• M. Zochtchenko – De drôles de projets (5)

    Dans la mesure du possible - Посильная помощь

    Mikhaïl Zochtchenko - Михаил Зощенко
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    Illustrations : Nikolaï Radlov - Иллюстрации: Николай Радлов
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    (1928)
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    Traduction : Anne Puyou
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    in '30 projets pour le peuple', Ginkgo-éditeur, 2019
    Petites nouvelles russes - Etoile rouge
    Petites nouvelles russes - Etoile rouge
    Petites nouvelles russes : Cathédrale St Isaac
    La cathédrale Saint Isaac à Saint-Pétersbourg Illustration : N. Radlov (Н. Радлов)

    Dans la mesure du possible - Посильная помощь

    Рушится памятник старины! Оседает гениальный Исаакиевский собор. Оказывается почва Ленинграда не приспособлена под такие монументальные сооружения. Чего смотрели цари с высоты своих тронов?

    Уже во многих местах фундамент дал трещины, ступеньки покривились, колонны не выдерживают тяжести, уборные не действуют. Одним словом, гибнет великое творение Айвазовского!

    Пока комиссии будут подсчитывать сметы капитального ремонта — предлагаем, во избежание катастрофы, принять временные меры.

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    Un monument historique est en train de s'effondrer ! La géniale cathédrale Saint Isaac s'affaisse. Il semblerait que le sol de Leningrad ne soit pas adapté à de telles constructions monumentales. À quoi pensaient les tsars du haut de leurs trônes ?

    En de nombreux endroits déjà les fondations sont lézardées, les marches sont de travers, les colonnes ne supportent pas le poids du monument et les toilettes ne fonctionnent pas. En un mot, l’œuvre grandiose d'Aïvazovski est en train de dépérir !

    En attendant que la Commission examine les devis en vue d'une restauration complète, nous proposons, afin d'éviter la catastrophe, de prendre des mesures temporaires.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    L'arrosoir mécanique - Дождевальщик

    Petites nouvelles russes : L'arrosoir mécanique
    L'arrosoir mécanique. Illustration : N. Radlov (Н. Радлов)
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    Засуха в южных губерниях заставляет нас снова и снова подумать об искусственном дождевании. Здесь нами почти разрешена задача. В очень засушливых местностях, где дождя почти не бывает, наш аппарат пригоден для каких-нибудь иных целей — картошку можно держать в воронке или квас в лейке. В более же сырых пунктах наш аппарат является незаменимым механическим дождевальщиком.

    ***

    La sécheresse dans les régions méridionales nous oblige encore et encore à réfléchir à la question de l'arrosage artificiel. Ici nous avons presque solutionné le problème.

    Dans les zones très arides, où il ne pleut presque pas, notre appareil s'adapte à toutes sortes d'occasions - on peut stocker des pommes de terre dans l'entonnoir ou du kvas dans l'arrosoir. Dans les zones plus humides, notre appareil sera un arrosoir mécanique indispensable.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    Le dispositif à crochet-panière anti-tramway

    Антитрамвайный аппарат «Корзино-крюк»

    Petites nouvelles russes : Le crochet du tramway
    Le crochet anti-tramway. Illustration : N. Radlov (Н. Радлов)

    Le contrôleur tenant en main le carnet d'amendes » (Надпись: «Штраф»)

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    Число трамвайных жертв с каждым днем увеличивается. В срочном порядке мы уделяем внимание этому гражданскому вопросу. Любовь к человечеству толкает нас на этот рискованный шаг.

    Конструкция нашего аппарата проста и гениальна. Расход окупается усиленным штрафом, которым можно облагать зазевавшихся граждан.

    ***

    Le nombre des victimes du tramway augmente chaque jour. Nous consacrons d'urgence notre attention à cette question civique. Nous sommes poussés à franchir ce pas risqué par amour de l'humanité.

    L'installation de notre dispositif est d'une simplicité géniale. Les dépenses occasionnées sont couvertes par la hausse du tarif des contraventions susceptibles d'être dressées à l'encontre de ces citoyens qui bayent aux corneilles.

  • M. Zochtchenko – De drôles de projets (4)

    La pompe 'Diabolo' et autres projets
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    Mikhaïl Zochtchenko - Михаил Зощенко
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    Illustrations : Nikolaï Radlov - Иллюстрации: Николай Радлов
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    (1928)
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    Traduction : Anne Puyou
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    in '30 projets pour le peuple', Ginkgo-éditeur, 2019
    Petites nouvelles russes - Etoile rouge
    Petites nouvelles russes - La pompe 'Diabolo'
    La pompe 'Diabolo'. Illustration : N. Radlov (Н. Радлов)

    La pompe "Diabolo" - Насос «Дьяболо»

    Многие жители страдают от наводнений. Вода безжалостно заливает ихние скромные жилища. Рыбы резвятся под столом и под кроватью. Скучно и неуютно жить в такой дохлой, сырой обстановке. А, между тем, насосов нету, а если они и есть, то купить их невозможно, по причине ужасной дороговизны.

    Вот проект, как легко и просто можно обезвредить слепую стихию.

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    Nombreux sont les habitants qui subissent des inondations. L'eau envahit impitoyablement leurs modestes demeures. Les poissons vont folâtrant sous la table et le lit. Vivre dans un tel environnement, moisi et humide, est déprimant et inconfortable. Par ailleurs, on ne trouve pas de pompe, et même quand on en trouve, elles sont inabordables en raison de la hausse épouvantable de leur coût.

    Voici un projet démontrant à quel point il est simple et aisé de dominer les éléments aveugles.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge
    Petites nouvelles russes - Calamité du chien
    L'imperméable 'Calamité du chien'. Illustration : N. Radlov (Н. Радлов)

    L'imperméable "Calamité du chien" - Плащ «Собачье горе»

    Население встревожено эпидемией бешенства собак. Эти животные нападают среди дня на лучших представителей человечества и кусают их за разные нужные места.

    Предлагаем вниманию граждан небольшой проектик защитного плаща. Можно устроить из столового сервиза.

    Наилучшее средство из всех, введенных до сих пор.

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    Une épidémie de rage canine alarme la population. Ces animaux s'en prennent en plein jour aux fleurons de l'humanité et les mordent en différents endroits indispensables.

    Nous soumettons à l'attention des citoyens un petit projet d'imperméable défensif. Il peut être monté avec un service de table.

    C'est le meilleur moyen parmi ceux employés jusqu'à maintenant.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    L'appareil "Fils de garce" - Аппарат «Сукин сын»

    Petites nouvelles russes - Fils de garce
    Appareil 'Fils de garce'. Illustration : N. Radlov (Н. Радлов)

    Предыдущий проект доступен не всем гражданам. Многие холостые люди не имеют для этой цели достаточного количества ножей и других семейных мелочей.

    Таким холостякам достаточно иметь наш аппарат, и ихняя драгоценная жизнь — спасена.

    Наш аппарат немедленно делает вспрыскивание на ходу. Не надо ездить в Пастеровский институт и тратить на трамвай 7 копеек.

    Временно наш аппарат назван «Сукин сын».

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    Le projet précédent n'est pas à la portée de tous les citoyens. Nombreux sont les célibataires qui ne possèdent pas, en vue de cette utilisation, suffisamment de couteaux et autres menus ustensiles à usage domestique.

    Pour ces célibataires, il leur suffit de posséder notre appareil pour que leur précieuse vie soit sauvée.

    Dès que nous marchons, notre appareil projette immédiatement des aspersions. inutile de se rendre à l'Institut Pasteur et de dépenser 7 kopecks pour le trajet.

    A titre provisoire, notre appareil s'appellera "Fils de garce".

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge
  • M. Zochtchenko – De drôles de projets (3)

    A l’attention des malades et des autres...­­­
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    Mikhaïl Zochtchenko - Михаил Зощенко
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    Illustrations : Nikolaï Radlov - Иллюстрации: Николай Радлов
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    (1928)
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    Traduction : Anne Puyou
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    in '30 projets pour le peuple', Ginkgo-éditeur, 2019
    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    A l’attention des malades - Вниманию больных

    Petites nouvelles russes - Pipette
    Le nez en guise de pipette. Illustration : N. Radlov (Н. Радлов)

    Пузырьки в аптеках попрежнему выпущаются без капельниц. Нечем капать! Ядовитые лекарства приходится глотать без счету, в ущерб народному здоровью. И это на 7-й год нэпа!

