Vladimir Vyssotski : Le Malheur

 Vladimir Vyssotski - Владимир Высоцкий

Le Malheur (1972) Беда

Я несла свою Беду
по весеннему по льду,
Обломился лёд — душа оборвалася,
Камнем под воду пошла...
а Беда - хоть тяжела —
А за острые края задержалася.

И Беда с того вот дня
ищет по свету меня,
Слухи ходят вместе с ней с Кривотолками.
А что я не умерла,
знала голая ветла
И ещё перепела с перепёлками.

Кто ж из них сказал ему,
господину моему, —
Только выдали меня, проболталися.
И, от страсти сам не свой,
он отправился за мной,
Ну а с ним Беда с Молвой увязалися.

Он настиг меня, догнал,
обнял, на руки поднял,
Рядом с ним в седле Беда ухмылялася...
Но остаться он не мог —
был всего один денёк,
А Беда на вечный срок задержалася...

J'ai porté mon Malheur
sur la glace de printemps,
La glace s'est brisée et mon âme a sombré,
Telle une pierre au fond de l'eau...
mais mon Malheur - pourtant si lourd -
Est resté, s’agrippant à ses bords acérés.

Et le Malheur depuis ce jour
de par le monde me poursuit,
Potins et médisances marchent à ses côtés.
Et que ne suis-je morte,
Seul l'a su le saule aux branches dénudées
Et encore un couple d'étourneaux.

Qui d'entre eux le lui a dit,
à Lui, mon seigneur et mon maître -
Seulement m'ont-ils trahie et dénoncée.
Et lui, fou de passion,
s'est lancé sur mes pas,
Et, à sa suite, rumeurs et malheur.

Il m'a traquée, m'a rattrapée,
m'a étreinte, m’a soulevée,
Pendant que le malheur, narquois, chevauchait à ses côtés...
Il ne demeura avec moi
qu'une petite journée,
Mais le Malheur, lui, depuis s'est attardé éternellement...

Et que ne suis-je morte...’ - Vladimir Vissotski…

J’en mourrai peut-être’ - Guillaume Apollinaire

Il est tentant ici de faire le parallèle entre ce texte émouvant de Vissotski et la naïveté du poème d’Apollinaire : ‘Les cloches’ (1901) - Lire : ici et là, deux femmes disent, pour l’une son malheur, et pour l’autre sa honte, d’avoir aimé, peut-être trop aimé, un amant de passage…

Ecoutez sur Youbube 'Les cloches' mis en musique et interprété par Léo Ferré.

Marina Vlady, la dernière égérie de l’artiste :

Marina et Vladimir se sont connus à Moscou en 1967 alors que le comédien jouait sur la scène du théâtre de la Taganka (театр на Таганке). Ils officialisèrent leur union en 1970 et restèrent unis jusqu’au décès du chanteur en 1980. Lui, citoyen soviétique, longtemps privé de sortie de son pays et elle, Française, ne pouvant se rendre en URSS que sur invitation, munie d’un visa touristique.

Petites nouvelles russes - Marina Vlady
Marina Vlady

Marina est née en France, en 1938, d’une famille russe immigrée, de son vrai nom : Catherine Marina de Poliakoff-Baïdaroff (Екатерина Марина Владимировна Полякова-Байдарова). Son union avec Vladimir Vyssotski offrira au poète l’opportunité de voyager en France. C’est ainsi que lors de ces séjours il enregistrera enfin, en 1977, un premier album trente-trois tours, chose à l’époque, impensable pour lui en URSS.

Lire (en russe) l’histoire de leur rencontre et de leur amour et Voir sur Youtube (en russe, sous-titré en anglais) : ‘Le dernier baiser (Последний поцелуй), réalisé par N. Guguyeva (Н. Гугуева) et A. Kogan (А. Коган), 2007

Vladimir Vissotsky en France :

‘Je respire donc j’aime, j'aime donc je vis…’

En 1976, Vladimir Vissotski obtient enfin l’autorisation de voyager hors d’URSS et se rend aux Etats-Unis, au Mexique et, bien sûr, en France où il donna en 1977 deux récitals. Ci-dessus un des rares interviews de Vladimir Vissotski à la télévision française où il interpréta deux de ses chansons : ‘Ballade d’amour’ (Баллада о любви) et ‘La chasse aux loups’ (Охота на волков).

Petites nouvelles russes - Vladimir Vissotski

‘Le vol arrêté’ : une chanson, un album, un livre mémoire :

En 1987, Marina Vlady publiera ‘Vladimir ou le vol arrêté’ un livre hommage, en mémoire de Vladimir Vyssotski. L’année suivante, en 1988, paraîtra l’album ‘Vlady – Vissotsky’ dans lequel Marina interprétera des chansons du barde soviétique. Ecoutez sur Youtube l'album ‘Vlady – Vissotsky’ dans son intégralitée.

Voici enfin une dernière version du ‘Malheur’ (Беда), interprétée par Nina Troufanova (Инна Труфанова) :

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