A. Nekrassov – Le capitaine Wrounguel Chapitre 9d

Sur l'iceberg, illustration Mikhail Belomlinski (Михаил Беломлинский)

Les aventures du capitaine Wrounguel
Приключе́ния капита́на Вру́нгеля
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Chapitre IX - La fête de Neptune

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Episode quatre - Четвёртый эпизо́д

Вас, мóжет быть, удиви́т взя́тое мно́ю направлéние? Не удивля́йтесь, взгляни́те на глóбус: идти́ вокрýг свéта вдоль эквáтора дóлго и тру́дно. Мнóгих мéсяцев пути́ трéбует такóй похóд. У пóлюса же вы легкó мóжете хоть пять раз в день обойти́ земну́ю ось круго́м, тем бóлее что и дни там, на пóлюсе, бывáют до шести́ мéсяцев продолжи́тельностью.

Вот мы и стреми́лись к пóлюсу и с кáждым днём спускáлись всё ни́же. Прошли́ умéренные ширóты, прибли́зились к Поля́рному кру́гу. Тут уж, знáете, холодóк даёт себя́ чу́вствовать. И мóре не то: водá сéрая, тума́ны, ни́зкая óблачность. На вáхту выхо́дишь в шу́бе, у́ши мёрзнут, на снастя́х сосýльки.

Одна́ко мы и не ду́мали об отступлéнии. Напрóтив, пóльзуясь попу́тными ветра́ми, мы с кáждым днём спускáлись всё ни́же и ни́же, и я с нетерпéнием ждал тогó момéнта, когдá на горизóнте открóется ледянóй барьéр Анта́рктики.

И вот однáжды Фукс, облада́вший орли́ным зрéнием, неожи́данно воскли́кнул:

– Земля́ на носу́!

Я бы́ло поду́мал, у меня́ и́ли у Лóма нос не в поря́дке. Провёл дáже ладóнью, утёрся. Нет, всё чи́сто.

А Фукс опя́ть кричи́т:

– Земля́ на носу́!

– Мóжет, по́ носу земля́? – говорю́ я. – Так вы, Фукс, так бы и говори́ли. Порá привы́кнуть. Но тóлько не ви́жу я вáшей земли́…

– Так тóчно, по́ носу земля́, – попра́вился Фукс. – Вон там, ви́дите?

– Не ви́жу, признáться, – сказáл я.

Но прошлó ещё с полчасá – и что бы вы ду́мали? Тóчно. Тут уж и я замéтил тёмную полóску на горизóнте, и Лóм замéтил. Действи́тельно, похóже на зе́млю.

– Молодéц, Фукс, – говорю́ я, а сам беру́ бино́кль, приглядéлся и ви́жу – оши́бка! Не земля́, а лёд. Огро́мный áйсберг столпови́дной фóрмы.

Ну, я взял курс пря́мо на негó, и два часá спустя́, сверка́я ты́сячами огнéй в лучáх незаходя́щего сóлнца, áйсберг встал у нас перед но́сом.

Тóчно стéны хрустáльного зáмка, возвышáлись над мóрем голубы́е усту́пы. Хóлодом и ме́ртвенным спокóйствием вéяло от ледяно́й горы́. Зелёные вóлны с рóкотом разбива́лись у её поднóжия. Нéжные облакá цепля́лись за верши́ну.

Я немнóго худóжник в душé. Вели́чественные карти́ны прирóды волну́ют меня́ до чрезвыча́йности. Скре́стив рýки на груди́, я засты́л от изумлéния, созерцáя ледяну́ю громáду.

И вот, откýда ни возьми́сь, тóщий тюлéнь вы́сунул из воды́ свою́ глу́пую мóрду, бесцеремóнно вскара́бкался по склóну, развали́лся на льду и давáй, понимáете, чесáть бокá!

– Пошёл вон, дурáк! – кри́кнул я.

Думáл – уйдёт, а он хоть бы что. Чéшется, сопи́т, нарушáет торже́ственную красоту́ карти́ны.

Тут я не вы́держал и соверши́л непрости́тельный посту́пок, результáтом котóрого едва́ не я́вилось бесслáвное окончáние нáшего похóда.

– Подáть ружьё! – говорю́ я.

Фукс ю́ркнул в каю́ту, вы́нес винтóвку. Я прицéлился… Бац!

И вдруг горá, казáвшаяся незы́блемой тверды́ней, со стрáшным гро́хотом расколóлась пополáм, мóре закипéло под нáми, оскóлки льда загремéли по пáлубе. Áйсберг соверши́л э́такое са́льто-морта́ле, подхвати́л «Беду́», и мы чудéсным óбразом оказáлись на сáмой верху́шке ледянóй горы́.

