A. Nekrassov – Le capitaine Wrounguel Chapitre 14c

Les aventures du capitaine Wrounguel
Chapitre XIV - L’intouchable capitaine Wrounguel
Episode trois - Тре́тий эпизо́д
Ну, встре́тились, облобыза́лись, попла́кали да́же. Вечеро́к поболта́ли: он [Лом] о свои́х злоключе́ниях рассказа́л, мы — о свои́х.
А с у́тра вы́шибли кли́нья из-под ки́ля, спусти́ли я́хту на́ воду, по́дняли флаг. Я, призна́ться, да́же слезу́ пусти́л. Ведь э́то, молодо́й челове́к, больша́я ра́дость — очути́ться на родно́й па́лубе. Мо́жно дви́гаться сме́ло в дальне́йший путь.
То́лько и оста́лось — отхо́д офо́рмить.
Ну, уж э́то я взял на себя́. Прихо́жу к нача́льнику по́рта, «команда́нте дель ба́хия» по-и́хнему.
И вот э́тот команда́нте, как уви́дел меня́, сра́зу наду́лся, как жа́ба, и приня́лся крича́ть:
— Ах, так э́то вы капита́н «Беды́»? Сты́дно! Тут сплошны́е доно́сы на вас. Вот адмира́л Куса́ки жа́луется: како́й-то о́стров вы там разру́шили, кашало́та оби́дели… И губерна́тор сообща́ет: самово́льно поки́нули порт Па́ра…
— Как же так, — говорю́, — самово́льно? Позво́льте, — и подаю́ свой про́пуск.
А он и смотре́ть не стал.
— Нет, — говори́т, — не позво́лю. Ничего́ не позво́лю. Одни́ неприя́тности из-за вас… Убира́йтесь вон!.. — Пото́м как га́ркнет: — Лейтена́нт! Загрузи́ть я́хту «Беда́» песко́м вплоть до по́лного потопле́ния!
Ну, я ушёл. Заторопи́лся на су́дно. Прихожу́. А там уже́ и песо́к привезли́, и како́й-то чино́вник кру́тится, распоряжа́ется.
— Э́то ва́шу я́хту прика́зано загру́зить песко́м? Так вы, — говори́т, — не беспоко́йтесь, я не задержу́, в одну́ мину́тку сде́лаем…
Ну, призна́ться, я ду́мал, что ту́т-то наверняка́ коне́ц. Пото́нет я́хта, пото́м достава́й. Но, предста́вьте, и тут суме́л испо́льзовать обстоя́тельства в благоприя́тном смы́сле.
— Сто́йте, молодо́й челове́к! — кричу́ я, — Вы́ каки́м песко́м хоти́те грузи́ть? Ведь мне на́до са́харным, пе́рвый сорт.
— Ах, во́т как! — говори́т он, — Ну что ж, пожа́луйста, сию́ мину́тку.
И, зна́ете, те же не́гры побежа́ли, как муравьи́, загрузи́ли я́хту, заби́ли трюм, надстро́йки, на па́лубу навали́ли са́хар, пря́мо в мешка́х.
«Беда́» моя́, бедня́жка, сади́тся глу́бже, глу́бже, пото́м — буль-буль-буль… И гляди́м — то́лько ма́чты торча́т. А пото́м и ма́чты скры́лись.
Лом с Фу́ксом в го́ре глядя́т на ги́бель родно́го су́дна, у обо́их слёзы на глаза́х, а я, напро́тив, в отли́чном настрое́нии.
Приказа́л разби́ть ла́герь тут на берегу́. Пожи́ли мы три дня, а на четвёртый са́хар раста́ял, смо́трим — я́хта на́ша всплыва́ет не торопя́сь.
Ну, мы её почи́стили, помы́ли, подня́ли паруса́ и пошли́.
То́лько вы́шли, смотрю́ — на бе́рег бежи́т команда́нте с са́блей на боку́, кричи́т:
— Не позво́лю!

Laissez-moi vous dire combien nos retrouvailles furent chaleureuses : nous nous sommes embrassés et avons même pleuré. Durant la soirée, Lom nous a raconté ses mésaventures, et nous les nôtres.
Et le matin, nous avons retiré les cales qui retenaient le « Pitoyable », l’avons remis en mer et avons hissé notre pavillon. A ce moment-là aussi, j’ai encore versé une larme. Imaginez, jeune homme, quelle joie de retrouver le pont de notre cher voilier ! Nous pouvions hardiment poursuivre notre périple.
Il ne me restait plus qu’à régler quelques formalités.
Eh bien, j'ai pris ça sur moi et le jour même je me présente à la capitainerie du port, devant le « comandante da bahia » comme on le nomme là-bas.
Et dès que le bonhomme me voit, tel un crapaud, il gonfle de colère et me crie : - Ah, vous êtes donc le capitaine du « Pitoyable » ? Honte à vous ! Je n’ai ici que plaintes et récriminations à votre encontre. Voici celle de l'amiral Kézako qui se plaint que vous ayez détruit une île et gravement offensé un cachalot... Et le gouverneur de Pará qui nous rapporte que vous avez quitté sa ville sans autorisation…
- Comment ça, ‘sans autorisation’ ? Permettez..., lui dis-je, et je lui présente mon sauf-conduit.
Mais il ne prend même pas le temps de le regarder : - Non, vitupère-t-il, je ne permets pas. Je ne permets rien. Vous n'êtes qu’un sac d’embrouilles... Fichez le camp d'ici !… Puis il aboie : Lieutenant ! Qu’on bourre leur navire de poudre et qu’on le fasse sauter !
Bon, je sors et rejoins à bride abattue le « Pitoyable ». Je vois que déjà ils apportent la poudre, sous l’œil d’un fonctionnaire qui donne ses ordres.
— Est-ce votre yacht qu’on doit charger de poudre ? me demande-t-il. Eh bien, ne vous inquiétez pas, ce sera fait sans tarder : juste une minute…
Là, je reconnais avoir pensé que c'était la fin ; que le « Pitoyable » allait définitivement être pulvérisé. Mais, imaginez, même alors, j’ai réussi à retourner la situation à mon avantage.
- Arrêtez, jeune homme ! lui crié-je. Quel genre de poudre chargez-vous ? Ce que j'ai commandé c’est du sucre en poudre. Du sucre de première qualité.
- Ah, c'est donc ça ! dit-il, eh bien, s'il vous plaît, un moment...
Et, vous savez, ces mêmes Nègres qui l’instant avant empilaient de la poudre à canon se sont mis à courir comme des fourmis, emplissant, de la cale au pont, notre voilier de sucre en poudre.
Je vois bien que mon pauvre « Pitoyable » alourdi, s’enfonce de plus en plus, gloub, gloub, gloub... Et, au bout d’un moment, seuls ses mâts dépassent encore. Puis même ceux-ci sombrent jusqu’à disparaître.
Lom et Fuchs, affligés de chagrin, regardent impuissants la mort de notre cher voilier, tous deux ont les larmes aux yeux, alors que moi, au contraire, reste d'excellente humeur...
J’ordonne qu’on s’installe ici, sur le rivage, où nous campons durant trois jours. Le quatrième, le sucre avait fondu, et le « Pitoyable » lentement refaisait surface.
Eh bien, après l’avoir briqué, lavé et astiqué, nous avons hissé les voiles et pris le large.
Sur la berge, une dernière fois, je vois le comandante da bahia qui court, sabre au clair, criant à tue-tête : - Je ne permets pas ! Je ne permets pas !...