    Нами решена сложная проблема — как обойтись без капельницы. Люди, у которых почему-либо сохранился нос, вполне обеспечены правильным счетом.

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    Comme par le passé, on continue de vendre en pharmacie des flacons sans pipette. Rien pour compter les gouttes ! Le peuple est obligé d'avaler des médicaments dangereux sans pipette, au mépris de sa santé.
    Alors qu'on entre déjà dans la 7e année de la NEP !

    Nous avons résolu ce problème complexe - comment se passer d'une pipette. Les gens qui, pour une raison quelconque, ont conservé leur nez seront assurés du décompte exact des gouttes.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge
    Le train "Maxime Maximytch". Illustration : N. Radlov (Н. Радлов)

    Sur l'écriteau : 'Le conducteur' (Надпись: «Проводник»)

    Le train "Maxime Maximytch" - Поезд «Максим Максимыч»

    Пора на 100 % использовать силу пассажиров. Многие пассажиры, садясь в поезд, нагло разваливаются на диванах и на скамейках и праздно едут до места назначения, несмотря на острую дороговизну топлива.

    Здесь мы даем продольный разрез нашего проекта. Наглядно видна актуальная работа пассажиров, как мягкого, так и жесткого вагонов.

    Громадная экономия топлива! Полное отсутствие копоти и дыма!

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    Il est temps d'exploiter à 100% la force motrice des passagers. En montant dans le train, ils sont nombreux à s'affaler sans vergogne sur les couchettes et les banquettes et à se laisser conduire oisivement jusqu'au lieu de destination, en dépit de la hausse sensible du prix du combustible.

    Nous proposons ici une coupe longitudinale de notre projet. On peut y distinguer, de façon claire, le travail effectué par les passagers, tant des premières que des secondes classes.

    Quelle phénoménale économie de combustible ! Et avec ça, une absence totale de suie et de fumée !

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    Le cottage-capsule - Ядро-коттэдж

    Petites nouvelles russes - La capsule-cottage
    La capsule-cottage. Illustration : N. Radlov (Н. Радлов)

    Сколько шуму, сколько разговору было насчет полета на луну! Американский профессор кислых щей Годард построил даже специальное ядро для полета на вышеуказанную планету. Однако, в последний момент профессор пошел на попятный. Отказался. «Летите, говорит, сами, а мне и тут хорошо».

    Таким образом, ядро осталось неиспользованным.

    Пущай Откомхоз обратит на него свое благосклонное внимание. Ядро вполне можно приспособить под небольшие квартирки теперешней формации.

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    Que de bruit, que de débats suscités par le vol sur la lune ! Le professeur américain, spécialiste en poudres de perlimpinpin Goddard, a même construit une capsule spéciale pour voler vers la planète susmentionnée. cependant, au dernier moment, le professeur a freiné des quatre fers. il a refusé. "Allez-y vous-même", il a dit, "moi je suis bien ici."

    La capsule est donc restée inutilisée.

    Que la Secamco* jette sur elle un regard bienveillant. on peut très bien aménager cette capsule en petits studios de dimensions modernes.

    *  Secamco : Section d'Aménagement Communal.
    Petites nouvelles russes - Etoile rouge
  • M. Zochtchenko – De drôles de projets (2)

    La cornichomobile et autres inventions
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    Mikhaïl Zochtchenko - Михаил Зощенко
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    Illustrations : Nikolaï Radlov - Иллюстрации: Николай Радлов
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    (1928)
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    Traduction : Anne Puyou
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    in '30 projets pour le peuple', Ginkgo-éditeur, 2019
    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    La cornichomobile - Карнизомобиль

    Petites nouvelles russes - La cornichomobile
    La cornichomobile (Карнизомобиль), N. Radlov (Н. Радлов)

    Légende : « Il n’y a aucun progrès. Les corniches dégringolent ! » (Надпись: «Хода нет. Карнизы валятся!»)

    Наша машина проста и оригинальна. Вы видите перед собой легкий, изящный экипаж на одну персону.

    Для движения экипажа нами использованы естественные силы природы — падение карниза или части его.

    Быстрота движения в некоторых районах может быть доведена до 100 километров в час и больше.

    Годен только для городского движения.

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    Notre engin est simple et original. Vous avez devant vous une voiture à une place, légère, élégante.

    Pour la motricité de la voiture nous utilisons les forces naturelles dont nous disposons - la chute d'une corniche ou des morceaux qui s'en détachent.

    Dans certains quartiers, la vitesse peut atteindre 100 kilomètres heure et plus.

    Ce moyen de locomotion n'est praticable qu'en ville.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge
    Petites nouvelles russes - Des toilettes aériennes
    Des toilettes aériennes, illustration : N. Radlov (Н. Радлов)

    Légende « Pour hommes », « Pour femmes » (Надписи: «Для мужчин», «Для женщин»)

    Des toilettes aériennes - Воздушная уборная

    Победоносное шествие культуры не дает спокойно спать Откомхозу. В ближайшее время Откомхоз предполагает построить подземную уборную на площади Восстания. Так пишут газеты об этом смелом культурном начинании.

    Однако, мы предполагаем, что подземная уборная вскочит Откомхозу в копеечку. Не лучше ли построить подвесную уборную? Это дешевле и красивее. И не надо рыть землю.

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    La marche conquérante de la culture empêche la Secamco* de dormir sur ses deux oreilles. Très prochainement, sur proposition de la Secamco, il est prévu de construire des toilettes souterraines sous la Place de l'Insurrection. C'est ainsi que les journaux rendent compte de cette initiative culturelle audacieuse.

    Cependant, nous estimons que des toilettes souterraines vont revenir très cher à la Secamco. Ne serait-il pas préférable de construire des toilettes suspendues ?

    C'est moins coûteux et plus joli. Et il ne sera pas nécessaire de creuser le sol.

    *Secamco : Section d'Aménagement Communal.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    Le portemanteau "Prima" - Вешалка «Прима»

    Petites nouvelles russes : Le portemanteau Prima
    Le portemanteau "Prima" illustration : N. Radlov (Н. Радлов)

    Купальный сезон имеет свои недочеты. Купающиеся граждане почему-то крайне неохотно оставляют свое барахло на берегу реки. Многие граждане отказываются даже в силу этого от здорового развлечения.

    Нами изобретена небольшая вешалка «Прима», дозволяющая гражданам не пугаться за свое движимое имущество.

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    La saison des bains a ses inconvénients. Pour une raison ou une autre, les citoyens qui se baignent répugnent à laisser leur saint-frusquin au bord de la rivière.

    Et à cause de cela, nombreux sont-ils à se priver d'une distraction hygiénique.

    Nous avons inventé un petit portemanteau "Prima" qui permet aux citoyens de ne pas s'en faire pour leurs biens.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge
  • M. Zochtchenko – De drôles de projets

    Petites nouvelles russes - 30 Projets pour le peuple
    "30 Projets pour le peuple", traduits par Anne Puyou

    Mikhaïl Zochtchenko - Михаил Зощенко
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    De drôles de projets­ - Весёлые прое́кты

    (Три́дцать счастли́вых иде́й

    (1928)
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    Illustrations : Nikolaï Radlov - Иллюстрации: Николай Радлов

    Extraits de "30 projets pour le peuple"

    Traduction : Anne Puyou
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    (2019)

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    Paru aux éditions Gingko : www.gingko-editeur.fr.

    Introduction

    "RUSSIE, 1928 : la NEP « Nouvelle politique économique » mise en œuvre par Lénine au printemps 1921 a déjà sept ans. Mais Mikhaïl Zochtchenko s’étrangle d’indignation : sept années de commerce intérieur libre et impossible, même, de trouver une simple pipette à compter les gouttes !

    "Devant un tel bilan, l’écrivain met alors tout son sens de la satire et toute son inventivité au service de la collectivité pour « améliorer » la vie quotidienne de ses concitoyens. Avec ces propositions d’inventions absurdes, illustrées par Nikolaï Radlov le génial caricaturiste du journal « Crocodile », Zochtchenko qui lui-même a pratiqué tous les métiers possibles, de cordonnier à contrôleur de la reproduction des volailles, souligne avec humour toute l’incapacité du régime..."

