réussissant à s’abriter puis à fuir en traversant une rivière gelée non loin du village de Kachino (Кашино) situé une soixantaine de kilomètres à l’ouest de Moscou.

    Réfugié au fond d’une tranchée, au son d’un accordéon qui jouait, il composa les premières lignes de ce qui deviendra les paroles de cette chanson, mise en musique en février 1942 par le compositeur Constantin Listov (Константин Листов).

    Sous les fourches de la censure...

    Comme d’autres œuvres de l’époque stalinienne, la chanson, bien que très vite populaire, connut un destin mouvementé, passant sous les fourches de la censure. On demanda à son auteur d’en modifier les paroles, ce qu’il refusa. Les premiers enregistrements furent donc saisis et détruits dans l’été 1942. D’autres se chargèrent de rendre le texte plus ‘optimiste’ et d’éloigner ainsi la mort que l’auteur situe dans ses vers ‘à deux pas d’ici’ (en russe : à quatre pas) : bien trop près pour entretenir le moral des troupes !

    Heureusement, après la bataille de Stalingrad (février 1943), la débâche stoppée et les victoires de l’Armée rouge se succédant, la censure ferma les yeux et la chanson put à nouveau être diffusée et connaître par la suite de nombreuses reprises.

    Interprétée par Vladimir Netchaev (Владимир Нечаев)

    Dans le wagon chauffé

    В теплушке

    Version 'Stalingrad' (1946)

    Petites nouvelles russes - Valse de guerre - La bataille de Stalingrad
    'La bataille de Stalingrad'

    Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, la mélodie de la valse 'Dans la tranchée' fut reprise, avec d’autres mots, célébrant Stalingrad : fin 1942, les troupes hitlériennes qui avait pris la ville furent encerclées, assiégées puis défaites par l’Armée rouge en février 1943. Cette lourde défaite marqua un tournant décisif de la Seconde guerre mondiale : l’arrêt définitif de l’avancée allemande.

    Vladimir Pétrov (Владимир Петров) en 1949 : 'La bataille de Stalingrad' - Visionner sur Youtube -  (Сталинградская битва). Musique d'Aram Khatchatourian (Арам Хачатурян).

    Догорает за Волгой закат,
    Да по рельсам составы гремят.
    И увозят теплушки солдат,
    Отстоявших в боях Сталинград.

    Над землёю небес океан,
    В теплом воздухе пахнет весной.
    А в теплушке играет баян,
    И поёт старшина молодой.

    Русый чуб опустив на гармонь,
    Задушевно поёт старшина.
    И мерцает в печурке огонь,
    И в теплушке стоит тишина.

    Старшина с одним парнем дружил,
    Вместе ел, вместе пил, вместе спал.
    В одной роте три года служил,
    Ни в нужде, ни в беде не бросал.

    Воевал с ним Карельских лесах,
    Били немцев под Тулой зимой.
    Вынес друга в бою на руках,
    А друг спас ему жизнь под Москвой.

    Да не писан для пули закон,
    И не едет товарищ назад.
    Спит у Волги под холмиком он,
    Отстоявший родной Сталинград.

    Тёмной ночью сразил его враг,
    Схоронил его друг над рекой.
    А над городом плещется флаг,
    Водружённый гвардейца рукой.

    Догорел уж за Волгой закат,
    Стих баян, лишь гремят поезда.
    А вдали весь в огнях Сталинград -
    Нашей славы военной звезда.

    А вдали весь в огнях Сталинград -
    Нашей славы военной звезда.

    Au crépuscule, le soleil s'éteint au-delà de la Volga,
    Là, les trains grondent sur les rails.
    Et les wagons chauffés emmènent les soldats,
    Ceux qui ont défendu Stalingrad dans les combats.

    Au-dessus de la terre, l’océan du ciel,
    Dans l'air réchauffé on respire le printemps.
    L'accordéon joue dans le wagon,
    Et le jeune adjudant chante.

    Sa mèche blonde frôlant l'accordéon,
    L’adjudant chante de tout son cœur.
    Et la flamme vacille dans le poêle,
    Dans le silence du wagon chauffé.

    L’adjudant avait un ami, un brave gars,
    Ils mangeaient ensemble, ensemble ils buvaient, partageaient la même couche.
    Pendant trois ans, dans la même compagnie,
    Ni dans le besoin ni dans le malheur il ne l’a abandonné.

    Ils ont livré bataille dans les forêts de Carélie,
    Ils ont battu les Allemands près de Toula durant l’hiver.
    Il a porté son ami à bout de bras durant le combat,
    Et cet ami lui a sauvé la vie près de Moscou.

    Les balles ne connaissent aucune loi,
    Et le camarade ne reviendra pas.
    Il dort à présent au bord de la Volga dans sa tombe,
    Ayant défendu Stalingrad, notre chère Stalingrad.

    Par une nuit obscure, l'ennemi le tua,
    Et son ami l'enterra près du fleuve.
    Le drapeau flotte au-dessus de la ville
    Hissé haut par la main du soldat.

    Déjà le soleil s’est couché par-delà la Volga,
    L’accordéon s’est tu, seulement le cliquetis du train.
    Et au loin, brillent tous les feux de Stalingrad :
    Stalingrad : étoile de notre gloire !

    Et au loin, brillent tous les feux de Stalingrad :
    Stalingrad : étoile de notre gloire !

    Là dans la tranchée humide - Там в землянке сырой… (1957)

    Une autre valse, moins célèbre, sur un autre air, raconte le quotidien d’un soldat dans les tranchées. Elle fut composée bien plus tardivement, extrait du  film ‘Ekatarina Boronina’  Visionner sur Youtube - 1957. (Екатерина Воронина), réalisé par Isidor Annekski (Исидор Маркович Анненский).

    Interprétée par Iouri Pouzyriov (Юрий Пузырёв) 1957

    Petites nouvelles russes - Valse de guerre - Dans la tranchée 3
    Illustration de Boris Nemenski (Борис Неменский)

    Auteur : Lev Schwartz (Лев Шварц)

    Compositeur : Evgueni Dolmatovski (Евгений Долматовский)

    Там в землянке сырой
    Забываю порой о боях, о войне.
    Вспоминаю о том, как стояли вдвоём
    Мы с тобой над рекой в тишине...

    И сегодня меня от шального огня
    Охраняет любовь.
    Перед боем солдат вспоминает твой взгляд,
    День придёт - мы увидимся вновь...

    Я согрею озябшие руки,
    И не будет на свете разлуки!
    Говорить про любовь не умею,
    Не могу объясниться никак...

    До рассвета гремит батарея,
    Мы идёт по дороге атак,
    Озарённый любовью твоею,
    Предо мной раступаётся мрак...

    Là dans la tranchée humide
    Parfois j'oublie les batailles, la guerre.
    Je me rappelle comme nous nous tenions ensemble
    Au-dessus de la rivière, silencieux...

    Et aujourd'hui, l’amour me protège
    De ce feu infernal.
    Avant le combat, le soldat que je suis, se souvient de ton regard,
    Et je sais que le jour viendra où l’on se reverra...

    Je réchaufferai tes mains glacées
    Et rien au monde ne pourra nous séparer !
    Je ne sais pas parler d'amour,
    D’aucune façon je ne puis l’expliquer...

    La batterie tonne jusqu'à l'aube
    Nous avançons sur la route, à l’offensive,
    Et éclairée par ton amour
    L'obscurité s’écarte devant moi…

    n.b. Cette valse porte aussi le titre de ‘La valse d’avant-guerre’ (Довоенный вальс), ce qui peut porter à confusion, vu que (au moins) une autre valse porte le même titre !

