• Deux guitares

    Petites nouvelles russes - Les deux guitares - chant tsigane

     Deux guitares - Две гитары

    Aux sources d'une chanson tsigane

    Voici l’histoire d’un air tsigane connu, chanté depuis ‘toujours’ dans les cabarets russes. Une musique venue du fond des âges, fredonnée et transmise par ces populations nomades le long des routes, durant leur longue pérégrination, peut-être venue d’Inde d’où ils seraient originaires.

    Поле, ветер, огоньки,
    Дальняя дорога.
    Ноет сердце от тоски,
    А на душе тревога.

    Эх, раз, да ещё раз,
    Да ещё много, много раз.

    В поле маки да васильки,
    Все они мне любы.
    Васильки - глаза твои,
    Маки - твои губы.

    Васильки - глаза твои,
    Маки - твои губы.
    Я одну тебя люблю,
    А остальных я мучаю.

    Я любил да я страдал,
    Мучился напрасно.
    А теперь любовь ушла.
    Стало всё прекрасно.

    Поговори хоть ты со мной,
    Подруга семиструнная.
    Вся душа полна тобой,
    А ночь такая лунная.

    Что любить? К чему любить?
    Зачем любовь позорить.
    Пей вина, и всë равно -
    Заменишь этим горе.

    Все мы любим кабачок -
    Весело там живëтся.
    Тот, наверное, дурачок,
    Кто там не напьется.

    Две гитары за стеной.
    Жалобно заныли.
    С детства памятный напев...
    Друг мой, это ты ли?

    Что болит да где болит?
    Голова с похмелья.
    Пьëм сегодня, завтра пьëм -
    Скоро уж неделя.

    Ах болит да что болит,
    Болит грудь и ноeт.
    То гитара говорит,
    А басы ей вторят.

    Отчего да почему
    На глазах слезинки?
    Это просто, ничего -
    По любви поминки.

    На горе стоит ольха,
    Под горою вишня.
    Полюбил я девушку -
    Она замуж вышла.

    У меня была жена -
    Она мне изменила.
    Изменила только раз
    А потом решила:

    Эх, раз, да ещё раз,
    Да ещё много, много раз.

    Эх, сидел я на горе,
    Посреди долинки -
    Разорвало сердце мне
    На три половинки.

    Как тебя мне не узнать,
    Страстного веселья?!
    На тебе лежит печать
    Бурного похмелья…

    Перебор, и сердце вновь
    Стонет, замирает,
    Полыхает в жилах кровь,
    Голова пылает.

    Смолкли струны в тишине,
    На сердце тревога,
    Нагадали карты мне
    Дальнюю дорогу.

    Долгий путь в далекий край,
    Да по трактам лунным,
    Ну, в последний раз сыграй,
    Вдарь-ка, брат, по струнам!

    Эх, раз, да ещё раз,
    Да ещё много, много раз.

    La plaine, le vent, des petites lumières
    Au loin et la longue route.
    Le cœur gémit de tristesse,
    Et l’âme est anxieuse.

    Allez, encore une fois,
    Oui : de nombreuses fois…

    Dans la plaine, des coquelicots et des bleuets,
    Tous me sont chers :
    Les bleuets sont tes yeux,
    Les coquelicots sont tes lèvres

    Les bleuets sont tes yeux,
    Les coquelicots sont tes lèvres.
    C’est seulement toi que j’aime,
    Alors que je tourmente toutes les autres.

    J’ai aimé et j’ai souffert
    D’inutiles tourments.
    L’amour à présent s’est enfui
    Et tout est redevenu parfait.

    Parle-moi donc un peu,
    guitare aux sept cordes.
    Toute mon âme est pénétrée par toi,
    Et la nuit s’éclaire d’une lune pleine.

    Quoi aimer ? Pourquoi aimer ?
    Pourquoi l’amour est si déshonorant ?
    Bois du vin : ce sera tout aussi bien,
    Laisse tomber ton chagrin.

    Tous nous aimons les troquets,
    Оn y passe son temps dans la joie :
    C’est un bel imbécile
    Celui qui ne s’y enivre pas.

    Deux guitares geignent derrière un mur.
    Depuis l'enfance, une mélodie inoubliable...
    Mon ami, est-ce toi ?

    Qu’est-ce qui me fait souffrir ?
    Pourquoi souffrir ?
    Mal de tête et gueule de bois.
    Boire aujourd’hui et boire aussi demain –
    Et bientôt toute la semaine.

    Ah ! Souffrir… De ce qui fait souffrir,
    Un cœur en peine, souffrant et gémissant.
    Ainsi parle la guitare,
    Et les basses reprennent son refrain.

    Pour qui et pourquoi ces larmichettes ?
    Ce n’est vraiment pas grand-chose -
    Juste le souvenir
    De la mort d’un amour.

    Sur la montagne ne se dresse qu’un aune,
    Et, plus bas, un cerisier.
    J’ai aimé une fille –
    Mais elle a préféré se marier avec un autre.

    J’ai épousé une femme et puis elle m’a trompé.
    Elle ne m’a trompé rien qu’une fois...
    Et puis elle a recommencé :

    Une fois, et encore une fois,
    De nombreuses, nombreuses fois...

    Alors, je me suis assis sur la montagne,
    Au milieu des vallons -
    Le cœur brisé en trois moitiés.

    Comment ne pas te reconnaître,
    Ô joie pleine de passion ?!
    Tu portes les stigmates
    D’une violente gueule de bois…

    Cette musique...
    Et le cœur à nouveau
    Qui gémit et se fige ;
    Le sang brûle dans les veines
    Et la tête explose.

    Les cordes se sont tues
    Еt mon cœur est anxieux.
    Les cartes m’ont prédit
    Une longue route,

    Un long voyage dans un pays lointain,
    Par des chemins lunaires,
    Alors, une dernière fois, joue, mon frère,
    Fais résonner de toutes tes forces
    Les cordes de ta guitare !

    Allez, encore une fois,
    Oui : de nombreuses fois…

    Si, en ligne, on peut trouver et écouter de nombreuses versions – plus ou moins réussies* – et si leurs paroles répètent plus ou moins le même thème, la même histoire, rien n’indique, en général, qui en est l’auteur et qui en fut le compositeur.