    Anne Puyou, traductrice*

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    Préface de l'auteur - Предисловие

    Эта книга — плод нашего двухлетнего научного труда.

    Здесь собраны наиболее счастливые идеи, осенившие наши головы.

    Не открывая новых несбыточных горизонтов и идя, так сказать, вровень с нашей скромной действительностью, мы предлагаем вниманию покупателя тридцать оригинальных проектов, связанных с последними достижениями техники.

    Эти проекты, придуманные в тиши кабинета, имеют все-же актуальное, практическое обоснование. — Их легко и просто осуществить на деле, при самой скромной растрате.

    Научное изложение сделано простым, суконным языком, доступным самому тупому читателю.

    Даже неграмотный, рассматривая эту книгу, наглядно может увидеть всю высоту гениальной человеческой мысли.

    Если этими проектами заинтересуется Академия Наук или Филармония — просьба обращаться лично: Фонтанка. 57, ред. журн. «Бегемот». На месяц — 60 коп.

    Во избежание путаницы в истории живописи и литературы, по причине отсталости населения, необходимо заявить, что рисунки принадлежат перу художника Н. Радлова, текст — писателя М. Зощенко. А не наоборот.

    От благодарного населения мы не ждем памятника. Памятника нам не надо. Лучше на эти деньги покройте крыши, которые протекают. И проведите водопровод на Охту.

    Также не надо повышать нашу квартплату в связи с выпуском этой книжонки. Гонорар был маленький.

    Особенно горячо благодарим Ленинградскую Метеорологическую станцию за ее четкую работу.

    Также выражаем свою признательность скромному труженику науки В. Воинову и красному изобретателю т. Краеву за некоторые первоначальные идеи, вдохновившие нас на полезную плодотворную деятельность.

    Ленинград
    1928

    Séparateur 1

    Ce livre est le fruit d’un travail scientifique commun qui a duré deux ans.

    Les idées les plus brillantes qui nous ont traversé l’esprit y sont regroupées.

    Sans ouvrir de nouveaux horizons chimériques mais cheminant à côté, comme on dit, de notre modeste réalité, nous proposons à l’attention du client trente projets originaux, liés aux dernières conquêtes techniques.

    Médités dans la quiétude du cabinet de travail, ces projets ont cependant un fondement actuel et pragmatique. Ils sont faciles et simples à réaliser, et ce pour un coût très modeste.

    L’exposé scientifique est présenté dans une langue claire, directe, accessible au lecteur le plus borné.

    En regardant ce livre, même un analphabète conçoit clairement à quelles hauteurs peut s’élever le génie de l’esprit humain.

    Au cas où l’Académie des sciences ou la Philharmonie seraient intéressées par ces projets, nous les prions d’adresser personnellement 60 kopecks par mois à l’adresse suivante : Fontanka, 57, rédaction du journal « Hippopotame ».

    Compte tenu du caractère arriéré de la population, afin d’éviter toute confusion avec l’histoire de la peinture et de la littérature, nous jugeons indispensable de préciser que les dessins appartiennent à la plume du peintre N. Radlov, et le texte, à celle de l’écrivain M. Zochtchenko. Et pas l’inverse.

    Nous n’attendons pas du peuple reconnaissant qu’il nous élève un monument. Nous n’avons pas besoin de monument.

    Avec cet argent, vous feriez mieux de réparer les toitures qui fuient. Et faites aussi passer une canalisation sur l’Okhta.

    Et inutile d’augmenter notre loyer après la publication de ce petit livre. Les honoraires étaient plutôt maigres.

    Nous remercions tout chaleureusement la station météorologique de Leningrad pour la précision de ses travaux.

    Nous exprimons également notre gratitude au modeste travailleur scientifique V. Voïnov et à l’inventeur bolchevique, le camarade Kraïev, pour certaines idées initiales qui ont inspiré un travail productif utile.

    Leningrad 1928

    * Quelques mots sur Anne Puyou, traductrice…

    Titulaire d’un DEA d’études est-européennes et d’un CAPES de lettres modernes, Anne Puyou a consacré sa maîtrise de langue russe à la littérature enfantine russe et soviétique sous la direction d’Efim Etkind.

    Par ailleurs, elle s'est particulièrement intéressée à la poésie russe des années vingt et trente et à l’apparition des mouvements littéraires tels que les Frères Serapion et les Obérioutes.

    Elle a traduit les œuvres poétiques de Nikolaï Oleïnikov parues chez Gallimard et celles de Daniil Kharms, publiées chez Harpo.

    Elle est également l’auteure du livre « Adieu avenir radieux », recueil de nouvelles qui relate son séjour de six ans en URSS en qualité de lectrice de français à Kishinev, Kharkov et Moscou.

    Pour contacter Anne Puyou : facebook.com/anne.puyou.54.

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  • M. Zochtchenko – Gerbeville

    Petites nouvelles russes - Bienvenue à Riga
    Bienvenue à Riga ! Поехать в Ригу (Illustrateur inconu)

    Mikhaïl Zochtchenko - Михаил Зощенко
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    Bienvenue à Gerbeville*

    Поехать в Ригу

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    ­­Publié sous le titre ‘Un incident affligeant’ (Прискорбный случай)
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    (1926)
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    Traduction : Michel Davidenkoff
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    in 'Contes De La Vie De Tous Les Jours', Noir sur blanc, 1987

    * L'expression russe, aujourd'hui inusitée, ‘faire un tour à Riga’ (Поехать или съездить в Ригу) signifiait vulgairement gerber’, vomir (lire en russe). (note des pnr).

    Как хотите, товарищи, а Николаю Ивановичу я очень сочувствую. Пострадал этот милый человек на все шесть гривен и ничего такого особенно выдающегося за эти деньги не видел.

    Только что характер у него оказался мягкий и уступчивый. Другой бы на его месте все кино, может, разбросал и публику из залы выкурил. Потому шесть гривен ежедневно на полу не валяются. Понимать надо.

    А в субботу голубчик наш, Николай Иванович, немножко, конечно, выпил. После получки.

    А был этот человек в высшей степени сознательный. Другой бы выпивший человек начал бузить и расстраиваться, а Николай Иванович чинно и благородно прошелся по проспекту. Спел что-то там такое. Вдруг глядит — перед ним кино.

    «Дай,— думает, — все равно — зайду в кино. Человек,— думает,— я культурный, полуинтеллигентный, чего мне зря по панелям в пьяном виде трепаться и прохожих задевать? Дай, — думает, — я ленту в пьяном виде посмотрю. Никогда ничего подобного не видел».

    Купил он за свои пречистые билет. И сел в переднем ряду. Сел в переднем ряду и чинно-благородно смотрит.

    Только, может, посмотрел он на одну надпись, вдруг в Ригу поехал¹. Потому очень тепло в зале, публика дышит, и темнота на психику благоприятно действует.

    Поехал в Ригу наш Николай Иванович, все чинно-благородно— никого не трогает, экран руками не хватает, лампочек не выкручивает, а сидит себе и тихонько в Ригу едет.

    Вдруг стала трезвая публика выражать недовольствие по поводу, значит, Риги.

    — Могли бы,— говорят,— товарищ, для этой цели в фойе пройтись, только,— говорят,— смотрящих драму отвлекаете на другие идеи.

    Николай Иванович — человек культурный, сознательный — не стал, конечно, зря спорить и горячиться. А встал себе и пошел тихонько.

    «Чего,— думает,— с трезвыми связываться? От них скандалу не оберешься».

    Пошел он к выходу. Обращается в кассу.

    — Только что, — говорит, — дамочка, куплен у вас билет, прошу вернуть назад деньги. Потому как не могу картину глядеть — меня в темноте развозит.

    Кассирша говорит: — Деньги мы назад выдавать не можем, ежели вас развозит — идите тихонько спать.

    Поднялся тут шум и перебранка. Другой бы на месте Николая Ивановича за волосья бы выволок кассиршу из кассы и вернул бы свои пречистые. А Николай Иванович человек тихий и культурный, только, может, раз и пихнул кассиршу.

    — Ты,— говорит,— пойми, зараза, не смотрел я еще на твою ленту. Отдай, говорят, мои пречистые.

    И все так чинно-благородно, без скандалу,— просит вообще вернуть свои же деньги. Тут заведующий прибегает.

    — Мы,— говорит,— деньги назад не вертаем, раз,— говорит,— взято, будьте любезны досмотреть ленту.