  • Valse de guerre – Seulement sur le front

    Seulement sur le front (Только на фронте), 1977
    (Version initialement destinée à figurer dans le film 'Seuls les "vieux" vont au combat' (В бой идут одни «старики»)

    Seulement sur le front

    Только на фронте

    (1943)
    ­

    Paroles de Vassili Lébédev-Koumatch - Слова: Василий Лебедев-Кумач

    Musique d'Anatoli Lépine - Музыка: Анатолий Лепин

    Autre titre : Après la bataille (После боя)

    Кто сказал, что надо бросить
    Песни на войне?
    После боя сердце просит
    Музыки вдвойне!

    Нынче — у нас передышка,
    Завтра вернёмся к боям,
    Что ж твоей песни не слышно,
    Друг наш, походный баян?

    После боя сердце просит
    Музыки вдвойне!

    Кто сказал, что сердце губит
    Свой огонь в бою?
    Воин всех вернее любит
    Милую свою!

    Только на фронте проверишь
    Лучшие чувства свои,
    Только на фронте измеришь
    Силу и крепость любви!

    Воин всех вернее любит
    Милую свою!

    Кто придумал, что грубеют
    На войне сердца?
    Только здесь хранить умеют
    Дружбу до конца!

    В битве за друга всю душу
    Смело положат друзья.
    Ни расколоть, ни нарушить
    Дружбы военной нельзя!

    Только здесь хранить умеют
    Дружбу до конца!

    Кто сказал, что надо бросить
    Песни на войне?
    После боя сердце просит
    Музыки вдвойне!

    Пой, наш певучий братишка.
    Наш неразлучный баян!
    Нынче — у нас передышка,
    Завтра — вернёмся к боям.

    После боя сердце просят
    Музыки вдвойне!

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    Qui a dit qu'il fallait arrêter de chanter
    Des chansons durant la guerre ?
    Après la bataille, le cœur exige
    De la musique, encore et encore !

    Aujourd'hui - nous avons un répit,
    Demain nous retournerons au combat
    Eh bien, Accordéon mon ami,
    Pourquoi ne joues-tu pas ?

    Après la bataille, le cœur exige
    De la musique, encore et encore !

    Qui a dit que l’ardent amour
    S’étiole au combat ?
    Plus que d'autres, du fond du cœur,
    Le soldat aime sa bien-aimée !

    Ce n'est qu'à la guerre que vous pouvez savoir
    Ce qu’il y a de meilleur en vous,
    Ce n'est qu'au front que vous pouvez mesurer
    La force et la solidité de votre amour !

    Plus que d'autres, du fond du cœur,
    Le soldat aime sa bien-aimée !

    Qui a dit que les cœurs
    s'endurcissent à la guerre ?
    C’est seulement alors qu’ils préservent
    L’amitié jusqu'au bout !

    L'amitié entre soldats
    Ne saurait être ni rompue ni brisée :
    Au combat les soldats amis
    Sacrifieront leur âme !

    C’est seulement alors qu’ils préservent
    L’amitié jusqu'au bout !

    Qui a dit qu'il fallait arrêter de chanter
    Des chansons durant la guerre ?
    Après la bataille, le cœur exige
    De la musique, encore et encore !

    Chante, frère, ta mélodie !
    Accordéon, ami inséparable !
    Aujourd'hui - nous avons un répit,
    Demain – nous retournerons au combat.

    Après la bataille, le cœur exige
    De la musique, encore et encore !

    Petites nouvelles russes - Valses de guerre - Vassili Lebedev-Kоumatch
    Vassili Lebedev-Kоumatch (Василий Иванович Лебедев) - 1898-1849

    Vassili Lébédev-Kоumatch, un communiste convaincu... de la force de la musique !

    De son vrai nom : Vassili Lébédev (Василий Иванович Лебедев) - 1898-1849, c’est lui-même qui y ajouta le qualificatif ‘Koumatch’ (Кумач), qui signifie littéralement "étoffe pourpre", par référence au drapeau révolutionnaire communiste et à celui de l’URSS.

    Vassili Lébédev-Kоumatch fut l'un des fondateurs de l'Union des écrivains de l'URSS, et membre du Soviet Suprême. Au déclenchement de la Seconde guerre mondiale, officier de l'Armée rouge, il servit comme commissaire politique du PCUS (Parti communiste de l'Union soviétique) au sein de la Flotte du Nord.

    C’est là qu’un haut-gradé du quartier général lui aurait déclaré avec irritation : « Maintenant, il ne faut pas chanter, mais battre les salauds fascistes... ».

    Lebedev-Kumach ne put convaincre son interlocuteur de l’importance de la musique et des chansons pour motiver les soldats qui combattaient sur le front, mais, de retour à Moscou, il écrivit la réponse en vers : ‘Seulement sur le front’ (Только на фронте), mise en musique par Anatoli Lépine (Анатолий Яковлевич Лепин) (1907-1984)...

  • Valse de guerre – La valse du hasard

    La valse du hasard, interprétée par Valentina Tolkounova (Валентина Толкунова)

    La valse du hasard

    Случайный вальс

    (1943)
    ­
    ­

    Paroles de Evguèni Dolmatovski - Слова: Евгений Долматовский

    Musique de Marc Fradkine - Музыка: Марк Фрадкин

    Dansons jusqu'au matin...

    Ночь коротка,
    Спят облака,
    И лежит у меня на ладони
    Незнакомая ваша рука.
    После тревог
    Спит городок.
    Я услышал мелодию вальса
    И сюда заглянул на часок.

    Припев:

    Хоть я с вами почти не знаком,
    И далеко отсюда мой дом,
    Я как будто бы снова
    Возле дома родного.
    В этом зале пустом
    Мы танцуем вдвоём,
    Так скажите хоть слово,
    Сам не знаю о чём.

    Будем кружить,
    Петь и дружить,
    Я совсем танцевать разучился
    И прошу вас меня извинить.
    Утро зовёт
    Снова в поход.
    Покидая ваш маленький город,
    Я пройду мимо ваших ворот.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    La nuit est courte,
    les nuages dorment
    Et je serre dans ma paume
    Votre main étrangère.
    Après l'alarme,
    La petite ville s'est endormie,
    J'ai entendu la mélodie d'une valse
    Et là je m'y suis arrêté un moment.

    Refrain :

    Bien que je vous connaisse à peine,
    Et que mon foyer est bien loin d'ici,
    C'est comme si j'étais de retour
    Dans la maison qui m’a vu naître...
    Dans cette salle vide
    Nous dansons tous les deux,
    Alors dites-moi au moins un mot,
    Je ne sais quoi, peu importe...

    Nous allons être amis,
    Chanter et valser.
    J'ai complètement oublié comment danser
    Et je vous demande de me pardonner.
    Le matin appelle
    De nouveau à reprendre la marche,
    En quittant votre petite ville,
    Je passerai devant votre porte.

    En février 1942, le poète Evguèni Dolmatovski (Евгений Аронович Долматовский) (1915-1994) publia dans le journal "Armée rouge" (Красная армия) un poème intitulé "Danser jusqu'au matin" (Танцы до утра). Au cours de l’année 1943, dans les tourments de la guerre, le poème fut adapté musicalement, en collaboration avec le compositeur Marc Fradkine (Марк Григорьевич Фрадкин) (1914-1990).

    Petites nouvelles russes - Valses de guerre - Случайный вальс

    L'histoire vraie d'une brève rencontre :

    Dans ses mémoires, Dolmatovski a rapporté que l’évènement relaté dans la chanson était associée à un fait réel que lui avait raconté Marc Fradkine.

    Un pilote de l’aviation soviétique traversait un soir un village prés du front. Le pilote entendit de la musique et, s’approchant, il vit un groupe de jeunes gens qui dansait. Il y avait-là une fille toute seule et le jeune pilote l’invita a danser sur l’air d’une valse. La fille s'appelait Zina.

