A. Nekrassov – Le capitaine Wrounguel Chapitre 8e

Petites nouvelles russes : Fuchs agronome
Fuchs agronome, illustration Valéry Dmitriouk (Валерий Дмитрюк)

Les aventures du capitaine Wrounguel
Приключе́ния капита́на Вру́нгеля
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Chapitre VIII
Autruche, crocodiles et macaroni

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Episode cinq - Пя́тый эпизо́д

Ну, и погна́ли нас на рабо́ту. За день мы наму́чились, проголода́лись. Хорошо́ ещё Фукс запусти́л ру́ку в то́рбу к му́лу, извлёк горсть овса́ — то́лько и пое́ли.

А к но́чи прихо́дит сержа́нт Джу́лико. Пожалéл всё-таки, отблагодари́л за спасе́ние: принёс таре́лку макаро́н из своего́ пайка́.

Неприя́тно принима́ть таки́е пода́чки, но го́лод, как говори́тся, не тётка. Я раздели́л макаро́ны по-бра́тски, отве́дал. Лом — тот отсу́тствием аппети́та никогда́ не страда́л — набро́сился, а Фукс, смотрю́, чва́нится: поню́хал и нос воро́тит.

— Ра́зве э́то макаро́ны? — говори́т он. — Э́то же скве́рная подде́лка. Ай, господи́н сержа́нт, да здесь мо́жно таку́ю макаро́нную планта́цию развести́, что на всю Ита́лию хва́тит! Вы доложи́те полко́внику: я, е́сли уго́дно, сде́лаю о́пытную поса́дочку. У меня́ и расса́да есть — на су́дне оста́лась.

Я глаза́ вы́таращил: до чего́ же врёт па́рень! А Джу́лико э́тот у́ши разве́сил и действи́тельно побежа́л докла́дывать. И что бы вы ду́мали: отда́ли нас в распоряже́ние Фу́кса, отвели́ ему́ уча́сток, принесли́ с «Беды́» макаро́ны, круго́м постáвили карау́л. Сам полко́вник пришёл.

— Сажа́йте, — говори́т, — но смотри́те: обма́нете — шку́ру спущу́!

Я ви́жу — э́тот действи́тельно спу́стит, ну и реши́л предостере́чь Фу́кса.

— Бро́сьте вы э́то де́ло, — шепчу́ я, — ведь ничего́ не вы́йдет, кро́ме неприя́тностей…

А он то́лько руко́й махну́л:

— Бу́дьте поко́йны, Христофо́р Бонифа́тьевич. То́лько ти́хо!

И вот, понима́ете, раскопа́ли мы не торопя́сь
гря́дки. Фукс на виду́ у всех налома́л макаро́ны, посади́л, полива́ет.

И предста́вьте, че́рез три дня взошли́! Сперва́ э́такие зелёные росто́чки, пото́м
листо́чки…

Фукс хо́дит, оку́чивает, расска́зывает италья́нцам:

— Э́то вам не кака́я-нибудь дешёвая подде́лка, э́то натура́льный проду́кт! Вот вы́растут повы́ше, ста́нут в рост челове́ка, тогда́ вы их ко́сите, ли́стья обла́мываете на корм скоту́, а сте́бли броса́ете пря́мо в кастрю́лю, ва́рите — и получа́ете превосхо́дное ку́шанье.

И пове́рили италья́нцы. Да и я, призна́ться, пове́рил. Убеди́тельно. Расту́т ведь. Факт! И вот э́тот полко́вник спра́шивает:

— Нельзя́ ли засе́ять всё по́ле?

— Нет, почему́ же, мо́жно, пожа́луйста, — говори́т Фукс, — то́лько семенно́го материа́ла малова́то. А е́сли ва́ши се́ять, их на́до спи́ртом полива́ть, ина́че не взойду́т.

— Ну что ж, мои́ мо́лодцы полью́т, — говори́т полко́вник и распоряди́лся.

На друго́й день вы́катили цисте́рну спи́рта, вы́сыпали все макаро́ны, что бы́ли, обмолоти́ли, засе́яли и пошли́ полива́ть. Но то́лько, зна́ете, на по́ле немно́го попа́ло, все бо́льше в рот солда́там. Ве́чером и полко́вник при́был, то́же пригуби́л, и тако́е пошло́ весе́лье по всему́ ла́герю: пе́сни, шум, дра́ки начали́сь. А к но́чи взошла́ луна́, ла́герь ути́х, то́лько храп слы́шен по по́лю. А мы скоре́е на бе́рег, на «Беду́». По́дняли паруса́ и пошли́.

— Ну, — говорю́,— Фукс, вам бы агроно́мом быть, а не матро́сом. Как э́то вы дости́гли тако́го соверше́нства? Ведь э́то чу́до, что́бы макаро́ны проросли́.

— Никако́го чу́да, Христофо́р Бонифа́тьевич, про́сто ло́вкость рук, — отвеча́ет Фукс. — У меня́ го́рсточка овса́ оста́лась в карма́не...