    C’est à cette recherche, tel des explorateurs partant sur la piste improbable d’une origine perdue que nous vous invitons…

    * D'ailleurs, si le cœur vous en dit, vous pouvez vous exercer au Karaoké et ainsi créer votre propre interprétation : Deux guitares version Karaoké - Две гитары (en russe)...

  • Les soirées de Moscou

    Les soirées près de Moscou
    ­
    Подмоско́вные вечера́

    Comme il est difficile de dire ou ne pas dire...

    Musique : Vassili Soloviev-Sédoï (Василий П. Соловьёв-Седой)

    Paroles : Mikhaïl Matoussovsky (Михаил Л. Матусовский)

    ­
    (1955)

    Comme égarée dans un documentaire en l'honneur de la Spartiakade de Moscou en 1956, cette chanson ne devait être qu’un bref ‘entracte’ au milieu d'images sportives...

    Не слышны́ в саду́ да́же шо́рохи,
    Всё здесь за́мерло до утра́.
    Eсли б зна́ли вы, как мне до́роги
    Подмоско́вные вечера́.

    Ре́чка дви́жется и не дви́жется,
    Вся из лу́нного серебра́.
    Пе́сня слы́шится и не слы́шится
    В эти ти́хие вечера́.

    Что ж бы, ми́лая, смо́тришь и́скоса,
    Ни́зко го́лову наклоня́?
    Тру́дно вы́сказать и не вы́сказать
    Всё, что на́ сердце у меня́.

    А рассве́т уже́ всё заме́тнее.
    Так, пожа́луйста, будь добра́.
    Не забу́дь и ты э́ти ле́тние
    Подмоско́вные вечера́.

    Séparateur 3

    Dans le jardin on n'entend ni même un bruissement,
    Tout ici est comme figé jusqu'au matin.
    Si vous saviez combien me sont chères
    Les soirées près de Moscou.

    La rivière coule et ne s’écoule pas,
    Tout argentée de lune.
    On entend une chanson, puis on ne l’entend pas
    En ces soirées tranquilles.

    Eh bien, ma douce, pourquoi ce regard,
    Pourquoi baisser la tête ?
    Comme il est difficile de dire ou de ne pas dire
    Tout ce que j’ai dans le cœur.

    Déjà l’aube se fait plus sensible.
    Alors, je t’en prie, sois gentille.
    N'oublie pas toi non plus ces soirées d’été
    Passées près de Moscou...

    De Leningrad à Moscou, itinéraire d’une chanson :

    Le compositeur, Vassili Soloviev-Sedoï (Василий П. Соловьёв-Седой) (1907-1979), natif de Léningrad, désirait au départ que la chanson s'intitule ‘Les soirées de Leningrad’ (Ленинградские вечера), mais à la demande du ministère soviétique de la culture, la chanson et son titre ‘déménagèrent’ dans ‘Les environs de Moscou’… pour les raisons sportives !

    Vassili Soloviev-Sedoï se ‘rattrapa’ quelque temps plus tard en composant la musique de la chanson ‘La chanson du soir – Ecoute Leningrad’ (Вечерняя песня - Слушай Ленинград…) : Ecouter sur Youtube, sur des paroles d’Alexandre Tchourkine (Александр Дмитриевич Чуркин).

    Une chanson aux paroles ‘bizarres’ pour un film sportif :

    La chanson était une commande destinée à figurer dans un long documentaire en plusieurs parties célébrant la Spartiakade des peuples de l’URSS (Спартакиада народов СССР) qui se déroula en 1956 à Moscou. Comme égarée dans cette ode au sport, avec ces mots en guise d’introduction :‘Et quand vient le soir…’ (А когда наступил вечер…), elle n’était en quelque sorte qu’un bref ‘entracte’ et aurait pu passer inaperçue au milieu de toutes ces images sportives.

    Petites nouvelles russes - Spartakiade
    Spartakiade de 1956 à Moscou

    Spartiakade (спартакиада) : compétition sportive de masse réunissant plusieurs disciplines sportives en URSS ainsi que dans d'autres pays, en particulier du bloc socialiste. La première Spartiakade de Moscou se déroula en 1928. Toujours existantes dans la Russie actuelle, les Spartakiades se voulaient/se veulent le pendant des Jeux olympiques dont fut longtemps – jusqu’en 1952 - privée l’URSS (et aujourd’hui, à nouveau, la Russie, depuis 2021, à la suite d’une affaire de dopage généralisé).

    La chanson et ses paroles ‘bizarres’ où, à la fois, ‘on entend et on n’entend pas’, où ‘la rivière coule et ne coule pas’ et où il est si ‘difficile de dire et de ne pas dire’, fut refusée par l’interprète le plus populaire de l’époque, Mark Bernès (Марк Наумович Бернес). Pourtant, elle connut rapidement le succès populaire, interprétée par le comédien Vladimir Trochine (Владимир Константинович Трошин) (1926-2008).

    Vladimir Trochine (Владимир Трошин), Подмосковные вечера, 1956

    Des ‘Nuits de Moscou’ au ‘Temps du muguet’ :

    Dans les années qui suivirent sa création, la chanson connut un succès international dont témoignent les nombreuses versions en de nombreuses langues.

    En français, une version se voulant proche du texte russe original fut chantée par Georges Ots (Георг Каaрлович Отс). Lire les paroles des 'Nuits de Moscou'.

    Mais la version française la plus connue est incontestablement celle qu'interpréta en 1959 Francis Lemarque : Le Temps du muguet’, dont le titre (et les paroles - lire) s’écartent totalement du sujet initial tout en conservant à l’ensemble son aspect nostalgique…

    Francis Lamarque, Le temps du muguet, 1959

    Mireille Mathieu, artiste célèbre dans l’ex-URSS,  a chanté la chanson, en français et en russe, en concert-live à Moscou en 1987…

  • Kalinka, Katioucha et Kasatchok

    Kalinka (Калинка) par les Chœurs de l'Armée Rouge  - Soliste : Vadim Ananiev
    (Ансамбль Российской Армии имени А.В.Александрова - Солист: Вадим Ананьев)

    Kalinka - Калинка

    Peut-être la chanson russe la plus célèbre...

    Auteur-compositeur : Ivan Larionov

    Aвтор-композитор: Иван Петрович Ларионов

    ­
    (1860)

    Припев:

    Калинка, калинка, калинка моя!
    В саду ягода малинка, малинка моя!