    Другой бы на месте Николая Ивановича плюнул бы в зава и пошел бы досматривать за свои пречистые. А Николай Ивановичу очень грустно стало насчет денег, начал он горячо объясняться и обратно в Ригу поехал.

    Тут, конечно, схватили Николая Ивановича, как собаку, поволокли в милицию. До утра продержали. А утром взяли с него трешку штрафу и выпустили.

    Очень мне теперь жалко Николая Ивановича. Такой, знаете, прискорбный случай: человек, можно сказать, и ленты не глядел, только что за билет подержался— и, пожалуйте, гоните за это мелкое удовольствие три шесть гривен. И за что, спрашивается, три шесть гривен?

    1- Поехать или съездить в Ригу: Вытошнить. Фраза появилась потому, что в XIX в. путешествие из Петербурга в Ригу по морю было гораздо дешевле, чем по железной дороге. На убогих каботажных суденышках страшно укачивало, пассажиров тошнило.

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    C'est comme vous voudrez, camarades, mais je compatis tout à fait avec Nicolas Ivanovitch. Cet homme aimable a souffert pour tous ses soixante kopecks, et pour cet argent il n'a vu rien de spécialement exceptionnel.

    C'est uniquement parce que son caractère s'est révélé doux et conciliant. A sa place un autre aurait peut-être démoli tout le cinéma, et enfumé le public au point de le chasser de la salle. Car soixante kopecks, ça ne traîne pas par terre tous les jours. Faut comprendre.

    Or le samedi notre cher Nicolas Ivanovitch avait picolé un p'tit peu, naturellement. Après la paie.

    Et c'était un homme raisonnable au plus haut point. Un autre buveur aurait peut-être commencé un chahut, ou aurait eu le cafard, mais Nicolas Ivanovitch a fait quelques pas sur le boulevard, noblement — cérémonieusement. Il a chanté un truc ou deux. Soudain il voit, devant lui, un cinéma.

    « Tiens, pense-t-il, tant pis, je vais au cinéma. Il pense : je suis un homme cultivé, intellectuel à moitié, à quoi bon traîner en état d'ébriété sur les trottoirs et me cogner aux passants ? Tiens, pense-t-il, je vais me regarder une pellicule, en état d'ivresse. Je n'ai jamais rien vu de pareil. ».

    Il s'est acheté un ticket de ses précieux sous. Et il s'est installé au premier rang. Il s'est installé sur le devant et il regarde, noblement, cérémonieusement.

    Mais à peine avait-il peut-être vu le titre qu'il ‘fait un tour à Gerbeville’. Car il fait chaud dans la salle, le public respire et l'obscurité a une influence bénéfique sur le psychisme.

    Notre Nicolas Ivanovitch a donc fait un tour à Gerbeville et ce, noblement — cérémonieusement. Il ne dérange personne, il ne tripote pas l'écran avec ses mains, il ne dévisse pas d’ampoule. Il est assis tranquille et fait tout tranquillement son tour à Gerbeville.

    Soudain la partie sobre du public s'est mise à exprimer son mécontentement à propos de Gerbeville.

    — Camarade, disent-ils, à cette fin vous auriez peut-être pu vous promener dans le hall, mais là, vous brouillez et détournez les idées de ceux qui regardent le drame !

    Nicolas Ivanovitch, un homme civilisé, raisonnable, n’a évidemment pas commencé à contester et s'échauffer pour rien. Il s'est simplement levé et il est sorti doucement.

    « Pourquoi, pense-t-il, se compromettre avec des gens sobres ? Avec eux on n'évite jamais les scandales. »

    Il se dirige vers la sortie. Il s'adresse à la caisse.

    Il dit : — Ma p'tite dame, je viens de vous acheter un ticket. Je vous prie de me rembourser. Parce que je ne peux regarder l’image, j'ai le tournis dans l'obscurité.

    La caissière dit : — On peut pas vous retourner l'argent, si vous avez tournis, allez dormir en paix !

    Là, il y a eu du chahut et des engueulades. A la place de Nicolas Ivanovitch, un autre aurait peut-être extrait la caissière par les cheveux hors de sa caisse et aurait récupéré lui-même ses précieux sous. Mais Nicolas Ivanovitch, en homme doux et cultivé, a juste peut-être bousculé la caissière une fois.

    — Toi, qu'il dit, faut que tu comprennes, parasite, que j'ai pas regardé ta pellicule. Rends-moi, dit-il, mes précieux sous.

    Et tout cela, il le dit noblement, cérémonieusement, sans scandale. Il demande seulement qu’on lui rembourse son argent.

    Sur ce, accourt le gérant.

    — Nous, qu'il dit, on rend pas l'argent, puisque, dit-il, c’est ainsi, soyez gentil de regarder le film jusqu'au bout.

    A la place de Nicolas Ivanovitch un autre aurait peut-être craché à la figure du gérant et aurait peut-être regardé la pellicule jusqu'à la fin, pour ses précieux sous. Mais Nicolas Ivanovitch devint tout triste à propos de son argent, il commença à s'expliquer avec ferveur et refit un tour à Gerbeville.

    Là, bien sûr, on a saisi Nicolas Ivanovitch comme un chien et on l'a traîné à la police. On l'a gardé jusqu'au matin. Et au matin on lui a infligé trois roubles d'amende avant de le relâcher.

    J’ai bien pitié maintenant de Nicolas Ivanovitch. Quel incident affligeant, vous savez : et dire que cet homme n'a même pas vu le film, il a juste tenu un ticket dans sa main et voilà. Pour ce petit plaisir on lui a fait casquer trois roubles soixante. Mais pour quoi, je vous le demande, trois roubles soixante ?

  • M. Zochtchenko – Le téléphone

    Petites-nouvelles-russes : Téléphone ancien

    Mikhaïl Zochtchenko - Михаил Зощенко
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    Le téléphone - ­Телефон

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    (1926)
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    Traduction : Michel Davidenkoff
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    in 'Contes De La Vie De Tous Les Jours', Noir sur blanc, 1987

    Я, граждане, надо сказать, недавно телефон себе поставил. Потому по нынешним торопливым временам без телефона как без рук.

    Мало ли поговорить по телефону или, например, позвонить куда-нибудь.

    Оно, конечно, звонить некуда это действительно верно. Но, с другой стороны, рассуждая материально, сейчас не 19 год. Это понимать надо.

    Это в 19 году не то что без телефона обходились не жравши сидели, и то ничего.

    А скажем теперь за пять целковых аппараты тебе вешают. Господи твоя воля!

    Хочешь говори по нем, не хочешь как хочешь. Никто на тебя за это не в обиде. Только плати денежки.

    Оно, конечно, соседи с непривычки обижались.

    Может, говорят, оно и ночью звонить будет, так уж это вы ах оставьте.

    Но только оно не то что ночью, а и днем, знаете, не звонит. Оно, конечно, всем окружающим я дал номера с просьбой позвонить. Но, между прочим, все оказались беспартийные товарищи и к телефону мало прикасаются.

    Однако, все-таки за аппарат денежки не дарма плочены. Пришлось таки недавно позвонить по очень важному и слишком серьезному делу.

    Воскресенье было.

    И сижу я, знаете, у стены. Смотрю, как это оно оригинально висит. Вдруг как оно зазвонит. То не звонило, не звонило, а тут как прорвет. Я, действительно, даже испугался.

    Господи, думаю, звону-то сколько за те же деньги!

    Снимаю осторожно трубку за свои любезные.

    Алло, говорю, откуда это мне звонят?

    Это, говорят, звонят вам по телефону.

    А что, говорю, такое стряслось и кто, извиняюсь, будет у аппарата?

    Это, отвечают, у аппарата будет одно знакомое вам лицо. Приходите, говорят, по срочному делу в пивную на угол Посадской.

    Видали, думаю, какие удобства! А не будь аппарата что бы это лицо делало? Пришлось бы этому лицу на трамвае трястись.

    Алло, говорю, а что это за такое лицо и какое дело?

    Однако, в аппарате молчат и на это не отвечают.

    В пивной, думаю, конечно, выяснится. Поскорее сию минуту одеваюсь. Бегу вниз. Прибегаю в пивную. Народу, даром что днем, много. И все незнакомые.

    Граждане, говорю, кто меня сейчас звонил и по какому, будьте любезны, делу?

    Однако, посетители молчат и не отвечают.