    Mais bientôt, ils durent se dire au revoir. Dehors, le chauffeur qui conduisait le jeune pilote klaxonnait. Après avoir rapporté cette brève rencontre à Fradkine, le pilote lui aurait déclaré : « Vous, les compositeurs qui composez des chansons, j'ai une demande : écrivez une chanson sur ce que je viens de raconter. Si vous décrivez tout exactement Zina comprendra qu'il s'agit d'elle et de moi. Peut-être qu'elle l’entendra, qu’elle répondra. » Et en effet, la jeune fille écrivit à la radio pour avoir les coordonnées du pilote…

    La fin de la romance est plus triste. Entre temps, lors d’un vol de reconnaissance le 8 septembre 1943, le jeune pilote de 28 ans - Vassili Vassiliev (Василий Васильев) – avait trouvé la mort, ainsi que tout son équipage. La lettre de Zina resta ainsi à jamais sans réponse.

    La valse du hasard, interprétée par Evguéni Beliaev (Евгений Беляев), 1977

    Une chanson longtemps interdite d'antenne :

    La chanson, quant à elle, connut un sort difficile. Son titre originel : "La valse de l’officier" (Офицерский вальс) et les paroles durent être modifiés à la demande, semble-t-il, de Joseph Staline en personne.

    La version originale débutait par ces lignes :

    Ночь коротка,
    Спят облака,
    И лежит у меня на погоне
    Незнакомая ваша рука.

    La nuit est courte,
    Les nuages dorment,
    Et sur mes épaulettes
    Votre main inconnue s’est posée.

    Petites nouvelles russes - Valses de guerre - Joseph Staline
    Joseph Staline

    Le dictateur soviétique, après avoir écouté la chanson, aurait déclaré : « Comment la main d’une fille fragile peut-elle se poser sur l'épaule d'un officier ? C'est un géant. Veut-on humilier notre armée ? Et pourquoi l’avez-vous appelé la valse ‘La valse de l’officier’ ? Un officier doit se battre, et non danser... » En 1946, la chanson fut interdite et il fallut attendre la mort du dictateur et le dégel sous Khrouchtchev pour qu’on l’entendît à nouveau.

    Pour en savoir plus (en russe), lire : La chanson 'la valse du hasard'.

    Petites nouvelles russes - Valses de guerre - Vassily Vassiliev
    Le pilote Vassili Vassiliev ( Василий Васильевич Васильев) - 1915-1943 -, Héros de l'Union soviétique. Photo datant de 1940
  • Valse de guerre – Cils noirs, yeux noirs – Dans la clairière

    Cils noirs, yeux noirs, interprété par Igor Kravtsov, Bratsk (Игорь Кравцов, Братск)

    Cils noirs, yeux noirs

    Чёрные ресницы, чёрные глаза

    (1944)
    ­

    Première version - Первая версия
    ­

    Musique d’Albert Harris - Музыка: Альберт Гаррис

    Paroles de Victor Iltchenko - Слова: Виктор Ильченко

    De grosses larmes coulaient de tes yeux...

    Ты стояла молча ночью на вокзале,
    И в глазах нависла крупная слеза.
    Видно, в путь далёкий друга провожали
    Чёрные ресницы, чёрные глаза.

    Вот умчался поезд, рельсы отгудели,
    Милый друг уехал, может, навсегда.
    И с тоской немою вслед ему глядели
    Чёрные ресницы, чёрные глаза.

    Он недаром кончил школу боевую,
    Метко поражает лютого врага
    И не забывает девушку простую —
    Чёрные ресницы, чёрные глаза.

    Пишет письма редко, но зато в газетах
    Пишут очень часто про его дела.
    И, о нём читая, гордостью сияют
    Чёрные ресницы, чёрные глаза.

    Сокол краснозвёздный в небо вылетает,
    Для врагов-фашистов страшен, как гроза.
    О таких в народе песни сочиняют,
    О таких мечтают чёрные глаза.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    Cette nuit-là à la gare tu te tenais silencieuse.
    De grosses larmes coulaient de tes yeux.
    Et, accompagnant ton ami qui s’éloignait, le suivaient
    Tes cils noirs, tes yeux noirs.

    Le train s'est éloigné, le grincement des rails a cessé,
    Ton cher ami est parti, peut-être pour toujours.
    Et remplis d’un désir muet, l’ont suivi
    Tes cils noirs, tes yeux noirs.

    Ce n'est pas en vain qu'il a fait l'école militaire,
    Qu’il frappe implacablement l’ennemi féroce,
    Et pour autant il n’oublie pas la fille toute simple,
    Ses cils noirs, ses yeux noirs.

    S’il t’écrit rarement, très souvent les journaux
    Relatent ses exploits.
    Et, en lisant cela, ils brillent de fierté
    Tes cils noirs, tes yeux noirs.

    Le Sokol¹ portant l’étoile rouge s'envole dans le ciel,
    Pour combattre – tel l’orage - l’ennemi nazi.
    Les gens composent des chansons pour de tels héros.
    Pour de tels héros rêvent tes yeux noirs.

    ---
    1 - Sokol (Сокол) [le faucon] : avion de chasse soviétique durant la Seconde guerre mondiale.

    Une chanson en dispute d’auteur...
    .
    Si la paternité de son compositeur - Albert Garris (Альберт Гаррис) (1911—1974) - n’est pas contestée, celle de l’auteur des paroles reste sujette à caution…Il existe de cette chanson (comme pour bien d’autres !) au moins deux versions (Lire en russe).

    Son auteur (putatif) en aurait été, selon les sources communément admises, Victor Iltchenko (Виктор Лукьянович Ильченко) (1924—1949), décoré Héros de l’Union soviétique, pilote de chasse, ayant combattu sur tous les fronts lors de la Grande guerre patriotique. Rien, pourtant, dans sa biographie ne mentionne ses supposés talents d’écrivain…

    Voici donc ce qui pourrait être (?) la version originale…

    Cils noirs, yeux noirs

    Чёрные ресницы, чёрные глаза

    (1944)
    ­

    Seconde version - Вторая версия
    ­

    Musique d’Albert Harris - Музыка: Альберт Гаррис

    Paroles de Nicolas Dorizo - Слова: Николай Доризо

    Cils noirs, yeux noirs, interprété par Oleg Tchouprine (Олег Чуприн), 2021

    Вот умчался поезд, рельсы отгудели
    И как дорогая, девичья слеза
    Заблестела песня, та, что все мы пели
    Чёрные ресницы, чёрные глаза.
    Заблестела песня, та, что все мы пели
    Чёрные ресницы, чёрные глаза.

    Путь не малый пройден, век не малый прожит,
    Но летит та песня поезду вослед
    До сих пор мне сердце по ночам тревожит
    Песня тех военных, незабвенных лет.
    До сих пор мне сердце по ночам тревожит
    Песня тех военных, незабвенных лет.

    Мы её певали на ночном привале
    В сердце эту песня бережно неся
    По своим любимым с ней мы тосковали
    Чёрные ресницы, чёрные глаза.
    По своим любимым с ней мы тосковали
    Чёрные ресницы, чёрные глаза.

    Много глаз девичьих у родной России
    Их как звёзд на небе – сосчитать нельзя
    Но во всей России лишь один такие
    Чёрные ресницы, чёрные глаза.
    Но во всей России лишь один такие
    Чёрные ресницы, чёрные глаза.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    Voici que le train s’était éloigné et que le grincement des rails s’était tu.
    Et la chanson, celle que tous nous chantions, résonnait, brillante
    Aussi brillante que les larmes de la chère jeune fille
    Aux cils noirs, aux yeux noirs.

    Le chemin parcouru est bien long, bien des années sont passées,
    Mais cette chanson vole dans le sillage du train.
    Et la nuit, jusqu'à présent encore, dans mon cœur résonne
    La chanson de ces années de guerre mémorables.