    Ах, под сосною, под зеленою,
    Спать положите вы меня!
    Ай-люли, люли, ай-люли, люли,
    Спать положите вы меня.

    (Припев)

    Ах, сосенушка, ты зеленая,
    Не шуми ты надо мной!
    Ай-люли, люли, ай-люли, люли,
    Не шуми ты надо мной!

    (Припев)

    Ах, красавица, душа-девица,
    Полюби же ты меня!
    Ай-люли, люли, ай-люли, люли,
    Полюби же ты меня!

    (Припев)

    nb. Les paroles russes se jouant allégrement de la place ‘normale’ des accents toniques, j’ai préféré ne pas les faire figurer, ni non plus les ё...

    Petites-nouvelles-russes - viorne

    Refrain :

    Petite baie d’obier, ma petite baie d’obier !
    Dans le jardin, il y a une petite framboise, ma petite framboise !

    Ah ! sous le pin, sous sa verdure,
    Laissez-moi y dormir !
    Qu’il fait bon dormir, dormir, dormir¹,
    Vous m’y allongerez pour y dormir.

    (Refrain)

    Ah, petit pin, toi si vert,
    Ne fais donc pas de bruit au-dessus de moi !
    Qu’il fait bon dormir, dormir, dormir,
    Au-dessus de moi, nul besoin que tu bruisses !

    (Refrain)

    Ah, la belle, chère jeune fille,
    Tombe donc amoureuse de moi !
    Qu’il fait bon dormir, dormir, dormir,
    Sois donc amoureuse de moi !

    (Refrain)

    1- Ici les paroles russes répètent quatre fois : ‘Liouli’ (люли) un mot semble-t-il dérivé de ‘lioulka’ (люлька) : un berceau en osier. La chanson n’ayant rien d’une berceuse, j’ai repris ici en traduction les mots de ‘Auprès de ma blonde’ : ‘qu’il fait bon dormir’...
    Petites-nouvelles-russes - Иван Петрович Ларионов
    Ivan Larionov (Иван Петрович Ларионов), 1830-1889

    Voici une petite chanson bien russe, peut-être la plus célèbre entre toutes hors de Russie, que les Russes adorent reprendre en chœur en tapant dans leurs mains.

    Cet air qui semble tout droit sorti des campagnes profondes, telle une chansonnette paysanne sans âge, n’a pourtant au départ rien de proprement folklorique. Elle fut écrite et composée en 1860 par Ivan Larionov (Иван Петрович Ларионов) (1830-1889), compositeur, écrivain, folkloriste, musicologue et chef de chœur. Il se serait, pour la musique, inspiré d’un chœur de l’opéra ‘Gromoboï’ (Громобой) du compositeur Alexeï Verstovsky (Алексей Николаевич Верстовский) (1799-1862) écrit quelques années plus tôt. On ne trouve, à ma connaissance, aucun extrait de cet air original sur le Net. (Voici, peut-être, ce qui pourrait s’en rapprocher : une interprétation symphonique : Ecouter sur Youtube.)

    Quant aux paroles, naïves et simples, elles ont donné lieu à diverses interprétations. Ainsi, la baie de l’obier, la viorne (калина), évoquerait l’amour triste tandis que la framboise (малина) l’amour heureux. A chacun de s’en faire une idée…

    Pour en savoir plus : Comment Kalinka est devenue la chanson russe la plus populaire.

    En 1962, Les Compagnons de la Chanson interprètent une version française sur un arrangement de Miguel Barrios et Jean Broussolle.

    Katioucha - Катю́ша

    Une chanson bien innocente...

    Auteur : Mikhaïl Issakovsky - Автор слов: Михаил Исаковский

    Compositeur : Matveï Blanter - Композитор: Матвей Блантер

    ­
    (1938)

    Расцвета́ли я́блони и гру́ши,
    Поплыли́ тума́ны над реко́й.
    Выходи́ла на́ берег Катю́ша,
    На высо́кий бе́рег на круто́й.

    Выходи́ла, пе́сню заводи́ла
    Про степно́го си́зого орла́,
    Про того́, кото́рого люби́ла,
    Про того́, чьи письма́ берегла́.

    Ой ты, пе́сня, пе́сенка деви́чья,
    Ты лети́ за я́сным со́лнцем вслед:
    И бойцу́ на да́льнем пограни́чье
    От Катю́ши переда́й приве́т.

    Пусть он вспо́мнит де́вушку просту́ю,
    Пусть услы́шит, как она́ поёт,
    Пусть он зе́млю бережёт родну́ю,
    А любо́вь Катю́ша сбережёт.

    Расцвета́ли я́блони и гру́ши,
    Поплыли́ тума́ны над реко́й.
    Выходи́ла на бе́рег Катю́ша,
    На высо́кий бе́рег на круто́й.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    Les pommiers et poiriers fleurissaient,
    De la brume flottait sur la rivière.
    Katioucha est apparue,
    Sur la rive haute et escarpée.

    En sortant, elle a commencé à chanter
    Une chanson parlant de l'aigle bleu des steppes,
    Une chanson à propos de celui qu’elle aimait,
    De celui dont elle a conservé les lettres.

    O toi, chanson, chansonnette de jeune fille,
    Envole-toi après le clair soleil :
    A celui qui combat sur la lointaine frontière
    Porte-lui le bonjour de Katioucha.

    Qu'il se souvienne d'une jeune fille simple,
    Qu’il puisse entendre comme elle chante,
    Qu'il prenne soin de notre terre natale,
    Et Katioucha saura conserver leur amour.

    Les pommiers et poiriers fleurissaient,
    De la brume flottait sur la rivière.
    Katioucha est apparue,
    Sortant sur une rive haute et escarpée.

    Composée en 1938 alors que se profilait la guerre à venir, la chanson évoque les combats, la séparation du soldat d’avec la fille qu’il a dû quitter, laissée loin derrière lui au pays. Une fille qui saura l’attendre et conserver leur amour. Katioucha devint durant la Grande guerre patriotique (1941-1945) ‘la’ chanson chère au cœur des soldats soviétiques, à l’instar de la célèbre ‘Lili Marleen’ allemande ou de ‘La Madelon’ pour les Poilus de la Première guerre mondiale.

    Voici une version enregistrée par les Chœurs de l’Armée Rouge...

    Petites-nouvelles-russes - Les orgues de Staline
    Katioucha : Les orgues de Staline

    Les orgues de Staline...