    Ах, какая, думаю, досада. То звонили, звонили, а то нет никого.

    Сажусь к столику. Прошу подать пару.

    Посижу, думаю, может и придет кто-нибудь. Странные, думаю, какие шутки.

    Выпиваю пару, закусываю и иду домой.

    Иду домой.

    А дома то есть полный кавардак. Обокраден. Нету синего костюма и двух простынь.

    Подхожу к аппарату. Звоню срочно.

    Алло, говорю, барышня, дайте в ударном порядке уголовный розыск. Обокраден, говорю, в чистую.

    Барышня говорит:

    Будьте любезны занято.

    Звоню попозже. Барышня говорит:

    Кнопка не работает, будьте любезны.

    Одеваюсь. Бегу, конечно, вниз. И на трамвае в уголовный розыск.

    Подаю заявление. Там говорят:

    Расследуем.

    Я говорю:

    Расследуйте и позвоните.

    Они говорят:

    Нам, говорят, звонить как раз некогда. Мы, говорят, и без звонков расследуем, уважаемый товарищ.

    Чем все это кончится не знаю. Больше никто мне не звонил. А аппарат висит.

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    Je dois vous avouer, citoyens, que je me suis fait mettre le téléphone récemment. Car à notre trépidante époque actuelle, si on n'a pas le téléphone, c'est comme si on n’avait pas de bras.

    Peu importe — qu'on parle au téléphone ou qu'on appelle quelque part, par exemple.

    Bien sûr, on ne sait pas où appeler, c'est effectivement vrai. Mais d'un autre côté, au plan matériel, on n'est plus en 1919. Faut comprendre.

    En 19, non seulement on se passait de téléphone, mais y avait rien à bouffer et on ne râlait pas. Mais maintenant, par exemple, on te fixe un appareil pour cinq balles. Seigneur, comme tu voudras !

    Alors, tu causes, si tu veux, si tu veux pas, c'est comme tu veux. Personne ne se vexe contre toi pour ça. Y a qu'à payer les sous.

    Oui, évidemment, les voisins ont pris la mouche par manque d’habitude.

    - Ça peut aussi sonner la nuit, qu'ils disent, alors, comment dire, laissez tomber.

    Mais voilà : non seulement il ne sonne pas la nuit, mais le jour non plus. Bien sûr, j'avais donné mon numéro à mon entourage en les priant de m'appeler. Mais, soit dit en passant, j'ai découvert qu'ils étaient tous des sans-parti qui touchaient rarement au téléphone.

    Ceci dit, je n'ai quand même pas dépensé mes sous pour des prunes. L'autre jour, j'ai dû téléphoner pour cause d'une affaire très importante et trop urgente.

    On était dimanche.

    J'étais assis contre le mur, vous savez. Je vois que l'appareil est fixé d'une façon tout à fait originale. Soudain il se met à tonitruer ! Des jours qu'il n'avait pas sonné, mais là. il s'est rattrapé. J'ai même pris peur, réellement.

    Seigneur, je pense, quelle sonnerie pour le même argent !

    Je décroche délicatement le combiné pour mon argent.

    — Allô, je dis, d'où appelez-vous ?

    Ils disent : — on vous appelle au téléphone.

    Je dis : — Et qu'est-ce qui s'est écroulé, et qui, je m'excuse, est à l'appareil ?

    On me répond : — C'est une personne que vous connaissez qui est à l'appareil. Venez, disent-ils, pour une affaire urgente, au bistrot, à l'angle de la Possadskaïa.

    Eh bien, je pense, quel confort ! Qu'aurait fait cette personne sans téléphone ? Il aurait été obligé de se faire trimballer en tram.

    — Allô, dis-je, mais c'est qui et de quoi s’agit-il ?

    Mais ils se taisent et ne répondent rien.

    Je pense : bien sûr, au bistrot ça va s'éclaircir. Je m'habille en vitesse. Je fonce en bas. J'arrive au bistrot.

    Il y a pas mal de peuple, alors qu'il fait jour. Tous des inconnus.

    — Citoyens, dis-je, qui m'a appelé tout à l'heure ? Et pourquoi ? Soyez assez aimables.

    Mais les clients se taisent et ne répondent pas.

    Je pense : - Ah là là, que c'est emmerdant ! Tantôt ils n’arrêtaient pas d'appeler et puis maintenant, personne.

    Je m’assois. Je commande un cordial. Je pense : je resterai un peu, quelqu'un va peut-être venir. Bizarres, ces farces, que je me dis.

    Je bois mon verre, mange un morceau et rentre chez moi.

    J’entre chez moi. Or là, c'est le bordel intégral. On m'a cambriolé. Il manque un costume marine et deux draps.

    Je vais vers l'appareil. J'appelle en urgence.

    - Allô, dis-je, mademoiselle, reliez-moi tout de suite au commissariat ! On m'a tout piqué, que je dis.

    La demoiselle dit : - Veuillez patienter, c'est occupé.

    Je sonne un peu plus tard. La demoiselle dit : - Le bouton est en panne, soyez patient.

    Je m’habille, je fonce en bas, bien sûr. En tram au commissariat.

    Je fais ma déclaration.

    Ils disent : - On fera une enquête.

    Je dis : - Enquêtez et appelez-moi.

    Ils disent : - Nous n’avons pas le temps d'appeler, qu'ils disent. Nous allons faire notre enquête, même sans téléphoner, estimé camarade.

    Comment tout ça va se terminer ? Je n'en sais rien. Personne ne m’a plus appelé. Mais l'appareil est bien là, fixé au mur.

  • M. Zochtchenko – Le paternel

    Petites nouvelles russes - Klint
    Gustav Klimt, Baby (Wiege) 1917,1918.

    Mikhaïl Zochtchenko - Михаил Зощенко
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    Le paternel - Папаша

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    (1926)
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    Traduction : Michel Davidenkoff
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    in 'Contes De La Vie De Tous Les Jours', Noir sur blanc, 1987

    Недавно Володьке Гусеву припаяли на суде. Его признали отцом младенца с обязательным отчислением третьей части жалованья. Горе молодого счастливого отца не поддается описанию. Очень он грустит по этому поводу.

    — Мне,— говорит,— на младенцев завсегда противно было глядеть. Ножками дрыгают, орут, чихают. Толстовку тоже, очень просто, могут запачкать. Прямо житья нет от этих младенцев.

    А тут еще этакой мелкоте деньги отваливай. Третью часть жалованья ему подавай. Так вот — здорово живешь. Да от этого прямо можно захворать.

    Я народному судье так и сказал: — Смешно,— говорю,— народный судья. Прямо,— говорю,— смешно, какие ненормальности. Этакая,—говорю,— мелкая крошка, а ему третью часть. Да на что,— говорю,— ему третья часть? Младенец,— говорю,—не пьет, не курит и в карты не играет, а ему выкладывай ежемесячно. Это, — говорю,— захворать можно от таких ненормальностей.

    А судья говорит: — А вы как насчет младенца? Признаете себя, ай нет?

    Я говорю: — Странные ваши слова, народный судья. Прямо,— говорю,— до чего обидные слова. Я,— говорю,— захворать могу от таких слов. Натурально,— говорю,— это не мой младенец. А только,— говорю,— я знаю, чьи это интриги. Это,— говорю,— Маруська Коврова насчет моих денег расстраивается. А я,— говорю,— сам тридцать два рубли получаю. Десять семьдесят пять отдай,— что ж это будет? Я,— говорю,— значит, в рваных портках ходи. А тут,— говорю,— параллельно с этим Маруська рояли будет покупать и батистовые подвязки на мои деньги. Тьфу, говорю, провались, какие неприятности!

    А судья говорит: — Может, и ваш. Вы.— говорит,— припомните.

    Я говорю: — Мне припоминать нечего. Я,— говорю,— от этих припоминаний захворать могу... А насчет Маруськи — была раз на квартиру пришедши. И на трамвае,— говорю,— раз ездили. Я платил. А только,— говорю,— не могу я за это всю жизнь ежемесячно вносить. Не просите...

    Судья говорит: — Раз вы сомневаетесь насчет младенца, то мы сейчас его осмотрим и пущай увидим, какие у него наличные признаки.

    А Маруська тут же рядом стоит и младенца своего разворачивает.

    Судья посмотрел на младенца и говорит: — Носик форменно на вас похож.

