M. Zochtchenko – La femme qui… (04)

Petites-nouvelles-russes : Une mégère
Une mégère cupide, dessin de Deligne

La femme qui n’autorisa pas son mari à mourir
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Рассказ́ о том, как жена́ не разреши́ла му́жу умере́ть
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Episode quatre - Четвёртый эпизод

К но́чи Ива́н Са́ввич верну́лся домо́й. Пришёл он распа́ренный и в снегу́. Пришёл и лёг на ко́йку.А в рука́х у него́ бы́ли де́ньги.

Хоте́ла Мо́тя подсчита́ть – не дал.

– Не тронь, – говори́т, – пога́ными рука́ми. Ма́ло ещё.

На друго́й день Ива́н Са́ввич опя́ть встал. Опя́ть кряхте́л, оде́лся и, распя́лив ру́ки, вы́шел на у́лицу.

К но́чи верну́лся, и опя́ть с деньга́ми. Подсчита́л вы́ручку и лёг.

На тре́тий день то́же. А там и пошло́, и пошло́ – встал челове́к на́ ноги. И по́сле, коне́чно, бро́сил собира́ть на у́лице. Тем бо́лее что, попра́вившись, он уже́ не и́мел тако́го печа́льного ви́да и прохо́жие са́ми переста́ли ему́ дава́ть.

А когда́ переста́ли дава́ть, он сно́ва присту́пил к свое́й профе́ссии.

Так он и не по́мер. Так Матрёна и не дала́ ему́ помере́ть.

Вот что сде́лала Матрёна с Ива́н Са́ввичем.

Коне́чно, како́й-нибу́дь райо́нный лейб-ме́дик, прочита́в э́тот расска́з, усмехнётся. Ска́жет, что нау́ке неизве́стны таки́е фа́кты и что Матрёна ни при чём тут. Но, мо́жет, нау́ке и то́чно неизве́стны таки́е фа́кты, одна́ко Ива́н Са́ввич и посейча́с жив. И да́же на днях он зако́нчил каку́ю-то художе́ственную вы́веску для мясно́й торго́вли.

А впро́чем, слу́чай э́тот мо́жно объясни́ть и медици́нски, нау́чно. Мо́жет, Ива́н Са́ввич, вы́йдя на у́лицу, сли́шком распа́рился от волне́ния, перепре́л, и с по́том вы́шла у него́ боле́знь нару́жу.

Впро́чем, неизве́стно.

В о́бщем, жа́дная бабёнка, люби́тельница де́нег, сохрани́ла благодаря́ свое́й жа́дности драгоце́нную жизнь своему́ супру́гу. Что явля́ется, коне́чно, весьма́ ре́дким слу́чаем. А ча́ще всего́ быва́ет наоборо́т.

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Quand vient la nuit, Ivan Savvitch rentre chez lui, couvert de neige et cuit à l’étuvée. Et à peine rentré, il se couche.

Mais dans les mains, il tient son pognon. Sa moitié Motia voudrait compter combien, mais c’est hors de question : - N’y touche pas, et ôte tes sales pattes. Le compte n’y est pas encore, lui dit-il.

Le matin suivant, Ivan Savvitch de nouveau se lève. Encore une fois, gémissant et tremblant, il s’habille et, les mains déjà prêtes à mendier, quitte la maison.

A la nuit tombée il revient, et avec encore plus de pièces. Il compte combien et se couche.

Et le troisième jour pareil, et ainsi de suite. Et jour après jour, le bonhomme sent qu’il se rétablit.

Et puis, bien sûr, enfin, il cessa de mendier. D’autant plus que s’étant refait une santé il n'avait plus la mine assez défaite, et les passants eux-mêmes cessèrent de lui faire l’aumône.

Et quand les aumônes cessèrent, Ivan Savvitch reprit son ancien métier.

Ainsi ne mourut-il pas. Ainsi Matriona, son épouse, ne lui avait pas permis de mourir. Voici ce que fit cette femme pour son cher Ivan.

Bien sûr, n’importe quel obscur médecin de quartier ayant exercé à la capitale¹, lisant cette histoire, en sourirait. Il dirait que de tels cas sont inconnus de la science et que Matriona n'avait rien à voir à tout ça. Peut-être, mais même si de tels cas sont effectivement ignorés de la science, le fait est qu’Ivan Savvitch est toujours bien en vie aujourd’hui. Et même, il y a peu, a-t-il terminé de peindre l’enseigne d’une devanture de boucherie.

Mais, soit dit en passant, cette affaire peut tout aussi bien s'expliquer par la médecine, scientifiquement. Peut-être, Ivan Savvitch, en dehors, avait-il sué sang et eau et ainsi évacué sa crève par tous les pores de sa peau ?

Cependant, cela personne ne le sait.

En définitive, une mégère cupide, amoureuse de l'argent, par le fait même de sa cupidité a préservé la précieuse vie de son époux. Ce qui, bien sûr, est un cas très rare. Car le plus souvent, c’est le contraire qui se passe.

1- Ici l’auteur emploie avec ironie le terme Leïb-médik (лейб-медик), un titre honorifique décerné à l’époque impériale à un médecin attaché aux personnes de la cour. Pour en savoir plus (en russe) : La médecine à la cour impériale.

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