    Nous l'avons chantée quand nous faisions halte la nuit.
    Portant tendrement cette chanson dans nos cœurs,
    Avec elle, nous nous languissions de nos bien-aimées -
    Aux cils noirs, aux yeux noirs.

    Nombreuses sont les filles de Russie aux beaux yeux,
    Aussi nombreuses que les étoiles dans le ciel –
    Si nombreuses qu'on ne peut les compter.
    Mais dans toute la Russie, il n'y en a qu'une qui ait de tels
    Cils noirs, de tels yeux noirs.

    Selon d’autres sources en effet, ce serait le poète Nicolas Dorizo (Николай Константинович Доризо) (1923-2011) qui serait l’auteur du texte original et l’aurait écrit à l’âge de 16 ans – en 1939 ou 1940…

    C’est d’ailleurs sur ses paroles que fut réalisé en 1951, à ma connaissance, le premier enregistrement de la chanson par Vladimir Trochine (Владимир Константинович Трошин) (1926-2008). Mais ceci reste à confirmer…

    Cils noirs, yeux noirs, interprété par Vladimir Trochine (Владимир Трошин), 1951

    Quel fut véritablement l’auteur des paroles de la chanson ‘Cils noirs, yeux noirs’ ? voilà qui est aujourd'hui encore difficile à déterminer : chacun peut être tenté de considérer qu'une bonne chanson est la sienne… Lire (en russe)...

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    Dans la clairière

    На полянке

    (1944)
    ­
    ­

    Musique d’Albert Harris - Музыка: Альберт Гаррис

    Paroles de Iouri Tséïtline - Слова: Юрий Цейтлин

    На полянке возле школы
    Встали танки на привал,
    И гармошки зов весёлый
    Всю деревню вмиг собрал.

    От полудня до заката
    Заливался гармонист
    Разрумянились девчата:
    «Хорошо как играет танкист!»

    А потом гармонь в сторонку
    Парень с шумом отложил
    И с курносенькой девчонкой
    Он шутя заговорил:

    «Подари мне на прощанье
    Взгляд твоих чудесных глаз!
    Предстоит нам расставанье —
    Мы на запад уходим сейчас!

    А когда покончим с немцем
    Буду я с войны идти,
    Но меня потянет сердце
    Вот по этому пути.

    Как услышишь ты гармошку —
    Это значит, я иду.
    Только выглянешь в окошко
    И тебя я с собою возьму!»

    Уж давно умчались танки,
    Но такое не забыть.
    И с тех пор на ту полянку
    Ходит девушка грустить.

    Часто там она встречает
    Утра розовый рассвет
    Речь танкиста вспоминает:
    Может шутка, а может быть нет...

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    Dans une clairière près de l'école
    Les chars ont fait halte un moment,
    Et à l'appel joyeux de l'accordéon
    En un instant, tout le village s’est rassemblé.

    De midi au coucher du soleil
    L'accordéoniste jouait
    Et les filles rougissaient :
    « Comme il joue bien le tankiste ! »

    Et puis, dans le son du soufflet,
    Le gars a posé son accordéon
    Et s’adressant à la fille au nez retroussé
    Il lui dit en plaisantant :

    « Avant que de partir
    Offre-moi ton regard, tes yeux si merveilleux !
    Nous devons nous séparer -
    Nous partons vers l'ouest à présent !

    « Mais quand on en aura fini avec les Allemands
    Je reviendrai de la guerre,
    Et mon cœur aspirera
    A revenir vers toi.

    « Quand tu entendras l'accordéon
    Ça voudra dire que je serai de retour.
    Regarde alors juste par la fenêtre
    Et je te prendrai avec moi ! »

    Les chars depuis longtemps sont repartis,
    Mais elle ne peut oublier.
    Et depuis lors dans cette clairière
    La fille se promène, toute triste.

    Elle y croise souvent
    L’aube rosée du matin
    Et elle se souvient des phrases du tankiste :
    Peut-être n’était-ce qu’une blague, peut-être pas ?...

    La mélodie de la chanson traverse, comme un leïtmotiv, le film de Piotr Todorovski (Пётр Ефимович Тодоровский) ‘Fidélité’ (Верность) réalisé en 1965, qui remporta, cette année-là, le prix du meilleur premier film à la Mostra de Venise. Pourtant, le nom de son compositeur, d’Albert Harris, ne figure nulle part dans le générique du film… Etrange oubli ?

    Visionner sur Youtube dans son intégralité (en russe) le film ‘Fidélité’ (Верность) (1965).

    Petites nouvelles russes - Valses de guerre - Верность
    Affiche du film 'La fidélité' (Верность), réalisé par Piotr Todorovski en 1965
    Petites nouvelles russes - Valses de guerre - Albert Harris
    Albert Harris ((1911-1974))

    Albert Harris, un musicien juif errant…

    Albert Harris (1911-1974), de son véritable nom Aaron Hekelmann, était un Juif polonais né à Varsovie. Il rejoint l’URSS durant la Grande guerre patriotique, période pendant laquelle il compose plusieurs chants de guerre dont, en 1943, ‘Les Partisans’ (Партизаны) – Ecouter sur Youtube -, sur des paroles de Vladimir Dykhovitchny (Владимир Абрамович Дыховичный). En janvier 1945, Albert Harris quitte illégalement – et définitivement - l’Union soviétique et retourne en Pologne, nouvellement libérée de l’occupant nazi. En 1950, il fuit à nouveau la Pologne alors sous le joug soviétique et séjourne dans différents pays avant de s’installer aux Etats-Unis. C’est là qu’il décédera en 1974 dans l’anonymat le plus complet.

    Pour en savoir plus (en russe) : Histoire de la chanson ‘Dans la clairière’.

    Dans la clairière (На полянке), interprétée par Guéorgi Vinogradov (Георгий Виноградов) en 1965.

  • Valse de guerre – Le petit foulard bleu

    Petites nouvelles russes - Valse de guerre - Le petit foulard bleu - Anna Danilova
    Le petit foulard bleu Création d'Anna Danilova (Анна Данилова)

     Le petit foulard bleu

    Синий платочек


    Musique de Eji Petersbourgski (Ежи Петербургский) 1940

    Paroles initiales de Iakov Galitski (Яков Галицки)
    1942
    adaptées par Mixhaï Maximov (Михай Максимов)

    'Et souvent au combat
    Ton image m'accompagne...'

    Interprétée par Alice Kojikina (Алиса Кожикина)

    n.b. Il existe plusieurs adaptations du texte initial dont les paroles diffèrent légèrement.

    Синенький скромный платочек
    Падал с опущенных плеч.
    Ты говорила, что не забудешь
    Ласковых, радостных встреч.

    Порой ночной
    Мы распрощались с тобой...
    Нет прежних ночек.
    Где ты платочек,
    Милый, желанный, родной?

    Помню, как в памятный вечер
    Падал платочек твой с плеч,
    Как провожала и обещала
    Синий платочек сберечь.

    И пусть со мной
    Нет сегодня любимой, родной, -
    Знаю: с любовью
    Ты к изголовью
    Прячешь платок дорогой.

    Письма твои получая,
    Слышу я голос родной.
    И между строчек синий платочек
    Снова встаёт предо мной.

    И часто в бой
    Провожает меня облик твой,
    Чувствую: рядом
    С любящим взглядом
    Ты постоянно со мной.

    Сколько заветных платочков
    Носим в шинелях с собой!
    Нежные речи, девичьи плечи
    Помним в страде боевой.

    За них, родных,
    Желанных, любимых таких,
    Строчит пулемётчик
    За синий платочек,
    Что был на плечах дорогих!