    Я говорю: — Я,— говорю,— извиняюсь, от носика не отказываюсь. Носик, действительно, на меня похож! За носик,— говорю,— я завсегда способен три рубля или три с полтиной вносить. А зато,— говорю,— остатний организм весь не мой. Я,— говорю,— жгучий брюнет, а тут,— говорю,— извиняюсь, как дверь белое. За такое белое — рупь или два с полтиной могу только вносить. На что,— говорю,— больше, раз оно в союзе даже не состоит.

    Судья говорит: — Сходство, действительно, растяжимое. Хотя,— говорит,— носик весь в папашу.

    Я говорю: — Носик не основание. Носик,— говорю,— будто бы и мой, да дырочки в носике будто бы и не мои — махонькие очень дырочки. За такие, — говорю, — дырочки не могу больше рубля вносить. Разрешите, — говорю, — народный судья, идти и не задерживаться.

    А судья говорит: — Погоди маленько. Сейчас приговор вынесем.

    И выносят — третью часть с меня жалованья.

    Я говорю: — Тьфу на всех. От таких,— говорю,— дел захворать можно.

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    L’autre jour, au tribunal, on a coincé Volodka Goussev. On l’a déclaré père d'un bébé avec retenue obligatoire du tiers de son salaire. Impossible de décrire la douleur de l’heureux jeune père. Là, il a vraiment fait une déprime.

    — Moi, dit-il, regarder les bébés, ça m'a toujours dégoûté. Ils gigotent, braillent, éternuent, et puis, ils peuvent tout simplement salir leur brassière. C'est plus une vie à cause de ces bébés.

    Et voilà, on vous demande de casquer pour un minus pareil. Lui donner le tiers de mon salaire. Résultat - une vie à poil ! Eh bien, on peut carrément tomber malade à cause de ça.

    Et c'est ce que j'ai dit au tribunal populaire : — C’est à mourir de rire, dis-je, juge populaire. C'est carrément drôle, ces anormalités. Voilà, je dis, une puce minuscule, et elle aurait droit au tiers ? Et pourquoi, que je dis, ce tiers ? Ce bébé, dis-je, ne boit pas, ne fume pas et ne joue pas aux-cartes, et vous voulez que je lui sorte ça tous les mois de ma poche. Eh bien, que je dis, on peut tomber malade à cause de ces anormalités.

    Mais le juge dit : — Et ce bébé, qu'en pensez-vous? C'est à vous ou non ?

    Je dis : — Quelles paroles bizarres, juge populaire. Je dirai même carrément: des paroles très vexantes. Moi, dis-je, je peux tomber malade à cause de ces paroles. Bien entendu, dis-je, ce n'est pas mon bébé mais je sais qui a noué ces intrigues. C'est Marousska, je dis, qui se fait du mauvais sang à propos de mon argent. Or moi, que je dis, je touche trente-deux roubles par mois. Si j’en donne dix soixante-quinze - qu'est-ce que je deviendrai ? Moi, dis-je, je n'ai plus qu'à me balader en falzar troué. Et puis, je dis, parallèlement Marousska va s'acheter des pianos à queue avec mon argent et des jarretières en batistes. Beurk ! dis-je, du balai, quels désagréments !

    Mais le juge dit : — Après tout, il est peut-être à vous. Il dit : rappelez-vous.

    Je dis : — J'ai rien à me rappeler. Ces évocations, je dis, elles peuvent me rendre malade… Maintenant, à propos Marousska - une fois elle a été venue chez moi. Une fois, dis-je, on a aussi pris le tram ensemble. C'est moi qu'ai payé. Seulement, dis-je, je ne peux pas payer mensuellement toute ma vie pour ça. N'insistez pas !

    Le juge dit : — Puisque vous avez des doutes au sujet du bébé, nous allons l'examiner et voir quels sont ses signes spécialement particuliers.

    Or, Marousska est là, tout près, et désemmitoufle son bébé.

    Le juge regarde le bébé et dit : — Ce p'tit nez ressemble franchement au vôtre.

    Je dis : — Moi, dis-je, je m'excuse, je ne refuse pas ce p'tit nez. Ce p'tit nez me ressemble effectivement. Pour ce p'tit nez, je serai toujours capable de verser trois roubles ou trois et demi. Par contre, dis-je, l'organisme résiduel n'a rien de moi. Moi, je dis, je suis un brun flamboyant, et ça, je m’excuse, dis-je, c'est blanc comme une porte. Pour ce blanc - je peux juste payer deux roubles, ou deux et demi. Pourquoi plus, je dis, puisqu'il est même pas syndiqué.

    Le juge dit : — La ressemblance est effectivement une notion extensible. Quoique, dit-il, son p'tit nez est tout à fait de son père.

    Je dis : — Ce p'tit nez n'est pas une raison. Ce p'tit nez, il a tout à fait l’air du mien, mais les p'tites narines de ce p'tit nez non pas : pour ces narines, je dis, je peux payer pas plus d’un rouble. Permettez-moi, juge populaire, de partir et de ne pas m’attarder.

    Mais le juge dit : — Attends voir un peu ! Nous allons prononcer le jugement.

    Et ils prononcent et retiennent un tiers de mon salaire !

    Je dis : — Beurk sur vous tous ! Des trucs comme ça, dis-je, ça peut rendre malade !

  • M. Zochtchenko – Un flair de chien

    Petites-nouvelles-russes - Prisse-le-chien

    Mikhaïl Zochtchenko - Михаил Зощенко
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    Un flair de chien -  Собачий нюх

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    (1923)
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    Traduction : Michel Davidenkoff
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    in 'Contes De La Vie De Tous Les Jours', Noir sur blanc, 1987

    У купца Еремея Бабкина сперли енотовую шубу. Взвыл купец Еремей Бабкин. Жалко ему, видите ли, шубы.

    — Шуба-то,— говорит,— больно хороша, граждане. Жалко. Денег не пожалею, а уж найду преступника. Плюну ему в морду.

    И вот вызвал Еремей Бабкин уголовную собаку-ищейку. Является этакий человек в кепочке, в обмотках, а при нем собака. Этакая даже собачища — коричневая, морда острая и несимпатичная.

    Ткнул этот человек собачку свою в следы возле двери, сказал «пс» и отошел. Понюхала собака воздух, повела по толпе глазом (народ, конечно, собрался) и вдруг к бабке Фекле, с пятого номера, подходит и нюхает ей подол. Бабка за толпу. Собака за юбку. Бабка в сторону — и собака за ней. Ухватила бабку за юбку и не пущает.

    Рухнула бабка на колени перед агентом.

    — Да,— говорит,— попалась. Не отпираюсь. И,— говорит,— пять ведер закваски —это так. И аппарат — это действительно верно. Все,— говорит,— находится в ванной комнате. Ведите меня в милицию.

    Ну, народ, конечно, ахнул.

    — А шуба?— спрашивают.

    — Про шубу,— говорит,— ничего не знаю и ведать не ведаю, а остальное — это так. Ведите меня, казните.

    Ну, увели бабку.

    Снова взял агент собачищу свою, снова ткнул ее носом в следы, сказал «пс» и отошел.

    Повела собачища глазом, понюхала пустой воздух и вдруг к гражданину управдому подходит.

    Побелел управдом, упал навзничь.

    — Вяжите,— говорит,— меня, люди добрые, сознательные граждане. Я,— говорит,— за воду деньги собрал, а те деньги на прихоти свои истратил.

    Ну, конечно, жильцы навалились на управдома, стали вязать. А собачища тем временем подходит к гражданину из седьмого номера. И теребит его за штаны.

    Побледнел гражданин, свалился перед народом.

    — Виноват,— говорит,—виноват. Я, — говорит,— это верно, в трудовой книжке год подчистил. Мне бы, говорит, жеребцу, в армии служить и защищать отечество, а я живу в седьмом номере и пользуюсь электрической энергией и другими коммунальными услугами. Хватайте меня! Растерялся народ.

    «Что,— думает,— за такая поразительная собака?» А купец Еремей Бабкин заморгал очами, глянул вокруг, вынул деньги и подает их агенту.

    — Уводи,— говорит,— свою собачищу к свиньям собачьим. Пущай,— говорит,— пропадает енотовая шуба. Пес с ней...

    А собачища уж тут. Стоит перед купцом и хвостом вертит.