    Si Katioucha (Катюша) est le diminutif affectif du prénom Katia (lui-même diminutif d’Ekaterina), elle deviendra, au pluriel, durant la Grande guerre patriotique, le surnom donné par les Soviétiques à ce que les troupes allemandes nommeront de leur côté ‘les orgues de Staline’ (Stalinorgel) : des batteries de lance-roquettes multiples destinées aux tirs de barrage contre l’ennemi.

    Katioucha, comme hymne russe de substitution ?

    Au-delà des paroles, qui somme toute restent bien innocentes, la chanson Katioucha est aujourd’hui chargée en Russie et alentour d’une forte connotation politique, patriotique, voire ‘nationaliste’. Ainsi, en 2021, la Russie demande au Tribunal arbitral du sport (TAS) de pouvoir jouer la chanson en lieu et place de l’hymne russe, interdit lors de toute compétition internationale - à l’époque, à cause des sanctions pour cause de dopage généralisé des athlètes soviétiques – pardon : russes. Demande qui fut rejetée. Lire : '«Katioucha» ne peut pas remplacer l’hymne russe'.

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    * * *

    Petites-nouvelles-russes - Kasatchok, Boris Roubachkine
    Kasatchok, Boris Roubachkine (Борис Рубашкин)

    Kasatchok - Казачо́к

    Auteur : Boris Roubachkine

    Автор слов: Борис Семёнович Рубашкин

    Sur la mélodie de Matveï Blanter
    (Матвей Блантер)

    Казачо́к, Казачо́к,
    Казачо́к, Раз, два, три!

    Как услы́шу "Казачка́" я зву́ки,
    На душе́ стано́вится легко́
    Забыва́ю ско́рби я и му́ки,
    Ах, друзья́, как э́то хорошо́!
    Забыва́ю ско́рби я и му́ки,
    Ах, друзья́, как э́то хорошо́!

    Припе́в:

    "Казачо́к" - подпрыгива́ют но́ги,
    Ах, Таню́ша, как ты хороша́!
    "Казачо́к" танцу́ем без трево́ги,
    Ах, Таню́ша, ми́лая, целу́й меня́!

    Раз, два, три!
    Казачо́к, казачо́к,
    Казачо́к, раз, два, три!

    С "Казачко́м" живётся веселе́е,
    А с буты́лкой - ещё веселе́й!
    Эй, бра́ток, нале́й-ка поскоре́е,
    Во́дочки, нале́й, нале́й, нале́й!
    (Два ра́за)

    (Припе́в)

    Раз, два, три!

    (Инструмента́льная мелодия : Эй, у́хнем!)

    Как услы́шу "Каза́чка" я зву́ки,
    На душе́ стано́вится легко́
    Забыва́ю ско́рби я и му́ки,
    Ах, друзья́, как э́то хорошо́!
    Забыва́ю ско́рби я и му́ки,
    Ах, друзья́, как э́то хорошо́!

    (Припе́в два ра́за)

    Ла, ла, ла, дава́й Ва́ня,
    Кружи́ нале́во, а напра́во немно́го!
    Ха-ха-ха...
    Хоп! Хоп! Хоп! Хоп! Хоп!..

    Petites-nouvelles-russes - Kasatchok 2

    Danse cosaque, cosaque,
    Cosaque, Un, deux, trois !

    Quand j'entends cette danse cosaque,
    Je me sens l’âme légère,
    J'oublie chagrins et tourments,
    Oh, les amis, comme c'est bon !
    J'oublie chagrins et tourments,
    Oh, les amis, comme c'est bon !

    Refrain:

    Danse cosaque - mes jambes font des bonds,
    Oh, Tanioucha¹, comme tu es douce !
    Danse cosaque - on danse sans souci,
    Oh, Tanioucha, ma chérie, embrasse-moi !

    Un deux trois !
    Danse cosaque, cosaque,
    Cosaque, un, deux, trois !

    La vie est plus amusante accompagnée d’une danse cosaque,
    Et avec une bouteille elle est plus drôle encore.
    Hé, frère, verse-moi vite
    Une petite vodka, verse, verse, verse !
    (bis)

    (Refrain)

    Un deux trois !

    (Instrumental sur le thème des ‘Bateliers de la Volga’)

    Quand j'entends cette danse cosaque,
    Je me sens l’âme légère,
    J'oublie chagrins et tourments,
    Oh, les amis, comme c'est bon !
    J'oublie chagrins et tourments,
    Oh, les amis, comme c'est bon !

    (Refrain deux fois)

    La, la, la, allez Vania,
    Danse et tourne un peu à gauche et puis à droite !
    Ha, ha, ha...
    Hop ! Hop ! Hop ! Hop ! Hop !

    1- Tianoucha (Танюша)  et le  diminutif affectif de Tatiania.
    Petites-nouvelles-russes - Kasatchok
    Kasatchok, hop ! hop ! hop !

    La chanson 'Katioucha' connaîtra une nouvelle popularité internationale à la fin des années 60, sous le titre ‘Kasatchok’ (Казачок) – La danse cosaque – réarrangée et interprétée par Boris Roubachkine (Борис Семёнович Рубашкин) (1932-2022), chanteur d'opéra (et de variétés) naturalisé autrichien, né à Sofia en Bulgarie dans une famille de Cosaques du Don qui avait fui l'URSS lors de la Guerre civile.

    La notoriété de ses reprises des airs russes populaires lui permit, en 1989, d’être le premier des chanteurs auparavant interdits de scène en URSS à donner une série de concerts à Moscou.

    Lire (en russe) : ‘Bravo, Mister ‘Kasatchok’ !

    En 1969, la chanteuse Rika Zaraï (dont le père était russe) en offre une version française, sous le même titre : ‘Kasatchok’, sur des paroles de Tony Perdone.

  • Plaine ma plaine

    Plaine, ma plaine - По́люшко-по́ле

    Encore un grand classique du folklore russe ?

    Musique : Lev Knipper (Лев Константинович Книппер)

    Paroles : Viktor Goussev (Виктор Михайлович Гусев)

    ­
    (1934)

    Cette chanson, qui semble surgir tout droit du folklore éternel et des immenses plaines de Russie, a été composée bien tardivement, au XX° siècle, en 1934. A l’origine chant symphonique, elle est devenue rapidement populaire. De nombreuses fois reprise et interprétée, la plupart des Russes (et des étrangers) en ignorent l’origine.