    Séparateur 3

    Ton modeste petit foulard bleu
    Tombait de tes épaules.
    Tu me disais que tu n'oublierais pas
    Nos rendez-vous affectueux et pleins de joie.

    Parfois la nuit venue
    Nous nous disions au revoir...
    Ces nuits n’existent plus.
    Où es-tu petit foulard,
    Si chéri, si désiré, tant aimé ?

    Je me souviens comment lors de cette soirée inoubliable,
    Ton foulard bleu tomba de tes épaules,
    Comment tu me promis de le garder auprès de toi
    Quand tu m’accompagnas à mon départ.

    Et même si tu es loin aujourd’hui,
    Ma bien-aimée, ma très chère,
    Je sais qu’avec amour,
    Auprès de toi,
    Tu gardes ce foulard tant aimé.

    En recevant tes lettres,
    j'entends ta voix aimée.
    Et entre tes lignes, je vois ton foulard bleu
    De nouveau devant mes yeux.

    Et souvent au combat
    Ton image m'accompagne.
    Je sens, que toute proche,
    Avec un regard amoureux,
    Tu es toujours près de moi.

    Combien de ces petits foulards chéris
    Nous gardons dans nos cœurs !
    Dans les combats, nous souvenant
    Des tendres mots dits tout contre l’épaule.

    Pour elles que nous aimons tant
    Que tant nous désirons,
    Le tirailleur mitraille,
    Pour défendre ce foulard bleu
    Qu’elles portent sur leurs chères épaules.

    La version initiale, écrite par Iakov Galitski (Яков Галицки) devint immédiatement populaire. Peu après, Mixhaï Maximov (Михай Максимов), alors soldat de 22 ans dans l’Armée rouge, adapta le texte pour lui donner un tour plus ‘martial’. Le texte ainsi modifié fut publié dans le journal de division de première ligne "Pour la patrie !", le 8 juin 1942. Il était signé du "Lieutenant M. Maximov".

    Voici cette version chantée, à l’époque, par Claudia Chouljenko (Клавдия Шульженко) – l’enregistrement gratte un peu...

    Petites nouvelles russes - Valse de guerre - Claudia Chouljenko

    Et les modifications et ajouts apportés au texte original...

    Помню, как в памятный вечер
    Падал платочек твой с плеч,
    Как провожала и обещала
    Синий платочек сберечь.

    И пусть со мной
    Нет сегодня любимой, родной,
    Знаю, с любовью ты к изголовью
    Прячешь платок дорогой.

    (…)

    Кончится время лихое,
    С радостной вестью приду,
    Снова дорогу,
    К милой порогу
    Я без ошибки найду...

    И вновь весной
    Под знакомой ветвистой сосной.
    Милые встречи,
    Нежные речи,
    Нам возвратятся с тобой.

    Séparateur 3

    Je me souviens comment lors de cette soirée inoubliable,
    Ton foulard bleu tomba de tes épaules,
    Comment tu me promis de le garder auprès de toi
    Quand tu m’accompagnas à mon départ.

    Et même si tu es loin aujourd’hui,
    Ma bien-aimée, ma très chère,
    Je sais qu’avec amour, auprès de toi,
    Tu gardes ce foulard tant aimé.

    (…)

    Les temps tourmentés finiront bien,
    Je reviendrai porteur de bonnes nouvelles,
    De nouveau la route,
    Et au bout le doux seuil
    Que je saurai retrouver sans me tromper...

    Et à nouveau au printemps
    Sous les branches d’un grand pin
    Les tendres rendez-vous,
    Les doux mots d’amour,
    Pour nous reviendront.

    Je passe ici sous silence les autres versions que l’on peut trouver. C’est incroyable comment les Russes ‘s’amusent’ à modifier les textes des chansons au gré des circonstances ! La rançon du succès, je suppose...

    Sources (en russe) :
    Histoire d’une chanson : Le petit foulard bleu ;
    Wikipédia 'Le petit foulard bleu' : Lire.

    Le 22 juin, à 4 heures précises - Interprète inconnu

    Le 22 juin, à 4 heures précises

    Двадцать второго июня, ровно в 4 часа


    Musique de Eji Petersbourgski (Ежи Петербургский) 1940

    Paroles Boris Kovyniev (Борис Ковынев) 1941

    'La guerre venait de commencer...'

    Двадцать второго июня,
    Ровно в четыре часа
    Киев бомбили, нам объявили
    Что началася война.

    Война началась на рассвете
    Чтоб больше народу убить.
    Спали родители, спали их дети
    Когда стали Киев бомбить.

    Врагов шли большие лавины,
    Их не было сил удержать,
    Как в земли вступили родной Украины
    То стали людей убивать.

    За землю родной Батькивщины
    Поднялся украинский народ.
    На бой уходили все - все мужчины,
    Сжигая свой дом и завод.

    Рвалися снаряды и мины,
    Танки гремели бронёй,
    Ястребы красны в небе кружили,
    Мчались на запад стрелой.

    Началася зимняя стужа
    Были враги близ Москвы,
    Пушки палили, мины рвалися
    Немцев терзая в куски.

    Кончился бой за столицу
    Бросились немцы бежать
    Бросили танки, бросили мины,
    Несколько тысяч солдат.

    Помните Гансы и Фрицы
    Скоро настанет тот час
    Мы вам начешем вшивый затылок,
    Будете помнить вы нас.

    Séparateur 3

    Le 22 juin,
    A quatre heures précises du matin,
    Kiev fut bombardée. Ils annoncèrent
    Que la guerre venait de commencer.

    La guerre commença à l'aube
    Pour que plus de gens soient tués.
    Les parents dormaient, leurs enfants dormaient
    Quand ils commencèrent à bombarder Kiev.

    Les ennemis arrivaient en grosses avalanches,
    Personne n'avait assez de force pour les arrêter,
    Alors qu’ils pénétraient sur la terre d’Ukraine ;
    Et là ils commencèrent leurs massacres.

    Le peuple ukrainien s'est levé pour protéger
    Sa patrie, sa Batkivschina¹ natale .
    Tous les hommes sont allés au combat,
    Brûlant leur maison et leur usine².

    Les obus et les mines explosaient,
    Les chars grondaient sous leur armure,
    Les faucons rouges³ tournoyaient dans le ciel,
    Se précipitant vers l'ouest comme des flèches.

    Un froid de canard s’abattit.
    Les ennemis étaient aux portes de Moscou,
    Les canons tiraient, les mines déchiquetaient
    Les Allemands, les mettant en pièces.

    La bataille pour la capitale prit fin.
    Les Allemands se précipitèrent dans la fuite,
    Abandonnant leurs chars, leurs mines
    Laissant derrière eux des milliers de soldats.

    Souvenez-vous - Hans et Fritz !
    L'heure viendra bientôt
    Quand nous traînerons vos têtes putrides :
    C’est ainsi que vous vous souviendrez de nous...

    1- Batkivschina : la terre natale, en ukrainien (Батькiвщина).
    2- ‘Politique de la terre brûlée’ que Napoléon a expérimenté en son temps (cf. L’incendie de Moscou par les Russes en 1812 face aux armées de Napoléon).
    3- Il est question ici des avions de chasse soviétiques (‘rouges’) par opposition aux avions allemands (‘noirs’).

    Une n-ième version… qui fut, en réalité, la première !

    Le compositeur de la partition musicale, Eji Petersbourgski (Ежи Петербургский), n’était pas ‘exactement’ russe, mais biélorusse. C’est donc à Minsk, en Biélorussie soviétique, qu’il écrivit la partition en 1940, et c’est aussi là qu’aux premiers jours de l’invasion allemande – l’opération Barbarossa – le poète Boris Kovynev (Борис Ковынев) rédigea les premières paroles sur cette valse.