Во́т оно как. В о́бщем, благополу́чно ускользну́ли. Ну, а на друго́й день пошёл пря́мо на юг.

Petites nouvelles russes : La fête italienne
Illustration Viktor Bokovnia (Виктор Боковня)

Eh bien, on nous envoya trimer dans les champs. Durant le jour, nous étions épuisés et la faim nous tenaillait. Heureusement que Fuchs avait su glisser habilement sa main experte dans la musette d’avoine d'un mulet et en avait subtilisé une poignée : c’est tout ce que nous avions pour nous sustenter.

Une nuit, le sergent Giulico vient nous voir. Il a pitié de nous et, nous renouvelant sa gratitude de l'avoir sauvé de la noyade, nous tend une assiette de pâtes tirée de ses propres rations.

Il est toujours déplaisant d’accepter l'aumône, mais la faim, cette mégère, nous obligeait. Nous partageons notre plat de pâtes en frères. Je les goûte ; Lom qui ne manque jamais d'appétit, se jette dessus, alors que Fuchs, je le vois, fait le difficile : il renifle le plat et détourne les narines.

Ça, des pâtes ? s’exclame-t-il. Cette bouffe est infecte ! Oh, monsieur le sergent, vous pourriez cultiver ici une telle quantité de macaroni qu'elle suffirait à nourrir toute l'Italie ! Rapportez donc à votre colonel que je suis prêt, s'il en est d'accord, à faire un essai. J'ai quelques semis que je tiens en réserve sur notre bateau.

J'en reste bouche bée : voilà mon bonhomme encore en train de mentir ! Mais à ces mots, les oreilles du sergent se dressent et il court faire son rapport. Et qu'en pensez-vous ? on nous confie à Fuchs, on lui ramène des macaroni du « Pitoyable », on lui attribue une parcelle, parcelle autour de laquelle ils postent des gardes.

Le colonel lui-même intervient : - Allez, plantez-les donc, vos macaroni, dit-il. Mais attention : si vous tentez de m'entourlouper, je vous écorche vif !

Je sens bien qu’il va vraiment le faire, alors je murmure à Fuchs : - Laissez tomber Fuchs, ça ne nous apportera rien que des ennuis…

Lui, me fait juste un signe de la main : - Rassurez-vous, Capitaine, et surtout… motus !

Et donc, représentez-vous, lentement nous creusons des sillons. Fuchs sème ses macaroni à la vue de tous, les plante et les arrose.

Et imaginez, trois jours plus tard, les macaroni avaient germé ! D'abord, de fines pousses vertes, puis des feuilles...

Fuchs, une binette à la main, dit aux Italiens : - Et ce n’est pas de la daube, vous savez, c’est tout ce qu'il y a de plus naturel ! Quand les plants sont matures, aussi hauts qu'un homme, vous les fauchez, ôtez les feuilles qui iront nourrir le bétail, et versez directement leurs tiges dans la marmite pour les cuire, et vous obtenez un excellent plat.

Et les Italiens y ont cru. Et je l’avoue, j’y ai cru aussi. Sérieusement. Après tout, ils poussaient ces macaroni, c'est un fait ! Et le colonel demande : — Est-il possible d’en semer tout un champ ?

- Pourquoi pas, faites donc, dit Fuchs, mais je n'ai pas assez de semis. Et si vous semez vos propres macaroni, vous devrez les arroser d'alcool, sinon ils ne germeront pas.

- Eh bien, mes hommes vont s'en charger, répond le colonel et il fait passer la consigne.

Le lendemain, les voilà qui sortent une citerne d'alcool, y versent leurs provisions de macaroni et malaxent le tout. Après les avoir semés, ils les arrosent de ce même alcool. Mais savez-vous, peu de gouttes ont atteint le sol, la plupart ont fini dans le gosier des soldats...

Le soir, le colonel se joint à eux et boit lui aussi une gorgée ; et la félicité se répand dans tout le camp : des chants, du bruit, jusqu’à ce que des bagarres éclatent. Puis la lune se lève au cœur de la nuit, dans le champ tout n'est plus que silence, seulement rythmé par les ronflements de la soldatesque. Quant à nous, nous en profitons pour nous éclipser, gagnons le rivage, grimpons à bord du « Pitoyable » et mettons les voiles.

- Eh bien, dis-je, Fuchs, vous auriez dû vous faire agronome, pas marin. Comment avez-vous pu réaliser ce miracle, pour que des pâtes germent ?

- Aucun miracle, Capitaine Wrounguel, juste un tour de passe-passe, me répond Fuchs. Voyez-vous, il me restait une poignée d’avoine dans la poche...

Bref, c'est ainsi que nous nous en sommes tirés, sains et saufs. Le lendemain, nous mettions le cap plein sud.

Petites nouvelles russes - Les voiles écarlates - Grine - Un petit bateau