    Растерялся купец Еремей Бабкин, отошел в сторону, а собака за ним. Подходит к нему н его калоши нюхает.

    Заблекотал купец, побледнел.

    — Ну,— говорит,— бог правду видит, если так. Я,— говорит,— и есть сукин кот и мазурик. И шуба-то,— говорит,— братцы, не моя. Шубу-то,— говорит,— я у брата своего зажилил. Плачу и рыдаю! Бросился тут народ врассыпную. А собачище и воздух некогда нюхать, схватила она двоих или троих — кто подвернулся — и держит.

    Покаялись эти. Один казенные денежки в карты пропер, другой супругу свою утюгом тюкнул, третий такое сказал, что и передать неловко.

    Разбежался народ. Опустел двор. Остались только собака да агент.

    И вот подходит вдруг собака к агенту и хвостом виляет. Побледнел агент, упал перед собакой.

    — Кусайте,—говорит, — меня, гражданка. Я,— говорит,— на ваш собачий харч три червонца получаю, а два себе беру...

    Чего было дальше — неизвестно. Я от греха поскорее смылся.

    Petites nouvelles russes - Les voiles écarlates - Grine - Chien noir

    On a fauché la pelisse de raton de Iéréméi Babkine, commerçant. Et voyez-vous, il en est tout chagrin.

    - Cette pelisse, dit-il, était drôlement chouette, citoyens. Ça me fend le cœur. C'est pas une question de sous, mais que je trouve ce truand, je lui crache à la gueule !

    Et voilà que Iéréméi Babkine fait venir un chien limier de la Criminelle. Arrive une espèce de type en casquette, en bandes molletières, avec un chien. Que dis-je ! Un monstre - brun, au museau aigu et peu sympathique.

    Le type fourre le nez du chien dans les traces près de la porte, dit « psss » et s'écarte. Le chien flaire l'odeur, scrute la foule à la ronde (car toute une foule s'était rassemblée), s’approche soudain de la vieille Fekla, celle de l'appartement N° 5, et renifle son ourlet. La vieille plonge dans la foule. Le chien s'accroche à l'ourlet et ne lâche pas.

    La vieille s'élance de côté. Le chien la suit. Il reste accroché à la jupe de la bonne femme et ne la lâche pas.

    La vieille s'écroule sur ses genoux devant l'agent.

    - Eh oui, dit-elle, je me suis fait pincer. Je ne nie rien. Les cinq seaux de levain — tout ça, c'est vrai. Et l'appareil — c'est exact. Le tout, dit-elle, se trouve dans la salle de bain. Emmenez-moi au poste !

    Bon, évidemment, les gens restent baba.

    — Et la pelisse ? demande-t-on.

    — Au sujet de la pelisse, dit-elle, j'ignore tout et ne sais rien de rien, mais le reste — c'était vrai. Emmenez-moi, dit-elle, châtiez-moi !

    Bon, on a emmené la vieille.

    L'agent prend de nouveau son monstre, lui fourre de nouveau le nez dans les traces, dit « psss » et s'écarte.

    Le monstre promène de nouveau ses yeux sur les gens, renifle l'air et s'approche soudain du citoyen gérant d’immeuble.

    Le gérant blêmit, il tombe à la renverse.

    — Attachez-moi, dit-il, bonnes gens, citoyens conscients. Moi, dit-il, j'ai encaissé l'argent pour l'eau, mais ce fric je l’ai dépensé pour satisfaire mes lubies.

    Bon, naturellement, les locataires tombent à bras raccourcis sur le gérant pour l'attacher. Et pendant ce temps, le monstre s'approche de l'occupant du sept. Et tiraille son pantalon.

    Ce citoyen blêmit, il se prosterne devant la foule.

    — Coupable, dit-il, je suis coupable. Moi, dit-il, j'ai effacé une année de mon livret de travail. Un étalon comme moi, dit-il, devrait servir dans l'armée et défendre la patrie, et voilà que je vis dans l'appartement sept et que je profite de l'énergie électrique et des autres services municipaux. Prenez-moi !

    La foule est bouche bée. Elle pense : qu'est-ce que c’est que ce chien ahurissant

    Et Iéréméi Babkine, commerçant, se met à cligner des yeux, regarde autour, sort de l’argent et le donne à l'agent.

    — Emporte ton monstre, dit-il, chez les chiens de ma chienne ! Tant pis, dit-il, pour la pelisse en raton. Que le diable les emporte elle et lui…

    Mais le monstre est déjà devant lui. Il reste devant le commerçant et remue la queue.

    Le marchand s'affole, s'écarte, mais le chien le suit. Il s’approche et renifle ses galoches.

    Le marchand devient gris, blêmit.

    - Bon, dit-il, Dieu voit la vérité, c'est comme ça. Moi, dit-il, je suis un fils de pute et un truand. D'ailleurs, dit-il, la pelisse n’est pas à moi. Cette pelisse, dit-il, je l'ai escroquée à mon frère. Je pleure et je gémis !

    Alors le peuple s'enfuit en panique. Et le monstre n'a même pas le temps de humer l'air. Il en attrape deux ou trois au hasard, et ne démord pas.

    Ils se repentent tous. L'un a flambé les deniers de l'Etat aux cartes, un autre a caressé son épouse à coups de fer à repasser, le troisième a dit des trucs tels que je rougirais de les reproduire.

    La foule s’est dispersée. La cour est vide. Restent seuls le chien et l’agent.

    Et soudain le chien s'approche de l'agent et remue la queue. L’agent blêmit, il s'écroule devant le chien.

    — Mordez-moi, citoyen dit-il ! Moi, dit-il, je touche trois roubles d’or pour votre bouffe de chien, et j'en empoche deux.

    Comment tout ça a continué ? Je l'ignore. Je me suis tiré dare-dare devant ce malheur.

    Petites-nouvelles-russes : Un flair de chien
    Un flair de chien (illustrateur inconnu)
  • M. Zochtchenko – L’acteur

    Mikhaïl Zochtchenko - Михаил Зощенко
    ­

    L'acteur - Актёр

    ­­
    (1925)
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    Traduction : Michel Davidenkoff
    ­

    in 'Contes De La Vie De Tous Les Jours', Noir sur blanc, 1987

    Petites nouvelles russes - L'acteur

    Рассказ этот — истинное происшествие. Случилось в Астрахани. Рассказал мне об этом актер-любитель. Вот что он рассказал.

    Вот вы меня, граждане, спрашиваете, был ли я актером? Ну, был. В театре играл. Прикасался к этому искусству. А только ерунда. Ничего в этом нет выдающего, Конечно, если подумать глубже, то в этом искусстве много хорошего.

    Скажем, выйдешь на сцену, а публика смотрит. А средь публики — знакомые, родственники со стороны жены, граждане с дому. Глядишь — подмигивают с партеру — дескать, не робей, Вася, дуй до горы. А ты, значит, им знаки делаешь — дескать, оставьте беспокоиться, граждане. Знаем. Сами с усами.

    Но если подумать глубже, то ничего в этой профессии нету хорошего. Крови больше испортишь.

    Вот раз ставили мы пьесу «Кто виноват?». Из прежней жизни. Очень это сильная пьеса. Там, значит, в одном акте грабители купца грабят на глазах у публики. Очень натурально выходит. Купец, значит, кричит, ногами отбивается. А его грабят. Жуткая пьеса.

    Так вот поставили эту пьесу.

    А перед самым спектаклем один любитель, который купца играл, выпил. И в жаре до того его, бродягу, растрясло, что, видим, не может роль купца вести. И, как выйдет к рампе, так нарочно электрические лампочки ногой давит.

    Режиссер Иван Палыч мне говорит: — Не придется,— говорит,— во втором акте его выпущать. Передавит, сукин сын, все лампочки. Может,— говорит,— ты заместо его сыграешь? Публика дура — не поймет.

    Я говорю: — Я, граждане, не могу,— говорю,— к рампе выйти. Не просите. Я,— говорю,— сейчас два арбуза съел. Неважно соображаю.

    А он говорит: — Выручай, браток. Хоть на одно действие. Может, тот артист после очухается. Не срывай,— говорит,— просветительной работы.

    Все-таки упросили. Вышел я к рампе. И вышел по ходу пьесы, как есть, в своем пиджаке, в брюках. Только что бороденку чужую приклеил. И вышел. А публика хотя и дура, а враз узнала меня, — А,— говорят,— Вася вышедши! Не робей, дескать, дуй до горы.