    Elles relatent le premier jour de la guerre. Et bien que cette version soit considérée comme la toute première chanson de guerre durant le conflit qui opposa l’URSS à l’Allemagne nazie (‘la Grande guerre patriotique’ 1941-1945), elle demeura ‘laissée de côté’, comme oubliée : son texte fut jugé trop ‘populaire’, voire vulgaire. Son auteur, d’ailleurs, mourut dans la misère, sans jamais être reconnu de son vivant.

    "Quelle chanson horrible ! Terrible dans tous les sens du terme...", lit-on en commentaire sur le Net !

    Petites nouvelles russes - Valse de guerre - 22 juin
    22 juin - Jour de souvenir et de chagrin

    Une version 'pop-rock'...

    Voici enfin une dernière version, pop-rock, et donc bien plus récente, interprétée par Garik Soukatchiov (Гарик Сукачёв), à partir des vers de Boris Kovynev (Борис Ковынев)… Comme une ‘réhabilitation’ posthume de l’auteur des paroles originales, en quelque sorte !

    Interprétée par Garik Soukatchiov (Гарик Сукачёв) 2001

    Двадцать второго июня,
    Ровно в четыре часа,
    Киев бомбили, нам объявили,
    Что началася война.

    Кончилось мирное время,
    Нам распрощаться пора,
    Я уезжаю, но обещаю
    Верным вам быть навсегда.

    И ты смотри,
    С чувством моим не шути,
    Выйди, подруга, к поезду друга,
    Друга на фронт проводи.

    Дрогнут колеса вагона,
    Поезд помчится стрелой,
    Ты мне с перрона — я с эшелона
    Грустно помашешь рукой.

    Пройдут года,
    И снова я встречу тебя,
    Ты улыбнёшься,
    К сердцу прижмёшься,
    Вновь поцелуешь меня.

    Скромненький синий платочек,
    Падал с опущенных плеч.
    Ты провожала, но обещала
    Синий платочек сберечь.

    Séparateur 3

    C’est le 22 juin,
    A quatre heures précises du matin,
    Que Kiev fut bombardée. Ils annoncèrent
    Que la guerre venait de commencer.

    Le temps de la paix est terminé,
    C’est le moment de nous séparer.
    Je partirai, mais je promets
    De vous rester fidèle à jamais.

    Et toi, fais attention,
    Et ne plaisante pas avec mes sentiments,
    Ma belle, accompagne ton ami jusqu’au train !
    Accompagne cet ami qui va rejoindre le front.

    Les roues du wagon trembleront,
    Le train filera comme une flèche,
    Tu seras sur le quai et moi sur les marches
    On se fera tristement un signe de la main.

    Les années passeront,
    Et je te reverrai à nouveau.
    Tu souriras,
    Je te serrerai sur mon cœur
    Et à nouveau tu m’embrasseras.

    Ton modeste petit foulard bleu
    Tombait sur le bas de tes épaules.
    Quand tu m’a accompagné à mon départ
    Tu m’as promis de le garder près de toi.

    Petites nouvelles russes - Valse de guerre - le 22 juin 1941

    En 1992, sort le film éponyme 'Le 22 juin, à 4 heures précises' - Visionnez  le film sur Youbube - (Двадцать второго июня, ровно в 4 часа), réalisé par Boris Galkine (Борис Галкин). L'histoire d'un capitaine de l'Armée rouge, en permission, qui tente de rejoindre sa famille à Léningrad, et qui n'y arrivera que le 22 juin 1941, à exactement quatre heures du matin...

    Sources (en russe) :
    -  Histoire d'une chanson : Le 22 juin, à 4 heures précises ;
    Histoire d'un poète et de sa chanson (1) : Boris Kovynev 1 ;
    - Histoire d'un poète et de sa chanson (2) : Boris Kovynev 2

  • Valse de guerre – Ah, ces nuages dans l’azur

    Christina Orbakaïté (Кристина Орбакайте)

    Ah, ces nuages dans l’azur !

    Ах, эти тучи в голубом

    ­
    2004


    Paroles : Vassili Axionov, Piotr Siniavski - Musique : Alexandre Jourbine

    Слова: Василий Аксёнов, Пётр Синявский - Музыка: Александр Журбин

    Une valse musette, pleine encore de légèreté…

    Une valse-musette : quoi de plus romantique et léger à l'orée de la guerre pour se parler d’amour ?

    Снова весь фронт раскален от огня
    Лупят зенитки три ночи, три дня
    А в гимнастерке, на снимке
    Ты обнимаешь меня...

    Припев:

    Ах, эти тучи в голубом,
    Напоминают море,
    Напоминают старый дом
    Где кружат чайки, за окном
    Где мы с тобой, танцуем вальс
    Где мы с тобой, танцуем вальс
    Где мы с тобой, танцуем вальс
    В миноре

    Если останусь живым на войне
    Встречусь с тобой, я в родной стороне
    Только пока я воюю, -
    Ты не забудь обо мне...

    (Припев)

    Юнкер все кружит и небо в огне
    Думай родная всегда обо мне
    Из-поднебесья мне виден
    Милый твой профиль в окне...

    (Припев)

    Voici qu’à nouveau, sur tous les fronts, tonne le feu :
    Les batteries anti-aériennes ont résonné durant trois jours et trois nuits ;
    Et en habit militaire, sur la photo,
    Tu me serres dans tes bras...

    Refrain :

    Ah, ces nuages dans l’azur
    Me rappellent la mer,
    Me rappellent notre vieille maison
    Où les mouettes virevoltent devant la fenêtre,
    Là où ensemble nous dansions cette valse,
    Là où nous dansions cette valse,
    Cette valse en mineur¹.

    Si la guerre épargne ma vie
    Je te retrouverai du côté de chez nous.
    Seulement pendant que je combats,
    Ne m'oublie pas...

    (Refrain)

    Le Junker² virevolte et le ciel est en feu.
    Ma chérie pense toujours à moi :
    Depuis le ciel, de mon cockpit je puis voir
    Ta jolie silhouette à sa fenêtre...

    (Refrain)

    1. Il s’agit ici de la gamme mineure.
    2. Les ‘Junker’ étaient des avions allemands. Le ‘Junker 87 Stuka’, en particulier, fut un bombardier employé durant la Guerre d’Espagne et sur le Front de l’Est en 1942.

    Petites nouvelles russes - Valse de guerre - Московская сага
    'La saga de Moscou' (Московская сага) 2004

    Une valse en mineur...

    Voici une chanson plein de légèreté et d’insouciance… La guerre vient tout juste de débuter. Depuis trois jours seulement. Peut-être ne durera-t-elle pas longtemps ? Peut-être bientôt se retrouvera-t-on ? En Union soviétique, en ce début d'été 1941, peu pouvaient s’imaginer quels affres le pays, la population, son armée allaient bientôt endurer...

    La valse est extraite du télé-film "La saga de Moscou" ("Московская сага") réalisé en 2004 par Dimitri Barschevski (Дмитрий Барщевский). (Visionner). D’aucuns prétendent qu’il aurait existé une version de cette valse écrite en 1942, et que son compositeur, Alexandre Jourbine (Александр Журбин), aurait retrouvé la partition dans de vieilles archives… Ce que par la suite il démentira lui-même.

  • Valse de guerre – La valse d’avant-guerre

    Interprétée par Iossif Kobzone (Иосиф Кобзон)

    La valse d’avant-guerre

    Довоенный вальс

    ­
    (1984)


    Paroles de Félix Laoubé - Musique de Pavel Aédonitski

    Слова: Феликс Лаубе - Музыка: Павел Аедоницкий

    Demain, il y eut la guerre...

