A. Nekrassov – Le capitaine Wrounguel Chapitre 13c

Petites nouvelles russes : Le boa
"Mama mia, quel boa !", illustration d'après Vitold Bordzilovsky (Витольд Бордзиловский)

Les aventures du capitaine Wrounguel
Приключе́ния капита́на Вру́нгеля
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Chapitre XIII - Mama mia, quel boa !

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Episode trois - Тре́тий эпизо́д

Ну, я обернýлся и ви́жу — действи́тельно «мáма»! Удáв, понимáете, огрóмный удáв, мéтров в три́дцать. Свернýлся клубкóм, смóтрит на нас, выбирáет жéртву.

А у меня́ никáкого ору́жия, однá тру́бка в зубáх…

— Фукс, — кричý я, — подáйте-ка что́-нибудь потяжелéе!

Тот вы́сунулся из лю́ка, подаёт какóй-то снаря́д. Я прики́нул — ничегó, увéсистая штýчка.

— Давáйте ещё! — кричý, а сам встал на изгото́вку, наце́лился.

И удáв тóже наце́лился. Рази́нул пасть, как пещéру… Я размахну́лся — и пря́мо тудá.

Да тóлько что удáву такáя пустякóвина? Проглоти́л, понимáете, как ни в чём не бывáло, дáже не помóрщился. Я вторóй снаря́д тудá же, он и егó проглоти́л. Я бро́сился к лю́ку, кричý Фýксу:

— Давáйте скорéе всё, что есть!

И вдруг слы́шу за свое́й спинóй стрáшное шипéние.

Обернýлся, гляжý — удáв раздувáется, шипи́т, из пáсти хле́щет пéна…

— Ну, — дýмаю, — сейчáс бро́сится!

А он, предста́вьте, вме́сто э́того неожи́данно нырну́л и пропа́л.

Мы все за́мерли, ждём. Мину́та прохóдит, вторáя. Пассажи́ры на кормé начина́ют шевели́ться, шéпчутся. Вдруг э́та ба́рышня опя́ть стано́вится в ту же пози́цию и — на всю Амазóнку:

— Ма́ма!..

И вот ви́дим — всплыва́ет над водóй не́что: блестя́щий баллóн огрóмных разме́ров, и всё, зна́ете, пу́хнет, пу́хнет…

Вот, ду́маю, нóвое де́ло! Чему́ бы э́то быть? Да́же стра́шно ста́ло. Пото́м смотрю́ — у э́того баллóна живóй хвост. Бьёт по водé и так и э́так… Я как уви́дел хвост, так всё и по́нял: снаря́ды-то э́ти бы́ли огнетуши́телями. Ну, встрéтились в пищевóде пресмыка́ющегося, столкну́лись там, сту́кнулись друг о дру́га, разряди́лись и накача́ли уда́ва пéной. Там, зна́ете, каки́е давле́ния в огнетуши́телях!

У меня́ страх как рукóй сняло́. Я подошёл к лю́ку.

— Дава́йте, — говорю́, — Фукс, выходи́те наве́рх. Опа́сность минова́ла.

А пассажи́ры как услы́шали, что боя́ться не́чего, бро́сились поздравля́ть друг дру́га, жмут мне ру́ки. То́лько и слы́шно:

— Спаси́бо, профéссор дорогóй! Ка́к это вы егó?

— Да что! — отвеча́ю я. — Здесь, на Амазóнке, ко всему́ привы́кнешь. Уда́в — э́то пустяки́, то ли ещё быва́ет…

Ну и, зна́ете, по́сле э́того слу́чая мой авторите́т укрепи́лся.

Пото́м паруси́шки сооруди́ли из парашю́та, ма́чту поста́вили, сде́лали руль. Пассажи́ры стоя́т ва́хту, плывём, промышля́ем черепа́х, лóвим ры́бку.

Вам, молодóй человéк, не приходи́лось плáвать по Амазóнке? Нет. Вот и прекрáсно, и не стреми́тесь. Не рекомендýю.

А мне, знáете, пришлóсь.

