A. Nekrassov – Le capitaine Wrounguel Chapitre 20b

, Illustration Radna Sakhaltouev (Радна Сахалтуев)

Les aventures du capitaine Wrounguel
Приключе́ния капита́на Вру́нгеля
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Chapitre XX - A bride abattue !

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Second épisode - Второ́й эпизо́д

Сло́вом, не успе́ли огляну́ться — грани́ца Аля́ски. Тут шери́фы с винто́вками, с фла́гами…

Я, зна́ете, реши́л притормози́ть: неудо́бно пересека́ть грани́цу без соблюде́ния форма́льностей. Кри́чу:

— Ма́лый ход, стоп!

Куда́ там! Оле́нь мой не смо́трит, не слу́шает, несётся как заводно́й.

Тут оди́н шери́ф взма́хнул платко́м, други́е да́ли залп… Я ду́мал — коне́ц, одна́ко ви́жу — всё благополу́чно. Понесли́сь да́льше. И мину́т э́так че́рез пять обгоня́ем упря́жку, пото́м ещё две упря́жки, пото́м я уже́ и счита́ть переста́л — сто́льких пообгоня́ли. Те торо́пятся, а я рад бы поти́ше е́хать, да не могу́ удержа́ть свою́ па́ру…

И вот открыва́ется Форт Юко́н за поворо́том. Там наро́д столпи́лся на льду. Ма́шут, крича́т, паля́т в во́здух. Сто́лько наро́ду собрало́сь, что не вы́держал лёд, провали́лся.

Толпа́ раздала́сь к берега́м, а у нас пря́мо по но́су огро́мная полынья́, и мы с опа́сной ско́ростью приближа́емся пря́мо к ней. Я ви́жу — де́ло пло́хо. Ну и реши́лся: накрени́л на́рты на́бок, огло́бли слома́лись, я — хлоп в снег со всем экипа́жем, а оле́нь мой с разго́на пря́мо в во́ду, и с соба́кой, со всем.

Могли́ бы и утону́ть, да спаса́тельный круг не дал. Смотрю́ — пла́вают, фы́ркают, отдува́ются…

Тут благожела́тели из пу́блики принесли́ арка́н, зача́лили оле́ня за рога́, потяну́ли… И, предста́вьте, хвалёные рога́ благоро́дного живо́тного отдели́лись без вся́кого труда́, а из-под них вы́глянули коро́тенькие ро́жки, на мане́р коро́вьих! Ну, э́ти, к сча́стью, про́чно держа́лись. За них вы́тащили всю упря́жку на лёд. Оле́нь мой встряхну́лся, полиза́л в ноздря́х, да как замычи́т жа́лобно, как коро́ва.

Я пригляде́лся, ви́жу — коро́ва и есть, то́лько без хвоста́. И поня́тно, почему́ наш оле́нь танцева́л без подко́в, как коро́ва на льду. Обману́ли Ло́ма в Кана́де.

Специали́сты-соба́чники и э́то мне разъясни́ли: Фукс то́же, ока́зывается, попа́л впроса́к: ему́ вме́сто соба́ки молодо́го волчо́нка подсу́нули.

И вот заме́тьте, как интере́сно: волчо́нок сам по себе́, как соба́ка, ничего́ не сто́ит — дрянь, а не соба́ка; коро́ва сама́ по себе́ не оле́нь, а вме́сте как сла́вно получи́лось. Вот тут зако́н а́лгебры как раз подошёл: ми́нус на ми́нус даёт плю́с, как говори́тся. Да...

Ну, когда́ не́сколько улегли́сь стра́сти, вы́яснилась и причи́на столь торже́ственной встре́чи. У них там в э́тот день была́ зи́мняя го́нка, и мы не ду́мали, не гада́ли, а вы́шло так, что пе́рвое ме́сто за́няли.

Ну, доложу́ я вам, и го́нка доста́лась!

Petites nouvelles russes : L'attelage
Un attelage récalcitrant, illustration Viktor Bokovnia (Виктор Боковня)

Bref, avant même de nous en rendre compte, nous avions atteint l’Alaska. Là, à la frontière, il y a des shérifs armés de fusils, agitant des drapeaux...

Bien sûr, je décide de ralentir : ça ne se fait pas de passer d’un pays à un autre comme ça, sans respecter les formalités.

Je tance mon attelage : - Holà... halte-là !

Que nenni ! Mon renne ne regarde rien, n'écoute pas. Il continue sa course, tout simplement, remonté tel un jouet mécanique.

C’est alors qu’un shérif brandit son fanion, que d'autres tirent une salve... Je me dis que c’est la fin des haricots…

Mais heureusement nous nous en tirons et galopons toujours plus loin. Puis, environ cinq minutes plus tard, nous doublons un attelage, puis deux autres, puis je cesse de compter les traîneaux tellement nous en dépassons. Tout ce petit monde m’a l’air bien pressé, tandis que moi, j'aimerais ralentir mais sans pouvoir retenir mes deux vaillants coursiers...

Et puis voilà qu’apparaît Fort Yukon¹ au détour d’un virage. Une foule se presse. Tous agitent les bras, crient et tirent des salves. Il y a tant de gens sur la glace que celle-ci ne peut résister, craque sous le poids et s’affaisse.

La foule s’écarte, et juste devant s’ouvre un trou béant, un abîme vers lequel nous fonçons à bride abattue. Oh là là, je vois que ça va mal tourner !

Eh bien, je me dois de réagir : j’incline le traîneau sur un patin qui, sous la pression, se brise. Et vlan ! tout mon équipage, et moi avec, basculons dans la neige, pendant que notre pauvre renne finit sa course dans l'eau glacée, le chien à sa suite, et tout le reste à l’avenant.

Sans la bouée de sauvetage, nos braves bêtes auraient pu se noyer, et, impuissant, je les vois qui surnagent, soufflent et se débattent…

Mais, heureusement, une bonne âme dans la foule lance un lasso, saisit le renne par ses bois, et tente de le tirer de là... Mais, imaginez, les bois tant vantés du noble cervidé se séparent alors du crâne de l’animal, laissant deviner, dessous, juste deux petites cornes, courtes comme celles d'une vache ! Eh bien, par bonheur, celles-ci ont tenu bon, et tout l’attelage a pu être remonté sur la glace. Mon renne se secoue, se lèche les narines et meugle pitoyablement, comme une veau appelant sa mère.

Je regarde alors l’animal plus attentivement. Pour de bon : je m’aperçois que c’est une vache ! une vache sans queue. C'était clair, à présent, pourquoi notre renne, sans fer aux sabots, patinait sur la glace comme une vache espagnole qui danse le tango. Lom s’était fait avoir !

Et Fuchs aussi s’était fourvoyé ! Des experts en gente canine nous expliquent qu’au lieu d'un chien, les Canadiens lui ont refilé un jeune louveteau.

Et remarquez comme c'est intéressant : un louveteau, à lui seul, en tant que chien, ne vaut pas un kopeck ; une vache seule, en l’occurrence, n’égale pas un renne, mais ensemble, ils forment une jolie paire. Et c’est là que les règles algébriques entrent en jeu : moins par moins égal plus, comme on dit...

Eh bien, lorsque toute cette agitation se fut apaisée, nous apprîmes la raison de tout cet attroupement. A Fort Yukon ce jour-là il y avait un grand rallye hivernal, et c’est bien nous, sans même nous en douter ni le savoir, qui l’avions remporté !

Ah, je vous jure : ce fut-là pour de bon une sacrée course !

1- Fort-Yukon : petite localité d'Alaska d’à peine aujourd’hui 500 habitants.