A. Nekrassov – Le capitaine Wrounguel Chapitre 3f

Les aventures du capitaine Wrounguel
Приключе́ния капита́на Вру́нгеля
Chapitre III – Ecureuils et tempêtes
Episode six- Шесто́й эпизо́д
Ну, с полчаса́ прошли́, отыска́ли норве́жцев, освети́ли раке́тами. Я ви́жу – де́ло дрянь. Вплотну́ю, борт о борт, не ста́нешь – разобьёт. Шлю́пки у них все снесло́, а на конца́х перета́скивать люде́й в таку́ю пого́ду то́же риско́ванно: перето́пишь, чего́ до́брого.
Зашёл с одно́й стороны́, зашёл с друго́й – ничего́ не выхо́дит. А шторм разыгра́лся пу́ще пре́жнего. Как нака́тит на э́то судёнышко волна́, так его́ и не ви́дно совсе́м. Перека́тывает че́рез па́лубу, одни́ ма́чты торча́т… Стоп, ду́маю, э́то нам на́ руку.
Я реши́л рискова́ть. Зашёл на ве́тер, поверну́л овершта́г и вме́сте с волно́й на всех паруса́х пошёл фордеви́нд по́лным хо́дом.
Расчёт тут был са́мый просто́й: у «Беды́» оса́дка небольша́я, а во́лны – как го́ры. Уде́ржимся на гре́бне – как раз и проско́чим над па́лубой.
Ну, зна́ете, норве́жцы уже́ отча́ялись, а я тут как тут. Стою́ на руле́, пра́влю так, что́бы не зацепи́ть за ма́чты, а Лом ло́вит потерпе́вших пря́мо за ши́ворот, сра́зу по дво́е. Во́семь раз так прошли́ и вы́тащили всех – шестна́дцать челове́к во главе́ с капита́ном.
Капита́н немно́жко обиде́лся: ему́ после́днему полага́ется покида́ть су́дно, а Лом в спешке́ да в темноте́ не разобра́л, подцепи́л его́ пе́рвым. Некраси́во получи́лось, коне́чно, ну да ничего́, быва́ет… И то́лько сня́ли после́днюю па́ру, смотрю́ – ка́тит девя́тый вал. Налете́л, у́хнул – то́лько ще́пки полете́ли от несча́стного судёнышка.
Норве́жцы сня́ли ша́пки, стоя́т дрожа́т на па́лубе. Ну, и мы посмотре́ли… Потом разверну́лись, легли́ на курс и пошли́ по́лным хо́дом наза́д, в Норве́гию.
На па́лубе теснота́ – не пове́рнёшься, но норве́жцы ничего́, дово́льны да́же. Да и поня́тно: коне́чно, и те́сно и хо́лодно, а всё лу́чше, чем купа́ться в таку́ю пого́ду.
Да… Вы́ручил, спас норве́жцев. Вот тебе́ и «Беда́»! Для кого́ беда́, для кого́ чуде́сное, так сказа́ть, избавле́ние от ги́бели.
А всё нахо́дчивость! В да́льнем пла́вании, молодо́й челове́к, е́сли хоти́те быть хоро́шим капита́ном, никогда́ не теря́йте ни одно́й возмо́жности, испо́льзуйте всё для по́льзы де́ла, да́же ли́чное недомога́ние, е́сли к тому́ предста́вится слу́чай. Вот так-то!

Enfin, au bout d’une demi-heure environ, nous apercevons le navire norvégien. Nous lançons des fusées éclairantes. Mais l’affaire est mal embarquée. Si on tente de se porter bord à bord, il se brisera. Le vent a emporté ses canots, et vouloir treuiller ces pauvres gens, par un tel temps, est plus que risqué : c’est la noyade assurée.
Je tente une approche à bâbord, puis à tribord – sans succès. Et la tempête rugit plus fort que jamais. A chaque déferlante, le malheureux rafiot norvégien se trouve submergé. Tout roule sur son pont, seuls ses mâts dépassent encore... Halte-là ! je réfléchis et je me dis que c'est ici peut-être notre avantage.
Je décide de prendre un énorme risque. Je flaire le vent, puis je vire hardiment de bord et, saisissant la vague, à toutes voiles je fonce vent arrière.
Le calcul ici était simple comme bonjour : le « Pitoyable » avait un faible tirant d'eau, et les vagues étaient hautes comme des montagnes. En nous tenant sur leur crête, nous allions simplement survoler leur pont.
Alors, imaginez : les Norvégiens dans le plus grand désarroi, et moi, volant à leur secours. Je tiens la barre, je dirige le « Pitoyable » pour ne pas nous empaler sur leur mature, pendant que Lom les saisit, deux par deux, par le col. Et ainsi répète-t-on l’opération huit fois et sauvons tout le monde - seize bonshommes et leur capitaine en tête.
Et, figurez-vous, celui-ci en fut quelque peu offensé ! C’est vrai qu’un capitaine est censé être le dernier à quitter le navire, mais Lom, dans sa hâte et dans le noir, involontairement, l’avait agrippé en premier. Ça ne se fait pas, bien sûr, mais ce sont des choses qui arrivent...
A peine venait-on de sauver les deux derniers rescapés que j’ai vu s’abattre la neuvième vague¹. Elle a déferlé, hurlante, sur le pauvre rafiot et l’a réduit en miettes.
Les Norvégiens qui se tenaient tremblants sur le pont, ont baissé leur chapeau. Tous, nous regardions... Puis nous avons fait demi-tour et mis le cap toutes voiles dehors en direction de la Norvège.
On se trouvait bien à l’étroit sur le pont, collés les uns contre les autres, mais les Norvégiens étaient saufs, et même reconnaissants. Et c’est compréhensible : même s’ils grelottaient et qu’ils devaient se serrer, cela valait mieux pour eux que de patauger dans l’eau, surtout par un temps pareil !
Oui... C’est ainsi que ces pauvres gens ont été sauvés. Voilà ce qu’était véritablement le « Pitoyable » ! Pour certains, un objet de risée, et pour d'autres, promis à une mort certaine, l’instrument de leur miraculeuse délivrance.
Et tout ça grâce à un peu de jugeote ! Dans un voyage au long cours, jeune homme, si vous voulez être bon capitaine, saisissez chaque opportunité, utilisez toutes les ressources pour arriver à bon port, et même, à l’occasion, une légère indisposition. Tenez-le vous pour dit !