Да. Ну, плывём всё-тáки, продвига́емся кóе-как на востóк, к берегáм Атла́нтики. Мéсяца полторá так плы́ли.

Для любознáтельного путеше́ственника, конéчно, интерéсно, но тяжелó. Пря́мо скажу́: тяжелó!

Petites nouvelles russes - Les voiles écarlates - Grine - Un petit bateau

Et, en effet : "Mama mia !" Devant mes yeux un boa constrictor ! un énorme boa, d'une trentaine de mètres pas moins, qui, lové, nous regarde, choisissant déjà parmi nous lequel sera sa proie.

Et je n'ai aucune arme, juste ma pipe au bec...

Je crie : - Fuchs, trouvez-moi quelque chose de bien lourd !

ll sort la tête de la trappe et me tend une sorte de projectile. Je le soupèse : oui, ça c’est du costaud !

- Encore un autre, Fuchs ! Je me mets en position d’attaque et je vise….

Le boa se dresse aussi en position d’attaque. Il ouvre sa gueule, béante comme une caverne... Alors, je lui balance mon projectile.

Mais pourquoi un boa se soucierait-il d’une si petite chose ? Il l’avale, imaginez-vous, comme un en-cas, sans même grimacer. Je lui lance le second... et il l'engloutit derechef.

Je me précipite vers la trappe et crie de nouveau à Fuchs : - Vite, passez-moi quelque chose d’autre...

C'est alors que j'entends soudain derrière moi comme un terrible sifflement. Je me retourne et vois le boa qui commence à enfler, soufflant et sifflant, alors que de l’écume lui sort par la gueule...

« Eh bien, pensé-je, voilà ma dernière heure ! »

Et, imaginez, au lieu de cela, soudain le monstre plonge et disparaît.

Nous restons tous figés, dans l’expectative. Une minute passe, puis une autre. Les passagers blottis à l'arrière de la cabine commencent à s'agiter, à chuchoter. Soudain, la même jeune femme se dresse comme la première fois et s’écrie à l’adresse de toute l'Amazonie : - Mama mia !...

Et voilà que nous apercevons quelque chose qui flotte au-dessus de l'eau, brillant comme un ballon, un énorme ballon. Et qui gonfle, qui gonfle… Plus effrayant encore.

« Eh bien, voilà autre chose ! me dis-je, mais c’est quoi ça ?! » Regardant attentivement, je vois la queue de ce ballon qui s’agite et frappe l'eau, à droite, à gauche... Aussitôt je comprends tout  : les projectiles que j’ai balancés étaient des extincteurs. Eh bien, gobés par le reptile, dans son œsophage, ils se sont heurtés, cognés et vidés, remplissant ainsi le ventre de l’animal de mousse carbonique. Et savez-vous quelle est la pression d’un extincteur ?

Ma peur s’est envolée comme par magie. Je me suis approché de la trappe : - Allez, dis-je, Fuchs, sortez de votre trou. Il n’y a plus rien à craindre…

Et les passagers, comprenant qu'ils sont hors de danger, se congratulent et se pressent pour me féliciter : - Merci, cher professeur ! Comment avez-vous réussi cet exploit ?

Je leur réponds simplement : - Ici, en Amazonie, on s'habitue à tout. Un boa n'est rien, face à ce qui peut encore arriver...

Eh bien, savez-vous, après cet épisode, mon autorité s’en trouva considérablement renforcée.

Après avoir taillé des petites voiles à partir du parachute, on dresse un mât, on imagine un gouvernail ; les passagers se font matelots. Ainsi, avons-nous descendu l’Amazone, en pêchant et chassant des tortues.

Jeune homme, avez-vous déjà navigué sur le fleuve Amazone ? Non. C’est bien, et ne tentez pas l’aventure. Je vous le déconseille

Moi, voyez-vous, je l’ai fait.

Ainsi avons-nous poursuivi toujours en direction de l’est, vers la côte atlantique. Au fil du courant, un mois et demi.

Pour un voyageur curieux, bien sûr, c’est intéressant, mais difficile. Pour le dire franchement : très difficile !