    Voici une valse 'heureuse', une 'valse-musette', qui évoque la période d'avant-guerre, le jour, la soirée d'avant le début de la Grande guerre patriotique, le 22 juin 1941 et l’offensive allemande. Sa musique rappelle, par sa légèreté, l'insouciance d'un début d'été, l'insouciance d'un temps qui ne tardera pas à être anéanti : se doutait-on que demain il y aurait la guerre, que demain il y eut la guerre...

    Мирное небо над крепостью Бреста,
    В тесной квартире счастливые лица.
    Вальс. Политрук приглашает невесту,
    Новенький кубик блестит на петлице.

    А за окном, за окном красота новолунья,
    Шепчутся с Бугом плакучие ивы.
    Год сорок первый, начало июня.
    Все ещё живы, все ещё живы,
    Все ещё живы, все, все, все.

    Смотрит на Невском с афиши Утёсов,
    В кинотеатрах идёт "Волга, Волга".
    Снова Кронштадт провожает матросов:
    Будет учебным поход их недолго.

    А за кормой, за кормой белой ночи раздумье,
    Кружатся чайки над Финским заливом.
    Год сорок первый, начало июня.
    Все ещё живы, все ещё живы,
    Все ещё живы, все, все, все.

    Мимо фасада Большого театра
    Мчатся на отдых, трезвоня, трамваи.
    В классах десятых экзамены завтра,
    Вечный огонь у Кремля не пылает.

    Всё впереди, всё пока, всё пока накануне…
    Двадцать рассветов осталось счастливых…
    Год сорок первый, начало июня.
    Все ещё живы, все ещё живы,
    Все ещё живы, все, все, все.

    Вальс довоенный напомнил о многом,
    Вальс воскресил дорогие нам лица,
    С кем нас свела фронтовая дорога,
    С кем навсегда нам пришлось разлучиться.

    Годы прошли и опять за окном тихий вечер.
    Смотрят с портретов друзья молчаливо.
    В памяти нашей сегодня и вечно
    Все они живы, все они живы,
    Все они живы, все, все, все!

    Le ciel est paisible sur la forteresse de Brest¹,
    Dans un appartement exigu, des visages heureux.
    Valse... L'instructeur politique invite sa fiancée,
    Un nouvel insigne² brille au revers de son col.

    Et à l'extérieur, par la fenêtre, rayonne la beauté de la nouvelle lune,
    Les saules pleureurs chuchotent sur les berges du Boug³.
    En ce début juin 1941...
    Tous sont encore vivants, tous, tous, tous.

    On voit sur la Perspective Nevsky les affiches d'Outiossov4.
    Dans les cinémas on joue "Volga, Volga"5.
    De nouveau, Kronstadt6 accueille les marins :
    Leur exercice en mer ne durera pas longtemps.

    Et derrière la poupe des navires le songe d’une nuit blanche,
    Des mouettes survolent le golfe de Finlande.
    En ce début juin 1941,
    Tous sont encore vivants, encore vivants,
    Tous sont encore vivants, tous, tous, tous.

    Passant devant la façade du Bolchoï on entend
    La sonnerie des tramways pressés de rentrer au dépôt.
    Demain, ce seront les examens des terminales,
    La flamme éternelle au pied du Kremlin ne brûle pas encore7.

    Demain, tout basculera, à présent c’est encore la veille...
    Vingt levers de soleil8 qui sont restés heureux...
    1941, début juin...
    Tous sont encore vivants, encore vivants,
    Tous sont encore vivants, tous, tous, tous.

    La valse d'avant-guerre nous rappelle tant de choses,
    Cette valse ressuscite les visages de ceux que nous aimions,
    De ceux que nous avons perdus pour toujours,
    De ceux que nous avons trouvés sur les chemins de guerre.

    Les années ont passé et derrière la fenêtre,
    A nouveau, une nouvelle soirée paisible.
    Les amis regardent silencieusement des photos.
    Dans notre mémoire, aujourd'hui et pour toujours,
    Ils sont tous vivants, encore vivants
    Ils sont tous vivants, tous, tous...
    Dans notre mémoire, aujourd'hui et pour toujours,
    IIls sont tous vivants, tous vivants
    Ils sont tous vivants, tous, tous !

    1- Il s'agit ici de la ville russe de Brest-Litovsk (en biélorusse : Брэст ; en russe : Брест), ville aujourd'hui située dans l'actuelle Biélorussie. Rattachée à la Pologne après la Première guerre mondiale, la ville tombe sous le giron de l'URSS en septembre 1939, à l'issue de l’invasion de la Pologne orientale par les troupes soviétiques, suite aux accords secrets du pacte germano-soviétique signant le démantèlement et le partage de la Pologne entre les deux puissances.

    Moins de deux ans plus tard, le 22 juin 1941, l'armée allemande attaque Brest (Litovsk) par surprise, le premier jour, durant les premières minutes de l'opération Barbarossa. La forteresse qui la gardait est détruite, les survivants forcés de se rendre au bout d'une semaine. Leur courage devint un symbole de la résistance soviétique.

    Petites nouvelles russes - Valse de guerre - Кубик2- Rivière qui traverse la ville de Brest (Litovsk).

    3- Le terme russe ici employé est 'Кубик' (le cube) qui désignait familièrement l'insigne de l'état-major et du commandement de l' Armée rouge entre 1935-1942. Insigne que les officiers portaient au revers de leur col et qui se présentait sous la forme d'un carré d'un centimètre de côté.

    4- Leonid Outiossov (Леонид Утёсов) - 1895-1982 -, célèbre artiste soviétique qui, entre autre, popularisa le jazz en URSS avant-guerre.

    Petites nouvelles russes - Valse de guerre - Волга-Волга

    5- 'Volga,Volga' (Волга-Волга) est un film soviétique de Grigori Aleksandrov, (Григорий Васильевич Александров) du genre comédie musicale, sorti sur les écrans au printemps 1938. C'était, dit-on, en cette période le film préféré de Staline. (Visionner la version colorisée en 2010).

    6- Importante base navale russe, située sur le golfe de Finlande à une cinquantaine de kilomètres de Saint-Pétersbourg, célèbre pour le soulèvement de ses marins en 1921, durant la guerre civile, et par sa répression par le pouvoir bolchevique sous les ordres de Léon Trotsky.

    7- Le mémorial de la tombe du soldat inconnu (Могила Неизвестного Солдата) où brûle cette flamme au pied du Kremlin ne sera inauguré qu'en 1967...

    8 - L'auteur parle sûrement ici des vingt levers de soleil en ce mois de juin 1941 qui précédèrent le début de la guerre.

    Voici une seconde version, sur des images du film ‘Espion’ (Шпион), - visionner -, réalisé en 2012 par Alexeï Andrianov (Алексей Андрианов). (nb. L’ordre des couplets du texte initial a été modifié).

    interprétée par Svetlana Sourganova (Светлана Сурганова)

    Petites nouvelles russes - Valse de guerre - Завтра была война

    ‘Demain il y eut la guerre’ (Завтра была война) - 1984

    En 1987 Youri Kara (Юрий Кара) réalise le film ‘Demain il y eut la guerre’ (Завтра была война), adapté de la nouvelle éponyme de Boris Vassiliev (Борис Васильев). Celle-ci, écrite en 1972, ne fut publiée qu’au début des années 80, quand la censure se fit, en Union soviétique, moins sévère. Telles des mémoires d'outre-tombe, l’intrigue raconte les souvenirs de l’auteur, alors âgé de 16 ans, et de ses camarades de classe, à la veille de la Grande guerre patriotique (1941-1945) et le sort que leur réserva la guerre - et, pour celles et ceux qui survécurent, ses lendemains...