    По́люшко-по́ле, по́люшко, широ́ко по́ле,
    Е́дут по́ полю геро́и,
    Эх, да кра́сной а́рмии геро́и.

    (Оригина́льная ве́рсия:

    По́люшко-по́ле,
    По́лю́шко, широ́ко по́ле.
    Е́дут по́ полю ребя́та,
    Эх, да молоды́е партиза́ны.)

    Де́вушки пла́чут,
    Де́вушкам сего́дня гру́стно,
    Ми́лый надо́лго уеха́л,
    Эх, да ми́лый в а́рмию уеха́л.

    Де́вушки, гля́ньте,
    Гля́ньте на доро́гу на́шу,
    Вьётся да́льняя доро́га,
    Эх, да развесёлая доро́га.

    То́лько мы ви́дим,
    Ви́дим мы седу́ю ту́чу,
    Вра́жья зло́ба из-за ле́са,
    Эх, да вра́жья зло́ба, сло́вно ту́ча.

    Эх, де́вушки, гля́ньте,
    Мы врага́ приня́ть гото́вы,
    На́ши ко́ни быстроно́ги,
    Эх, да на́ши та́нки быстрохо́дны.

    Эх, пусть же в колхо́зе
    Дру́жная кипи́т рабо́та,
    Мы дозо́рные сего́дня,
    Эх, да мы сего́дня часовы́е.

    Де́вушки, гля́ньте,
    Де́вушки, утри́те слёзы.
    Пусть си́льнее гря́нет пе́сня,
    Эх, да на́ша пе́сня боева́я!

    Petites nouvelles russes - Etoile rouge

    Plaine, ma plaine, chère plaine, immense plaine,
    Par la plaine s’en vont les héros,
    Ah ! Les héros de l'Armée rouge.

    (Version originale :

    Plaine, ma plaine,
    Chère plaine, immense plaine,
    Par la plaine s’en vont les braves gars,
    Ah ! Les jeunes partisans)

    Les jeunes filles pleurent,
    Les jeunes filles aujourd’hui sont tristes,
    Leurs tendres pour longtemps sont partis,
    Ah ! Leurs tendres à l'armée sont partis.

    Jeunes filles, regardez,
    Regardez notre route,
    La route serpente au loin.
    Ah ! La joyeuse route !

    Seulement nous voyons,
    Nous voyons un nuage gris.
    L'hostilité ennemie vient de la forêt.
    Ah ! L'hostilité ennemie, pareille à un nuage.

    Eh ! Jeunes filles, regardez !
    Nous sommes prêts à recevoir l’ennemi !
    Nos chevaux ont le pied alerte,
    Ah, nos chars sont si rapides !

    Ah, que donc dans le kolkhoze,
    Le travail batte son plein dans l’amitié,
    Nous patrouillons aujourd’hui,
    Ah ! Aujourd'hui, nous montons la garde.

    Jeunes filles, regardez !
    Jeunes filles, essuyez vos larmes.
    Que notre chanson retentisse plus fort,
    Oh, oui, notre chanson de combat !

    A l’origine, un chant symphonique :

    Sur des paroles du poète et dramaturge Viktor Goussev (Виктор Михайлович Гусев) 1909-1944, la chanson était initialement destinée au premier mouvement de la quatrième symphonie du compositeur Lev Knipper (Лев Константинович Книппер) 1898-1974, intitulée ‘Poème à un jeune combattant du Komsomol’ («Поэма о бойце-комсомольце»). Très vite cet hymne à la jeunesse communiste soviétique connut le succès et fut dissocié de l’œuvre symphonique.

    Lev Knipper, Quatrième symphonie, premier mouvement :
    Poème à un jeune combattant du Komsomol’ («Поэма о бойце-комсомольце»), 1934.

    Petites nouvelles russes - plaine, ma plaine
    Poème à un jeune combattant du Komsomol

    Comme de nombreux airs populaires russes (ou chansons de l’époque soviétique), il existe plusieurs versions aux paroles chaque fois légèrement différentes, exaltant là les ‘jeunes soldats du Komsomol’ (version originale), ailleurs ‘les héros de l’Armée Rouge’ (la plus courante), ‘ceux de l’Armée russe’, ou ‘les héros du passé’, voire la lutte contre 'les bandes rouges’ (!). Lire (en russe) le poème original de Viktor Goussev.

    Pour en savoir plus, lire et écouter (en russe) : Plaine, ma plaine - histoire d'une chanson.

    Un hymne en l’honneur des combattants de la Jeunesse communiste :

    Petites nouvelles russes - Les jeunes communistes
    'En avant, les jeunes communistes, en avant !

    Komsomol (Комсомол : Коммунистический союз молодёжи) est le nom courant que portait l'organisation de jeunesse du Parti communiste de l'Union soviétique, fondée en 1918 et qui disparut en 1991, après la dislocation de l'URSS. Son nom officiel était : ‘Union de la jeunesse communiste léniniste de toute l'Union’ (Всесоюзный ленинский коммунистический союз молодёжи — ВЛКСМ).

    De cette organisation étatique étaient issus, une fois adultes, nombre des membres du Parti communiste soviétique. Un garçon membre du Komsomol était un ‘komsomolets’ (комсомолец) et une fille une ‘komsomolka’ (комсомолка). Ils étaient l’élite de la jeunesse soviétique et en étaient conscients.

    (Pour mémoire, 'Plaine, ma plaine' (Полюшко-поле) est aussi le titre d'un long-métrage soviétique réalisé en 1956 par Vera Stroeva (Вера Павловна Строева), un mélodrame se déroulant dans un kolkhose. Une toute autre histoire donc, où l'on n'entend jamais le chant si célèbre. Visionner le film 'Plaine, ma plaine' (Полюшко-поле) sur Youtube.)

    Voici, enfin, de ce ‘grand classique du folklore russe’, une version française de 'Plaine, ma plaine' sur des paroles de Francis Blanche - 1945 (Lire)

  • Le chant des Partisans

    "Elle fit de son talent une arme pour la France"
    Charles de Gaulle

    "Свой талант Вы превратили в оружие для Франции"
    Генерал Шарль де Голль

    Petite histoire d’une chanson :

     

    Le chant des Partisans

    Марш Партизан

    Voici l’histoire d’une autre chanson, une petite histoire qui résonne au cœur de la grande Histoire. Son titre est presque identique à celui de l’Hymne des Partisans (soviétiques). Une proximité de nom – et de destinée – peut-être pas si fortuite…

    Directement inspirée, à son auteure-compositrice, Anna Marly, par la résistance des soldats russes de Smolensk durant la Seconde guerre mondiale, ses paroles furent écrites, à l’origine, en russe, avant de devenir le chant de ralliement de la Résistance française qui luttait alors contre l’occupant nazi.