    Я говорю: — Робеть, граждане, не приходится — раз,— говорю,— критический момент. Артист,— говорю,— сильно под мухой и не может к рампе выйтить. Блюет.

    Начали действие.

    Играю я в действии купца. Кричу, значит, ногами от грабителей отбиваюсь. И чувствую, будто кто-то из любителей действительно мне в карман лезет.

    Запахнул я пиджачок. В сторону от артистов.

    Отбиваюсь от них. Прямо по роже бью. Ей-богу! — Не подходите, — говорю, — сволочи, честью прошу.

    А те по ходу пьесы это наседают и наседают. Вынули у меня бумажник (восемнадцать червонцев) и к часам прутся.

    Я кричу не своим голосом: — Караул, дескать, граждане, всерьез грабят.

    А от этого полный эффект получается. Публика-дура в восхищении в ладоши бьет. Кричит: — Давай, Вася, давай. Отбивайся, милый. Крой их, дьяволов, по башкам.

    Я кричу: — Не помогает, братцы! И сам стегаю прямо по головам. Вижу — один любитель кровью исходит, а другие, подлецы, в раж вошли и наседают.

    — Братцы,— кричу,— да что ж это? За какое самое это страдать-то приходится? Режиссер тут с кулис высовывается.

    — Молодец,— говорит,— Вася. Чудно,— говорит,— рольку ведешь. Давай дальше.

    Вижу — крики не помогают. Потому, чего ни крикнешь — все прямо по ходу пьесы ложится. Встал я на колени.

    — Братцы,— говорю.— Режиссер,— говорю,— Иван Палыч. Не могу больше! Спущайте занавеску. Последнее,— говорю,— сбереженье всерьез прут! Тут многие театральные спецы — видят, не по пьесе слова — из кулис выходят. Суфлер, спасибо, из будки наружу вылезает.

    — Кажись,— говорит,— граждане, действительно у купца бумажник свистнули.

    Дали занавес. Воды мне в ковшике принесли. Напоили, — Братцы,— говорю.— Режиссер,—говорю,—Иван Палыч. Да что ж это,— говорю.— По ходу,— говорю,— пьесы ктой-то бумажник у меня вынул.

    Ну, устроили обыск у любителей. А только денег не нашли. А пустой бумажник кто-то в кулисы кинул.

    Деньги так и сгинули. Как сгорели.

    Вы говорите — искусство? Знаем! Играли!

    Séparateur 1

    Ce récit relate un fait authentique. Ça s'est passé à Astrakhan. C'est un acteur amateur qui me l'a raconté. Voici ce qu'il m'a dit :

    — Bon, citoyens, vous me demandez si j'ai été acteur ? Mais oui, je l'ai été. J'ai joué au théâtre. J'ai touché à cet art. Mais c'est de la foutaise. Rien de bien folichon dans tout ça.

    Naturellement, si on y réfléchit, il y a pas mal de bons côtés dans cet art. Par exemple, on entre en scène, et le public vous fixe. Et dans le public il y a des amis, des proches parents par alliance, des voisins de palier. On regarde et on voit qu'ils vous font des clins d’œil depuis l'orchestre, comme s'ils voulaient dire, vas-y, Vassia, mets le paquet. De votre côté, vous leur faites des signes qui signifient : arrêtez de vous tortiller, citoyens. Je suis au courant. Je suis pas débile.

    Mais, si on y réfléchit, il n'y a rien de bon dans ce métier. On se fait plutôt du mauvais sang.

    Eh bien, un jour on jouait la pièce « A qui la faute ? », tirée de la vie d'avant. Elle est forte, cette pièce. C'est-à-dire, dans un des actes, des bandits détroussent un commerçant au vu et au su du public. Ça a un air très naturel. Donc le commerçant hurle, il bat en retraite à coups de pied. Mais les autres le harcèlent. Formidable, la pièce !

    Donc, on a joué cette pièce. Mais juste avant le spectacle un des amateurs, celui qui jouait le commerçant, s'était saoulé. Et avec toute la chaleur, il était tellement secoué, ce vaurien, qu'on a vu qu'il ne pouvait pas jouer le rôle du commerçant. Dès qu'il s'avance vers la rampe, il écrase exprès les ampoules électriques.

    Le metteur en scène, Ivan Palytch, me dit : — Il ne faut pas le lâcher sur la scène au deuxième acte. Il va écraser toutes les ampoules, ce fils de pute. Et si tu jouais à sa place ? qu'il dit. Le public est con - il n'y verra que du feu.

    Je dis : — Citoyen, moi je ne veux pas aller à la rampe. N'insiste pas ! Moi, dis-je, je viens de m'avaler deux pastèques. Je suis un peu dans les vapes.

    Mais lui me dit : — Sauve-nous, petit. Ne serait-ce que pour un acte. L'autre artiste va se réveiller peut-être, entre temps. Ne sape pas, dit-il, notre travail éducatif !

    Bon, ils m'ont eu. Je suis entré en scène.

    Et je suis entré sans me changer, comme l'action de la pièce l'indique, avec mon veston et mon pantalon. Je me suis juste collé une fausse barbiche. Et c’est parti ! Le public, bien que con, m'a reconnu tout de suite.

    — Ah, disent-ils, c'est Vassia qu'arrive ! Vas-y, qu'ils disent, mets le paquet !

    Je dis : — J'y vais, citoyens, puisque, dis-je, c'est un moment critique, faut pas faire le timide. L’artiste, dis-je, est rond comme une bille et il peut pas s'approcher de la rampe. Il gerbe.

    On a commencé. Dans cet acte je joue le commerçant. Donc, je hurle, je repousse les voleurs à coups de pied. Et voilà que je sens qu'un des amateurs a l'air de glisser sa main dans ma poche pour de bon.

    Je boucle mon veston. Je saute de côté, loin des artistes. Je me défends. Je tape en pleine gueule, parbleu !

    — N'approchez pas, dis je, salopards, je vous le demande en tout honneur !

    Mais eux, comme prévu dans l'action de la pièce, ils me harcèlent de plus belle.

    Ils ont piqué mon portefeuille (avec cent quatre-vingt roubles) et s’en prennent à ma montre.

    Je hurle d'une voix méconnaissable : — Au secours, citoyens, on me dépouille pour de vrai !

    Or, ça fait un effet bœuf. Le con de public, ravi, applaudit à tout rompre. On crie : — Vas-y, Vassia, vas-y. Défends-toi, petit. Enfonce-leur la cafetière !

    Je crie : — Rien à faire, les potes !

    Et je tape de plus belle sur leurs têtes. Je vois que le sang coule ce celle d’un comédien amateur ; les autres, les vilains, enragent et me bousculent.

    — Eh les potes, c'est quoi tout ça ? Pour quelle raison je dois souffrir ainsi ?

    Et voilà que le metteur en scène sort sa tête des coulisses : — T'es un crack, Vassia, dit-il. Tu joues à la perfection. Continue !

    Je constate que mes cris n'y font rien. Parce que je peux crier n'importe quoi, ça correspond chaque fois à l'action de la pièce.

    Je me suis mis à genoux.

    — Mes p'tits potes..., dis-je, Ivan Palytch..., notre metteur en scène..., j'en peux plus. Baissez le rideau. On me pique, dis-je, mes dernières économies pour de vrai.

    Là, beaucoup de spécialistes ès art dramatique s'aperçoivent bien que cette réplique ne figure pas dans la pièce et sortent des coulisses. Le souffleur, Dieu merci, s'extrait de son trou : — On dirait, citoyen, dit-il, qu'on a vraiment piqué le portefeuille du commerçant.

    On a baissé le rideau. On m'a apporté un godet d'eau. On m'a abreuvé.

    — Ah là là, les potes, dis-je, Ivan Palytch, notre metteur en scène ! Quelle histoire ! Quelqu'un a chouravé mon portefeuille comme c'est écrit dans la pièce.

    Bon, on a fouillé tous les comédiens amateurs. Mais sans trouver mon argent. Quant au portefeuille on l'a retrouvé, vide, dans les coulisses.

    Eh bien, l'argent avait complètement disparu. Comme s'il avait flambé.

    Vous dites : — Le théâtre, un art ? Oui, je connais. J'ai joué moi-même.