M. Zochtchenko – Les bains

petites-nouvelles-russes : Les bains 2
Les bains - Баня (illustrateur inconnu)

Mikhaïl Zochtchenko - Михаил Зощенко
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Les bains - Баня

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(1924)
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Traduction : Michel Davidenkoff
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in 'Contes De La Vie De Tous Les Jours', Noir sur blanc, 1987

Говорят, граждане, в Америке бани очень отличные.

Туда, например, гражданин придет, скинет белье в особый ящик и пойдет себе мыться. Беспокоиться даже не будет мол, кража или пропажа, номерка даже не возьмет.

Ну, может, иной беспокойный американец и скажет банщику:

Гут бай, дескать, присмотри.

Только и всего.

Помоется этот американец, назад придет, а ему чистое белье подают стиранное и глаженное. Портянки, небось, белее снега. Подштанники зашиты, залатаны. Житьишько!

А у нас бани тоже ничего. Но хуже. Хотя тоже мыться можно.

У нас только с номерками беда. Прошлую субботу я пошел в баню (не ехать же, думаю, в Америку), дают два номерка. Один за белье, другой за пальто с шапкой.

А голому человеку куда номерки деть? Прямо сказать, некуда. Карманов нету. Кругом живот да ноги. Грех один с номерками. К бороде не привяжешь.

Ну привязал я к ногам по номерку, чтоб не враз потерять. Вошел в баню.

Номерки теперича по ногам хлопают. Ходить скучно. А ходить надо. Потому шайку надо. Без шайки какое же мытье? Грех один.

Ищу шайку. Гляжу, один гражданин в трех шайках моется. В одной стоит, в другой башку мылит, а третью шайку левой рукой придерживает, чтоб не сперли.

Потянул я третью шайку, хотел, между прочим, ее себе взять, а гражданин не выпущает.

Ты что ж это, говорит, чужие шайки воруешь? Как ляпну, говорит, тебя шайкой между глаз не зарадуешься.

Я говорю:

Не царский, говорю, режим шайками ляпать. Эгоизм, говорю, какой. Надо же, говорю, и другим помыться. Не в театре, говорю.

А он задом повернулся и моется.

Не стоять же, думаю, над его душой. Теперича, думаю, он нарочно три дня будет мыться.

Пошел дальше.

Через час гляжу, какой-то дядя зазевался, выпустил из рук шайку. За мылом нагнулся или замечтался не знаю. А только тую шайку я взял себе.

Теперича и шайка есть, а сесть негде. А стоя мыться какое же мытье? Грех один.

Хорошо. Стою стоя, держу шайку в руке, моюсь.

А кругом-то, батюшки-светы, стирка самосильно идет. Один штаны моет, другой подштанники трет, третий еще что-то крутит. Только, скажем, вымылся опять грязный. Брызжут, дьяволы. И шум такой стоит от стирки мыться неохота. Не слышишь, куда мыло трешь. Грех один.

Ну их, думаю, в болото. Дома домоюсь.

Иду в предбанник. Выдают на номер белье. Гляжу все мое, штаны не мои.

Граждане, говорю. На моих тут дырка была. А на этих эвон где.

А банщик говорит:

Мы, говорит, за дырками не приставлены. Не в театре, говорит.

Хорошо. Надеваю эти штаны, иду за пальтом. Пальто не выдают номерок требуют. А номерок на ноге забытый. Раздеваться надо. Снял штаны, ищу номерок нету номерка. Веревка тут, на ноге, а бумажки нет. Смылась бумажка.

Подаю банщику веревку не хочет.

По веревке, говорит, не выдаю. Это, говорит, каждый гражданин настрижет веревок польт не напасешься. Обожди, говорит, когда публика разойдется выдам, какое останется.

Я говорю:

Братишечка, а вдруг да дрянь останется? Не в театре же, говорю. Выдай, говорю, по приметам. Один, говорю, карман рваный, другого нету. Что касаемо пуговиц, то, говорю, верхняя есть, нижних же не предвидится.

Все-таки выдал. И веревки не взял.

Оделся я, вышел на улицу. Вдруг вспомнил: мыло забыл.

Вернулся снова. В пальто не впущают.

Раздевайтесь, говорят.

Я говорю:

Я, граждане, не могу в третий раз раздеваться. Не в театре, говорю. Выдайте тогда хоть стоимость мыла.

Не дают.

Не дают не надо. Пошел без мыла. Конечно, читатель может полюбопытствовать: какая, дескать, это баня? Где она? Адрес?

Какая баня? Обыкновенная. Которая в гривенник.

Petites nouvelles russes - Les bains
Les bains - Баня (illustrateur inconnu)

On dit, citoyens, qu'en Amérique les bains sont excellents.

Par exemple, un citoyen y arrive, jette son linge dans un casier spécial et part se laver tranquillement. Il ne s'inquiète guère à propos d'un vol ou d'une perte éventuelle, il ne prendra même pas de numéro.

Enfin, il se peut parfois qu'un Américain angoissé dise au garçon de bains : - Good bye, quoi, gardez un œil !

Voilà tout. Rien d'autre.