    Марш Партизан

    От леса до леса
    Дорога идёт
    Вдоль обрыва,

    А там высоко
    Где-то месяц плывёт
    Торопливо

    Пойдём мы туда,
    Куда ворон не влетит,
    Зверь не входит

    Никто, никакая сила
    Нас не покорит,
    Не отгонит

    Народные мстители,
    Мы отобьём
    Злую силу

    Пусть ветер свободы
    Засыплет
    И нашу могилу…

    Пойдём мы туда
    И разрушим до конца
    Вражьи сети

    Пусть знают, как много
    За правду нас легло,
    Наши дети!...

    La marche des Partisans

    De forêt en forêt
    La route longe
    Le bord du précipice.

    Et loin, tout en haut,
    Là où vogue
    Hâtivement, un croissant de lune

    Nous irons.
    Là où le corbeau ne volera pas,
    Là où la bête n’entrera pas

    Personne, aucune force,
    Ne nous soumettra,
    Ne nous chassera.

    Nous, les vengeurs du peuple,
    Ferons reculer
    La force maléfique.

    Dût-ce le vent
    De la liberté recouvrir
    Aussi nos tombes,

    Là-bas nous irons
    Et nous détruirons
    Les pièges et les rets de l'ennemi.

    Et que nos enfants sachent
    Combien d’entre nous
    Sont tombés pour la Vérité

    Petites nouvelles russes - Portrait d'Anna Marly
    Tableau d'Anna Marly par Xenia

    Anna Marly (de son nom complet Anna Iourievna Smirnova-Marly - en russe : Анна Юрьевна Смирнова-Марли) s’appelait à l’origine Anna Betoulinskaïa (Анна Юрьевна Бетулинская). Elle naquit en 1915 à Pétrograd. En 1918, pendant la Révolution russe son père sera fusillé. Elle quittera sa terre natale pour rejoindre la France au début des années 1920 avec sa mère, sa sœur et sa gouvernante.

    Quelques années plus tard, elle prend le nom d'Anna Marly (patronyme qu'elle trouve dans l'annuaire) et deviendra danseuse au sein de la compagnie des Ballets russes. Ensuite elle entame une carrière de chanteuse et se produira dans les grands cabarets parisiens.

    En mai 1940, elle connaît un nouvel exode qui la mène, via l'Espagne et le Portugal, à Londres. En 1941, elle s'engage comme cantinière au quartier général des Forces françaises libres.

    En même temps, elle continue, à Londres, à chanter et se produire sur scène. Cette année-là, elle compose la musique de La marche des Partisans (Марш Партизан), ou ‘Guerilla’s Song’ sur laquelle elle rajoute ses propres paroles, dans sa langue maternelle.

    A la même époque, en URSS, est créée la chanson Les partisans' (Партизаны) - 1943 : Ecoutez sur Youtube.

    Dire qu’Anna Marly connaissait ce chant des Partisans soviétiques, cela paraît plausible. S’en est-elle inspirée ? Peut-être...

    Parfaitement bilingue, voici comment elle présente les circonstances de cette création  dans sa langue maternelle :

    Faite Chevalier de l'ordre national du Mérite et Chevalier de la Légion d'honneur, Anna Marly décèdera en 2006 en Alaska… peut-être pour reposer plus près de sa Russie natale !

    ***

    Le Chant des Partisans

    Version française de Joseph Kessel et Maurice Druon (1943)

    Petites nouvelles russes - Joseph Kessel
    Joseph Kessel

    En 1943, la mélodie du Chant des Partisans (ou Chant de la Libération) est choisie comme indicatif musical d’une émission de la France libre diffusée par la BBC destinée aux Français de l’intérieur. Sifflé pour échapper au brouillage de l’ennemi, cet air deviendra, avec des paroles françaises écrites par Joseph Kessel - également d’origine russe* - et Maurice Druon, l’hymne de la Résistance française et le signe de reconnaissance dans les maquis.

    * Joseph Kessel - en russe : Жозеф (Иосиф) Кессель - (1898 – 1979) était fils d’une famille juive de Lituanie – à l’époque, partie intégrante de la Russie impériale. Il vécu quelques années de son enfance à Orenbourg (en russe : Оренбург), ville située sur le fleuve Oural, avant que sa famille ne vienne immigrer en France.

    Le Chant des Partisans

    Ami, entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines ?
    Ami, entends-tu les cris sourds du pays qu’on enchaîne ?
    Ohé partisans, ouvriers et paysans, c’est l’alarme !
    Ce soir l’ennemi connaîtra le prix du sang et des larmes.

    Montez de la mine, descendez des collines, camarades,
    Sortez de la paille les fusils, la mitraille, les grenades;
    Ohé les tueurs, à la balle et au couteau tuez vite !
    Ohé saboteur, attention à ton fardeau, dynamite !

    C’est nous qui brisons les barreaux des prisons, pour nos frères,
    La haine à nos trousses, et la faim qui nous pousse, la misère.
    Il est des pays où les gens aux creux des lits font des rêves
    Ici, nous, vois-tu, nous on marche et nous on tue nous on crève

    Ici chacun sait ce qu’il veut, ce qu’il fait quand il passe ;
    Ami, si tu tombes, un ami sort de l’ombre à ta place.
    Demain du sang noir séchera au grand soleil sur les routes
    Chantez, compagnons, dans la nuit la liberté nous écoute.