Ну, потóм стихи́и нéсколько успокóились. Успокóился и я, осмотрéлся. Ви́жу – положéние невáжное...

Petites nouvelles russes - Les voiles écarlates - Grine - Un petit bateau

Vous pourriez vous interroger, jeune homme, sur la direction que je prenais ? Ne soyez pas étonné - regardez le globe terrestre : faire le tour du monde en suivant l'équateur est long et difficile. Un tel périple nécessite plusieurs mois. Alors qu’au niveau des pôles, on peut facilement faire le tour de la Terre et revenir à son point de départ au moins cinq fois par jour¹, d'autant plus que les journées là-bas peuvent durer jusqu'à six mois !

En route donc vers le pôle sud...

Et chaque jour nous descendons de plus en plus bas. Nous quittons les zones tempérées et nous approchons du cercle polaire. Sous ces latitudes, vous savez, le froid devient vif. Et la mer n’est plus la même : l’eau se fait grise, les nuages sont ​​bas et le brouillard épais. Vos oreilles gèlent ; le gréement se charge de glaçons. Et avant de prendre le quart, n’oubliez pas d’enfiler votre chouba² !

Mais jamais nous n’avons imaginé renoncer. Au contraire, profitant des vents favorables, nous descendions chaque jour plus au sud et j'attendais avec impatience le moment où surgirait à l'horizon la banquise antarctique.

Et puis un jour, Fuchs, de sa vue d’aigle, s’exclame soudain : - Terre au bout du nez !

Je pense que c’est soit le nez de Lom, soit le mien qui a une crotte. Je passe même ma main pour m’essuyer. Non, pas de crotte.

Et Fuchs crie à nouveau : - Terre au bout du nez !

- Peut-être voulez-vous dire : terre à vue de nez ? lui dis-je. On a vraiment du mal avec vos tournures de phrases ! Mais je ne vois pas de terre…

- Si, si ! Terre à vue de nez, se corrige-t-il. Là-bas !

Pour être honnête, je ne vois rien.

Mais au bout d’une demi-heure – qu’en pensez-vous ? –, Fuchs avait vu juste. Je remarque une bande sombre à l'horizon, et Lom la voit aussi. Cela ressemble vraiment à la terre ferme.

- Bien joué, Fuchs ! m’exclamé-je, et je prends les jumelles. Mais bien vite, je me rends compte de l’erreur ! Ce n’est pas une bande de terre, mais de la glace. Un énorme iceberg en forme de grand pilier, droit et majestueux.

Eh bien, je me suis dirigé droit dans sa direction, et deux heures plus tard, scintillant de mille lumières sous les rayons d’un soleil de minuit, l’énorme iceberg se dressait là, juste sous notre nez.

Comme les murs d'une forteresse de cristal, ses versants bleutés s'élevaient au-dessus de la mer. De cette montagne de glace se dégageait un froid paisible et mortel. Des vagues virides en rugissant s'écrasaient à ses pieds. De délicats nuages ​​s'accrochaient à son sommet.

Je suis un peu artiste-peintre dans l'âme. Les scènes majestueuses que nous offre la Nature me ravissent à l’extrême. Croisant les bras, je reste saisi, contemplant la gigantesque masse de glace.

Mais voilà que, sorti de nulle part, un phoque décharné sort son stupide museau des eaux et grimpe sur le bord du glacier. Là, imaginez, se prélassant, il commence tout bonnement à se gratter la panse !

- Fiche le camp, bougre d’âne ! lui crié-je.

Je me dis qu’il va replonger, mais peu lui chaut. Ça le démange et je l’entends couiner, venant ainsi gâcher la solennelle beauté de l’instant.

À ce moment-là, je ne peux en supporter davantage et commets alors un geste impardonnable qui aurait pu signifier la fin calamiteuse de notre expédition.

Allez me chercher mon fusil, Fuchs ! dis-je.

Fuchs se précipite dans ma cabine et revient avec. Je saisis l’arme, je vise... et bang !

Et soudain, l’iceberg qui nous paraissait inébranlable se fend par le milieu dans un grondement terrible, la mer bouillonne et, dans un bruit de tonnerre, des éclats viennent s’écraser sur le pont. Le géant de glace fait une sorte de saut périlleux et dans son basculement nous emporte et nous dépose, par je ne sais quel miracle, tout en haut, sur son sommet.

Bon, ensuite tout redevient silence. Me calmant moi-même, je regarde autour et je saisis que la situation, pour de bon, est critique...

1- La circonférence terrestre au niveau de l’équateur est de plus de 40 000 km, tandis qu’au niveau du cercle polaire elle n’est que d’environ 16 000 km, et moins encore plus on s’approche du pôle !
2- Chouba (шуба) : gros manteau de fourrure que portent les Russes durant l’hiver.