    'Demain il y avait la guerre (Завтра была война) - 1987

  • Valse de guerre – La valse de la séparation

    Interprétée par Raïssa Néménova (Раиса Неменова)

    La valse de la séparation

    Вальс расставания

    ­
    (Vieille petite valse - Старый вальсок)

    ­
    1965


    Auteur : Constantin Vanchenki (Константин Ваншенки)

    Compositeur : Yann Frenkel (Ян Френкель)

    Comme un air de ‘vieille’ valse...

    Слышишь, тревожные дуют ветра?
    Нам расставаться настала пора.
    Кружится, кружится пёстрый лесок,
    Кружится, кружится старый вальсок,
    Старый, забытый,
    Старый, забытый вальсок.

    Ты, совершая положенный путь,
    В дальнем краю это всё не забудь —
    Эту реку и прибрежный песок,
    Этот негромко звучащий вальсок,
    Этот негромкий,
    Этот негромкий вальсок.

    Мы расстаёмся, чтоб встретиться вновь,
    Ведь остаётся навеки любовь.
    Кружится первый осенний листок,
    Кружится в памяти старый вальсок,
    Юности нашей,
    Юности нашей вальсок.

    Волосы ветром сдувает со лба.
    Музыка эта - как наша судьба.
    Снегом слегка обжигает висок,
    Кружится в сердце тот старый вальсок,
    В сердце тот старый,
    В сердце тот старый вальсок.

    Слышишь, тревожные дуют ветра?
    Нам расставаться настала пора.
    Кружится, кружится пёстрый лесок,
    Кружится, кружится старый вальсок,
    Старый, забытый,
    Старый, забытый вальсок.

    Entendez-vous le souffle inquiétant du vent ?
    Le moment est venu de nous séparer.
    La forêt danse et valse.
    La vieille valse tourne, tourne
    Ancienne, comme oubliée,
    Une vieille petite valse oubliée.

    Toi, sur la route déjà tracée,
    Vers quelque pays lointain, n'oublie pas tout cela :
    Cette rivière, le sable du rivage,
    Еt cette valse à la sonorité si douce,
    Cette douce,
    Cette douce petite valse.

    Nous nous séparons mais nous nous reverrons à nouveau,
    Puisque l'amour dure toujours.
    La première feuille d'automne tourbillonne,
    Et dans ma mémoire danse et tourne la vieille valse,
    La valse de notre jeunesse,

    ­
    Le vent soulève les cheveux.
    Cette musique est comme notre destin.
    Nos cheveux, comme la neige, blanchissent nos tempes.
    Cette vieille valse tourne dans mon cœur.
    Dans mon cœur, il y a cette ancienne,
    Cette vieille petite valse.

    Entendez-vous le souffle inquiétant du vent ?
    Le moment est venu de nous séparer.
    La forêt danse et valse.
    La vieille valse tourne, tourne
    Ancienne, comme oubliée,
    Une vieille petite valse oubliée.

    Par son apparente simplicité, cette ritournelle, qui sonne comme une valse ancienne, évoque les prochaines ruptures : celles d'un temps qui s’achève, quand bientôt les amoureux se sépareront...

    Cette valse n’est pas une ‘valse de guerre’ mais...

    Je me suis autorisé à l’intégrer ici, parmi de ‘véritables’ romances de guerre, car elle me semble parfaitement refléter, par sa musique et ses paroles, les sentiments que devaient ressentir les Russes/Soviétiques à la veille de la Grande guerre patriotique (1941-1945).

    Elle a été créée en 1965 pour le film ‘Femmes’ (Женщины) réalisé en 1966 par Pavel Lioubimov (Павел Любимов) qui raconte trois générations de femmes - ouvrières d'une usine de meubles -, leur amour, leurs joies, leurs peines. (Visionner).

    Voici l’extrait du film où la valse est originellement interprétée par Nina Sazonova (Нина Сазонова) et Piotr Lioubechkine (Пётр Любешкин)...

    Nina Sazonova (Нина Сазонова) et Piotr Lioubechkine (Пётр Любешкин) - 1966

  • Valse de guerre – La valse de Sébastopol

    La Valse de Sébastopol, Youri Bogatikov (Юрий Богатиков)

    La valse de Sébastopol

    Севастопольский вальс

    ­

    1955


    Paroles de Constantin Listov  - Musique de Géorgui Roubliov

    Автор: Константин Листов - Композитор: Георгий Рублёв

    Une valse d’opérette...

    Тихо плещет волна,
    Ярко светит луна;
    Мы вдоль берега моря идём
    И поём, и поём,
    И шумит над головой
    Сад осеннею листвой.

    Припев:

    Севастопольский вальс,
    Золотые деньки;
    Мне светили в пути не раз
    Ваших глаз огоньки.
    Севастопольский вальс
    Помнят все моряки.
    Разве можно забыть мне вас,
    Золотые деньки!

    На Малахов курган
    Опустился туман.
    В эту ночь вы на пристань пришли
    Проводить корабли.
    И с тех пор в краю любом
    Вспоминал я милый дом.

    Припев.

    Мы вернулись домой
    В Севастополь родной.
    Вновь, как прежде, каштаны в цвету,
    И опять я вас жду...
    Вдоль бульваров мы идём
    И, как в юности, поём.

    Припев.

    Une vague tranquillement vient lécher le rivage
    Au clair de lune ;
    Nous marchons le long du bord de mer
    Et nous chantons, nous chantons,
    Et аu-dessus de nos têtes bruisse
    le feuillage au jardin d'automne.

    Refrain :

    La valse de Sébastopol,
    Aux jours heureux ;
    Vos yeux flamboyants, plus d’une fois
    M’ont ébloui sur le chemin.
    Valse de Sébastopol,
    Celle dont tous les marins se souviennent.
    Comment pourrais-je vous oublier,
    O jours heureux !

    Le brouillard a recouvert
    Le tertre de Malakhov*
    Cette nuit, sur la jetée,
    Vous êtes passée saluer les bateaux en partance.
    Et depuis lors tous les coins du monde
    Me rappellent ma chère maison.

    Refrain.

    Nous sommes de retour à la maison
    A Sébastopol, notre ville si chère.
    A nouveau, comme avant, les châtaigniers sont en fleurs,
    Et à nouveau je vous attends...
    Le long des boulevards nous nous promenons
    Et, comme au temps de notre jeunesse, nous chantons.

    Refrain.

    * Le ‘Tertre Malakoff’ (Малахов курган) est l’endroit le plus élevé de Sébastopol qui offre un point de vue sur l’ensemble de la baie. Cette hauteur fut, lors de la Guerre de Crimée (1854—1855), face aux troupes franco-anglaises et ottomanes, et durant la Seconde guerre mondiale face à l’agresseur nazi, une place stratégique de défense de la ville. C’est aujourd’hui à la fois un lieu de promenade et de mémoire. Lire en russe : Le Tertre Malakoff.

    Quelques mots sur cette valse...

    Bien que composée bien après les vieilles valses de la fin du XIX°- début du XX°, cette valse a quelque chose de suranné.

    La Valse de Sébastopol fut écrite en 1955 par le compositeur Constantin Listov (Константин Листов) et le poète Auteur Géorgui Roubliov (Георгий Рублёв). Elle fut créée et chantée dans cette ville de Crimée, port de la Flotte soviétique/russe en mer Noire pour le 10e anniversaire du Jour de la Victoire de la Seconde guerre mondiale et le centenaire de la Première Défense de Sébastopol face aux armées coalisées franco-anglaises et ottomanes.

    En 1961, Konstantin Listov créa l'opérette du même nom, dont le leitmotiv sera la mélodie de cette valse.

    La chanson est devenue populaire et certains la célèbrent parfois comme l'hymne officieux de Crimée. En ces temps troublés dans cette partie de l’Europe, l’écho de cette valse d’opérette résonne-t-elle comme une valse d’après-guerre ? ou, comme une prémonition, d’avant-guerre ?