    Песнь Партизан

    Мой Друг, слышишь ты как летят чёрныe стаи над нами?
    Мой Друг, слышишь ты стоны нашей страны что страдает?
    Тревога! Вставай партизан, крестьянин и рабочий,
    И крови, и слёз мы врагу уж сегодня пророчим,

    Из шахты шахтёр и с полей крестьянин уже с нами,
    Из укрытий возьмём ружья мы для борьбы со врагами,
    Боец, убивай же врага как ножом, так и пулей,
    Вложи динамит под проклятый осиный их улей,

    Сорвём мы решётки с темниц, где заточены братья,
    Пройдём сквозь пургу, сквозь туман, сквозь ненастья,
    Есть страны, где люди в постелях спокойно мечтают,
    У нас, кто в бою, кто на марше в крови умирает,

    Но каждый из нас твёрдо знает, зачем он встал с нами,
    Друг, знай коль падёшь, мы продолжим борьбу со врагами,
    Вот сушиться чёрная кровь, а наш враг уж не дышит,
    Споём же, друзья, этой ночью свобода нас слышит!

    Le chant des partisans a été enregistré par les plus grandes vedettes françaises, d’Yves Montant à Mireille Mathieu, de Léo Ferré à Johnny Hallyday… Et aussi par les Chœurs de l'Armée rouge !

    Petites nouvelles russes - Les Chœurs de l'Armée rouge - Le Chant des Partisans

    Voici, enfin, une version plus récente dû au groupe Zebda ! (Chacun appréciera…)

  • Par les vallées et les collines – fin

    Photo : 1939 : miliciens en arme dans une rue de Barcelone pendant la Guerre civile espagnole

    Petite histoire d’une chanson :

     

    Par les vallées et les collines

    По долинам и по взгорьям

    Fin

    Un chant devenu international

    Cette chanson connut une diffusion internationale, célébrant (un peu) l’héroïsme des armées blanches, (beaucoup) les partisans communistes, et, parfois,… d’autres luttes et d’autres héros.

    Dès 1934, il existe une version allemande ‘rouge’, d’abord portée par les Socio-démocrates, puis reprise, après-guerre en Allemagne de l’Est – sous le titre : "Partisanen vom Amur" - lire le texte en allemand  et sa traduction... en russe. Rappelons-nous que Karl Marx et Friedrich Engels étaient tous deux natifs germaniques...

    En 1937, l’année même où Piotr Parfionov, l’auteur putatif de la version pro-bolchevique, fut exécuté par ordre de Staline, le chant était repris par les partisans espagnols qui combattaient le régime franquiste sous le titre "El Himno del Guerrillero". Différentes versions du texte (en espagnol) ont été rajoutées sur cet air, décidément très inspirateur ! Lire le texte en espagnol .

    Diffusée après la Seconde guerre mondiale dans l'ensemble des pays du 'Bloc de l'Est', la version rouge fut traduite en de nombreuses langues.

    Voici celle, en serbe (ou en croate - je vous laisse choisir), qu'on fredonnait dans la défunte Yougoslavie...

    La version ‘rouge’ reste encore aujourd’hui très appréciée... en Corée (du Nord, bien entendu). Les paroles sont sous-titrées en coréen : je vous laisse le soin de les traduire…

    En France : ‘Par les vallées et les collines’

    en blanc, rouge et noir...

    Une version française fut écrite dans les années soixante qui rend hommage aux Russes blancs anti-communistes, avant qu’elle ne passe dans le florilège des scouts, de certaines troupes d’élite et de quelques royalistes nostalgiques…

    7. Les partisans blancs

    (Nota : on y parle ici de Dénikine : Le général Anton Dénikine, chef d'état-major dans les armées impériales pendant la Première Guerre mondiale et commandant en chef de l'Armée des Volontaires – ‘blancs’ - pendant la guerre civile russe.)

    De leur côté, les ‘Rouges’ déclament une autre version qui honore les partisans de Lénine (dans cette adaptation, Dénikine cède la place au Grand Lénine – ça rime !). La voici chantée par Catherine Ribeiro et les Chœurs de l’Armée Rouge en 1976 .

    Après les versions ‘blanche’ et ‘rouge’, il fallait bien une version ‘noire’ – c’est-à-dire anarchiste. Voici celle d’Etienne Roda-Gil (1968), un fils d’exilés catalans, parolier libertaire et proche du mouvement anarchiste : La Makhnovchtchina, écrite en mémoire des troupes de Nestor Makhno, commandant pendant la Guerre civile l’Armée Révolutionnaire Insurrectionnelle Ukrainienne qui combattit à la fois les forces bolcheviques et celles des Russes blancs. Pas de chance (pour les Anarchistes  et peut-être pour les Ukrainiens), elle fut défaite par les Rouges et Maxhno mourut en exil...

    Leur slogan, « Mort à tous ceux qui font obstacle à la liberté des travailleurs » (Смерть всім, хто на перешкоді добутья вільності трудовому люду en ukrainien), en dit long sur leurs intentions...

    A l’époque, une version, semble-t-il, aurait existé en langue ukrainienne, sans qu’il n’en soit restée de traces. La version française a depuis été traduite (lire la traduction de La Makhnovchtchina en russe) Retour à l’envoyeur, en quelque sorte !

    © 19.07.2009 владимир платоненко

    Voici, enfin, pour nos amis Corses (parfois un peu nationalistes), une version plus insulaire.

    Chjami Aghjalesi : U Partigianu

  • Par les vallées et les collines – 2

    L’Hymne des Partisans (1922)

    Партиза́нский гимн

    Ce chant fut presque immédiatement ‘récupéré’ par les partisans bolcheviques. Les paroles de la version ‘rouge’ ont été écrites par Piotr Parfionov (Пётр Семёнович Парфёнов) en 1920, puis remaniées par lui en 1922 pour célébrer les victoires sur le front de l’Extrême-Orient contre les Russes blancs. C'est cette version, plus ou moins remaniée, qui fut chantée tout au long de l'ère soviétique.

