• Comment Ilya de Mourom devint un preux chevalier (02)

    Comment Ilya de Mourom devint un preux chevalier (Episode 2)
    Montage réalisé par T. Binevsky (Т. Н. Биневский)

    Comment Ilya de Mourom devint un preux chevalier
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    Как Илья́ из Му́рома богатырём стал

    Irina Karnaoukhova - Ирина Карнаухова

    Второ́й эпизо́д - Episode deux

    Вот раз оте́ц с ма́терью пошли́ в лес пни корчева́ть, ко́рни выдира́ть, гото́вить по́ле под па́хоту. А Илья́ оди́н на печи́ лежи́т, в око́шко погля́дывает.

    Вдруг ви́дит — подхо́дят к его́ избе́ три ни́щих стра́нника.

    Постоя́ли они́ у воро́т, посту́кали желе́зным кольцо́м и говоря́т:

    — Встань, Илья́, отвори́ кали́точку.

    — Злы́е шу́тки вы, стра́нники, шу́тите: три́дцать лет я на печи ́си́днем сижу́, встать не могу́.

    — А ты приподними́сь, Илю́шенька.

    Рвану́лся Илья́ — и спры́гнул с печи́, стои́т на полу́ и сам своему́ сча́стью не ве́рит.

    — Ну-ка, пройди́сь, Илья́.

    Шагну́л Илья́ раз, шагну́л друго́й — кре́пко его́ но́ги де́ржат, легко́ его́ но́ги несу́т.

    Обра́довался Илья́, от ра́дости сло́ва сказа́ть не мо́жет. А кали́ки перехо́жие ему́ говоря́т:

    — Принеси́-ка, Илю́ша, студёной воды́. Принёс Илья́ студёной воды́ ведро́. Нали́л стра́нник воды́ в ко́вшичек.

    — Попе́й, Илья́. В э́том ковше́ вода́ всех рек, всех озёр Руси́-ма́тушки.

    Вы́пил Илья́ и почу́ял в себе́ си́лу богаты́рскую. А кали́ки его́ спра́шивают:

    — Мно́го ли чу́ешь в себе́ си́лушки?

    — Мно́го, мно́го, стра́нники. Ка́бы мне лопа́ту, я бы всю́ зе́млю вспаха́л.

    — Вы́пей, Илья́, оста́точек. В том остато́чке всей земли́ роса́, с зелёных луго́в, с высо́ких лесо́в, с хлеборо́дных поле́й. Пей.

    Вы́пил Илья́ и оста́точек.

    — А тепе́рь мно́го в тебе́ си́лушки?

    — Ох, кали́ки перехо́жие, сто́лько, сто́лько во мне си́лы, что, ка́бы бы́ло в небеса́х кольцо́, ухвати́лся бы я за него ́и всю́ зе́млю переверну́л.

    — Сли́шком мно́го в тебе́ си́лушки, на́до поуба́вить, а то земля́ носи́ть тебя́ не ста́нет. Принеси́-ка ещё воды́.

    Petites nouvelles russes - fleur

    Et voilà qu'un matin, son père et sa mère partent dans la forêt pour arracher de vieilles souches et débarrasser de leurs racines le champ à labourer. Mais Ilya, lui, reste allongé, seul près du poêle, portant son regard par la fenêtre.

    Soudain, il voit trois mendiants errants s'approcher de l’isba. Ils s’arrêtent au portail et, frappant sur son anneau de fer, disent :

    - Lève-toi, Ilya, ouvre-nous !

    - Méchante blague, voyageurs, vous vous moquez de moi : depuis trente ans je suis ici allongé près du poêle sans pouvoir me lever.

    - Et tu te lèveras et tu marcheras, gentil Ilya...

    Ilya se lève alors d’un bond de sa couche, se tient droit sur ses jambes, ne pouvant pas croire en sa chance.

    - Allez, va Ilya ! marche !

    Ilya fait un pas, et puis un autre - ses jambes le tiennent fermement, le portent sans effort.

    Ilya est si ravi qu’il ne peut trouver de mot pour dire sa joie. Et les kaliks¹ lui disent :

    - Apporte-nous donc de l'eau fraîche, Gentil Ilya. Et Ilya s’en va chercher un seau. L’un d’eux remplit une louchée d’eau fraîche.

    - Bois, Ilya ! Dans ce godet se trouve l'eau de toutes les rivières, de tous les lacs de notre petite mère, notre Vieille Russie.

    Et à l’instant où il boit une gorgée, Ilya sent monter en lui une force héroïque. Et les kaliks lui demandent :

    - Ressens-tu toute cette force en toi ?

    - Beaucoup, beaucoup de force, voyageurs... Si j'avais une araire², je labourerais la Terre entière !

    - Bois, Ilya, finis le reste ! Dans cette eau, de toute la Terre, se trouvent rassemblés la rosée, les vertes prairies, les hautes forêts, les champs de céréales. Bois Ilya !

    Et Ilya finit de boire l’entière louchée.

    - Et maintenant ressens-tu toutes ces forces en toi ?

    - Oh, kaliks, j'ai tellement de force en moi que s'il y avait un anneau dans le ciel, je le saisirais et soulèverais la Terre entière³.

    - Il y a bien trop de force en toi, il nous faut la réduire, sinon la Terre ne pourra te porter. Va donc Ilya nous chercher un peu plus d'eau...