Cet Américain va se laver, revient, et on lui présente son linge propre : lavé et repassé. Les chaussettes, quoi, sont plus blanches que neige. Les slips ont été recousus, reprisés. La belle vie !

Ma foi. Chez nous les bains sont pas mal non plus. Juste pires. Malgré tout, on peut même s'y laver.

Mais les numéros, c'est tout bonnement la catastrophe. Samedi dernier je suis allé aux bains (je ne vais quand même pas aller jusqu'en Amérique). On me donne deux numéros. Le premier pour le linge, le deuxième pour mon manteau et le chapeau.

Or, où voulez-vous qu'un homme nu fourre ces numéros ? je répondrai carrément : nulle part.

Pas de poches. Autour — le ventre et les jambes. C'est une catastrophe, ces numéros. On va quand même pas les attacher à la barbe.

Bon, j'ai attaché un numéro à chaque jambe, pour ne pas les perdre en une seule fois. J'entre dans les bains.

Ça y est, les numéros claquent contre les jambes. La marche m'ennuie. Mais on doit marcher. Puisqu'il faut une cuvette. Sans cuvette, comment se laver ? Catastrophe !

Je cherche une cuvette. J'observe et je vois un citoyen qui se lave avec trois cuvettes. Il se tient dans la première, il savonne sa tête dans la deuxième, et la troisième, il s'y cramponne de sa main gauche, pour qu'on la lui fauche pas.

Je tire sur la cuvette, je veux d'ailleurs l'attraper, mais le citoyen s'y cramponne : - C'est quoi, ça, dit-il, tu voles les cuvettes des autres ? Quand je t'aurai balancé la cuvette entre les yeux, dit-il, tu ne seras pas heureux !

Je dis : - On n'est pas sous le régime tsariste, on ne balance pas des cuvettes. Quel égoïsme ! dis-je. Les autres ont aussi besoin de se laver, dis-je. On n'est pas au théâtre, dis-je. Mais il me tourne son derrière et continue. Enfin, pensé-je, je ne vais quand même pas l'emmerder éternellement ! Maintenant, pensé-je, il va mettre exprès trois jours pour se laver.

Je vais plus loin.

Une heure plus tard, un des types a un moment d'absence, il lâche sa cuvette. Il s'est peut-être penché pour repêcher son savon ou bien il baye aux corneilles — je n'en sais rien. Mais cette cuvette-là, je la prends pour moi.

Maintenant, j'ai une cuvette, mais où s'asseoir ? Se laver debout — quelle toilette ça serait ! Quelle calamité !

Bon. Je me tiens debout sur mes jambes, je tiens la cuvette avec ma main, je me lave.

Or, tout autour, bon Dieu, on dirait que ça lessive tout seul. Un qui lave ses pantalons, un autre frotte son slip, un troisième essore quelque chose. Bon. A peine on s'est lavé qu’on est de nouveau sale. Ils vous aspergent les salauds. Et leur blanchissage fait tant de bruit qu'on n'a pas envie de se laver. On n'entend pas où on frotte avec le savon. Quelle calamité !

Qu’ils se noient dans leur purin ! dis-je. Je vais finir chez moi.

Je me rends au vestiaire. On me donne mon linge en échange du numéro. Je regarde - tout est à moi, le pantalon n'est pas à moi.

- Citoyens, dis je. Sur le mien le trou était ici, sur celui-ci il est là-bas !

Le garçon me dit : - Nous ne sommes pas, dit-il, des préposés aux trous. On 'n’est pas au théâtre !

Bon. Je mets le pantalon, je vais chercher le manteau. On ne me rend pas le manteau. Ils veulent le numéro.

Et ce numéro je l'ai oublié sur la jambe. Faut se déshabiller. J’enlève mon pantalon, je cherche le numéro - y en a pas. La ficelle est là, sur les jambes, mais le papier est absent. Le papier s'est tiré.

Je donne la ficelle au garçon. Il n'en veut pas.

Il dit : - Je ne rends rien sur la foi d'une ficelle. Sinon, dit-il, tout le monde pourrait présenter des bouts de ficelles découpées, il n'y aurait pas assez de manteaux. Tu attends que le public se disperse, et je te donne celui qui reste.

Je dis : - Mon petit pote chéri, et s'il n'en reste aucun ? On n'est pas au théâtre, dis-je. Je te le décris, et tu me le rends. Une poche, dis je, est déchirée, l'autre n'existe pas. En ce qui touche les boutons, celui du haut y est, ceux du bas ne sont pas prévus.

Il me l'a quand même rendu. Et il n'a même pas repris la ficelle.

Je m'habille, je sors. Tout à coup ça me revient : j'ai oublié le savon.

Je retourne de nouveau. On ne me laisse pas entrer en manteau.

- Déshabillez-vous ! Disent-ils.

Je dis : - Citoyens, je ne veux pas me déshabiller pour la troisième fois. On n'est pas au théâtre, quand même ! Rendez-moi au moins le prix du savon.

Non.

Bon, si c'est non, tant pis.

Je suis parti sans savon.

Evidemment, le lecteur pourrait éprouver une pointe de curiosité : c'était quels bains ? Où sont-ils ? Quelle adresse ?

Quels bains ? Des bains ordinaires. Ceux à dix kopecks.

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