    1- Kaliks (калики) : bardes itinérants (souvent aveugles, comme l’était, dit-on, Homère) qui allaient de village en village chantant et contant les anciennes légendes.
    2- Le récit ici parle de ‘pelle’ (лопата).
    3- Selon la formule attribuée par Plutarque à Archimède, ‘Donnez-moi un levier et je soulèverai la Terre’.
  • Comment Ilya de Mourom devint un preux chevalier (01)

    Comment Ilya de Mourom devint un preux chevalier (Episode 1)
    Montage réalisé par T. Binevsky (Т. Н. Биневский)

    Comment Ilya de Mourom devint un preux chevalier
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    Как Илья́ из Му́рома богатырём стал
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    Byline

    Auteure : Irina Karnaoukhova - Автор : Ирина Карнаухова

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    2012
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    D’après d’anciens récits traditionnels - По мотивам старинной сказки

    Пе́рвый эпизо́д - Premier épisode

    В старину́ старода́внюю жил под го́родом Му́ромом, в се́ле Карача́рове крестья́нин Ива́н Тимофе́евич со свое́й жено́й Ефроси́ньей Я́ковлевной.

    Был у них оди́н сын Илья́. Люби́ли его о́тец с ма́терью, да то́лько пла́кали, на него́ погля́дывая: трид́цать лет Илья́ на печи́ лежи́т, ни руко́й, ни ного́й не шевели́т. А ро́стом богаты́рь Илья́, и умо́м све́тел, и гла́зом зо́рок, а но́ги его не но́сят, сло́вно брёвна лежат́, не шеве́лятся.

    Слы́шит Илья́, на печи́, как мать пла́чет, оте́ц вздыха́ет, ру́сские лю́ди жа́луются: напада́ют на Русь враги́, поля́ выта́птывают, люде́й гу́бят, дете́й сиротя́т. По путя́м-дорога́м разбо́йники ры́щут, не даю́т они́ ни прохо́ду лю́дям, ни прое́зду. Налета́ет на Русь Змей Горы́ныч, в своё ло́гово де́вушек ута́скивает.

    Го́рько Илья́, обо всём э́том слы́ша, на судьбу́ свою́ жа́луется:

    — Эх вы, но́ги мои́ нехожа́ляе, эх вы, ру́ки мои́ недержа́ляе! Был бы я здоро́в, не дава́л бы родну́ю Русь в оби́ду врага́м да разбо́йникам!

    Так и шли дни, кати́лись ме́сяцы…

    Petites nouvelles russes - fleur

    Dans les temps anciens, dans le village de Karacharovo près de la ville de Mourom vivait le paysan Ivan Timoféévitch et sa femme Efrossinia Yakovlevna.

    Ils avaient un fils, Ilya, qu’ils aimaient tendrement, mais ne faisaient que sangloter en le regardant : depuis trente années, Ilya restait allongé près du foyer¹, ne pouvant bouger ni les bras ni les jambes. C’est ainsi qu’il avait grandi alors que son esprit avait gagné en clairvoyance et que son regard s’était fait chaque jour plus perçant. Mais ses jambes ne le portaient pas : elles demeuraient comme des bûches qui reposent immobiles près de l’âtre.

    Couché près du foyer, Ilya entend comme sa mère pleure, comme son soupire son père, combien se lamente le peuple russe : les ennemis attaquent la Vieille Russie², piétinent les champs, tuent les gens, laissant les enfants orphelins. Des brigands rôdent le long des routes, empêchant quiconque d’aller et venir. Le Serpent-dragon qui crache le feu survole tout le pays, enlevant les jeunes filles et les entraînant dans son antre.

    Amèrement, Ilya, entendant tout cela, se plaint de son sort :

    - Oh, vous, mes jambes chancelantes, oh, vous, mes mains impuissantes ! Si j'étais en bonne santé, je ne laisserais pas notre Vieille Russie ainsi insultée par les ennemis et les brigands !

    Ainsi passent les jours, ainsi s’écoulent des mois...

    1- Le texte ici dit précisément qu’Ilya reste allongé ‘sur le poêle’ (на печи). En effet, dans les maisons paysannes russes était disposée une couche au-dessus du foyer, généralement réservée aux vieilles personnes. Voir images d'un foyer traditionnel russe.
    2- Vieille Russie : traduction choisie ici du terme « ‘Rus’ »  (Русь) [prononcé ‘rousse’], correspondant à la Russie médiévale, qui s’est bâtie autour de la Principauté de Kiev (Киевская Русь), fondée aux alentours de l'an 880 par le Varègue (Viking) Oleg le Sage (Олег Вещий). « Rus’ » serait apparenté au finnois ‘Ruotsi’ : la ‘Suède’, et à l’ancien norrois ‘rōþr’ « rameur ». Les Varègues – les Normands de Russie - se désignaient eux-mêmes comme les Rameurs, les Navigateurs, clé de leur succès pour parcourir, en ces époques lointaines, sur leurs navires à fond plat les grands fleuves jusqu’à la Mer Noire.
    Petites-nouvelles-russes - Ilya Mouromet 2
    Byline d'Ilya Mouromets

    Les ‘bylines’, épopées des héros légendaires de la Vieille Russie :

    Une byline (en russe : были́на) est un chant épique en vers qui narre les aventures et hauts faits d'un héros médiéval de la Vieille Russie. Ces chants furent collectés entre le XIX° et la première moitié du XX° siècle auprès de bardes des campagnes des régions périphériques de Russie, essentiellement dans le nord du pays. Composés à des périodes différentes par différents auteurs (mais tous avant le XVIII° siècle), chaque byline relate une aventure particulière vécue par un preux chevalier (bogatyr - богатырь).

    Pour en savoir plus sur les bylines : Lire (en russe).

    Pour en savoir plus et lire des traductions en français de bylines : russievirtuelle.com.