    По доли́нам и по взго́рьям
    Шла диви́зия вперёд
    Что́бы с бо́ем взять Примо́рье -
    Бе́лой а́рмии опло́т

    Налива́лися знамёна
    Кумачо́м после́дних ран
    Шли лихи́е эскадро́ны
    Приаму́рских партиза́н

    Э́тих дней не смо́лкнет сла́ва
    Не поме́ркнет никогда́
    Партиза́нские отря́ды
    Занима́ли города́

    И оста́нутся как в ска́зке
    Как маня́щие огни́
    Штурмовы́е но́чи Спа́сска
    Волоча́евские дни

    Разгроми́ли атама́нов
    Разогна́ли воево́д
    И на Ти́хом океа́не
    Свой зако́нчили похо́д

    Par les vallées et les collines
    La division allait de l'avant
    Pour prendre d’assaut le Primorié (1)
    (Ultime) rempart de l'armée blanche

    Les bannières saignaient
    De l’étoffe de leurs récentes blessures
    Ils avançaient, les vaillants escadrons
    Des Partisans de l'Amour (2)

    La gloire de ces journées ne s'éteindra pas
    Jamais elle ne se pâlira
    Les bataillons des partisans
    Occupèrent les villes

    Et resteront dans la légende
    Telles des lumières étincelantes
    Les nuits d'assaut sur Spassk (3)
    Et les jours de combat de Volotchaev (4)

    Les atamans (5) furent vaincus
    Et le voïvode chassé (6)
    C’est sur les rivages de l’Océan Pacifique
    Qu’ils achevèrent leur campagne

    1. Le Primorié est une région de l’Extrême-Orient russe – Capitale : Vladivostok ;
    2. Ici, il s’agit du fleuve Amour marquant la frontière entre la Russie et la Chine ;
    3. Spassk-la-Lointaine : ville de l’Extrême-Orient russe, dernière poche de résistance des Russes blancs ;
    4. En 1922, près du village Volotchaevska eut lieu une bataille décisive de la fin de la guerre civile ;
    5. Atamans : chefs militaires cosaques ;
    6. Voïvode : gouverneur militaire et administratif de l’ancienne Russie tsariste.

    Différentes variantes furent par la suite écrites, sous l'ère soviétique. Lire (en russe) : Histoire de la chanson, alimentant l'exaltant souvenir des héros de la Révolution bolchevique.

    Une histoire (une propagande diront certains) que se devait de connaître tout bon citoyen soviétique... y compris les enfants ; et pour cela : quoi  de mieux qu'un petit dessin animé ?

    ***

    Mais changeons d'époque...

    L’Hymne de l’Armée de Libération Russe (1943)

    Гимн Русской Освободительной Армии

    Lors de la Grande Guerre Patriotique, en juillet 1942, Andreï Vlasov - Андрей Андреевич Власов - (ci-dessus, haranguant ses troupes), commandant de la 2ème armée de choc de l'Armée rouge, est capturé par les Allemands, il trahit et se range ouvertement aux côtés de l’agresseur nazi. Il forme quelque mois plus tard la ‘ROA’ - ‘Armée de libération russe’ (en russe 'РОА'). L’auteur Anatole Iakoblevitch Flaume (Анатолий Яковлевич Флауме) écrit en 1943 deux nouvelles versions sur l’air de ‘Par les vallées et les collines’, aux paroles farouchement anti-bolcheviques.

    (Première version - Первая версия)

    Мы идём широ́кими поля́ми.
    На восхо́де у́тренних луче́й,
    Мы идём на бой с большевика́ми
    За свобо́ду Ро́дины свое́й.

    Припев:

    Марш вперёд, желе́зными ряда́ми,
    В бой за Ро́дину, за наш наро́д!
    То́лько ве́ра дви́гает гора́ми,
    То́лько сме́лость города́ берёт

    Мы идём вдоль тле́ющих пожа́рищ,
    В го́ды тя́жких бе́дствий и войны́ -
    Приходи́ и ты к нам в полк, това́рищ,
    Е́сли лю́бишь Ро́дину, как мы.

    Мы идём, нам да́льний путь не стра́шен,
    Не страшна́ суро́вая война́,
    Твёрдо ве́рим мы в побе́ду на́шу,
    И твою́, люби́мая страна́!

    Мы идём, над на́ми флаг трёхцве́тный,
    Льётся пе́сня по родны́м поля́м...
    Наш напе́в подхва́тывают ве́тры
    И несу́т к моско́вским купола́м.

    Nous marchons dans de vastes champs.
    Au lever des rayons du matin,
    Nous allons au combat contre les Bolcheviks
    Pour la liberté de notre Patrie.

    Refrain :

    En avant, avec les bataillons de fer !
    Au combat pour la Patrie et pour le peuple !
    Seule la foi déplace les montagnes,
    Seul le courage fait tomber les villes !

    Nous marchons parmi les incendies qui couvent,
    Dans ces années de misères et de guerre.
    Et toi aussi, rejoins notre régiment, camarade,
    Si comme nous tu aimes ta Patrie.

    Nous marchons, sans craindre le long chemin,
    Sans craindre la dureté de la guerre,
    Nous croyons fermement en notre victoire,
    Et en Toi, ô pays bien-aimé !

    Nous marchons, sous notre bannière tricolore
    Notre chant vole à travers nos champs ...
    Les vents reprennent notre chanson
    Et la portent jusqu’aux coupoles de Moscou.

    (Seconde version - Вторая версия)

    Боевы́м желе́зным ша́гом
    За полка́ми шли полки́
    И под сла́вным ру́сским фла́гом
    Бле́щут гро́зные штыки́

    Ча́стым ле́сом, по́лем чи́стым
    Их ведёт оди́н прика́з:
    Что́бы стали́нским чеки́стам
    Не хозя́йничать у нас!

    Про́тив кра́сного заси́лья
    Мы идём в жесто́кий бой
    - Возрождённая Росси́я -
    Вот наш ло́зунг боево́й!

    Власть чеки́стов минова́ла
    Враг нигде́ не устои́т
    Бу́дет вы́бит враг с Ура́ла
    За Ура́лом бу́дет бит!

    Боевы́м желе́зным ша́гом
    За полка́ми шли полки́
    И под сла́вным ру́сским фла́гом
    Блещу́т гро́зные штыки

    D’un pas de fer, ils marchaient au combat,
    Régiments après régiments,
    Et sous le glorieux drapeau russe
    Les redoutables baïonnettes étincelaient

    Par les forêts épaisses et à travers champs
    Un ordre les conduit :
    Que les Tchékistes staliniens*
    Ne soient plus nos maîtres !

    Contre le pouvoir des Rouges
    Nous nous lançons dans la féroce bataille.
    ‘La Russie renaissante’
    Tel est notre slogan au combat !

    Le pouvoir des Tchékistes est fini
    L'ennemi nulle part ne résistera
    L'ennemi sera délogé de l'Oural
    Par-delà l'Oural il sera battu !

    D’un pas de fer, ils marchaient au combat,
    Régiments après régiments,
    Et sous le glorieux drapeau russe
    Les redoutables baïonnettes étincelaient

    * Tchékistes : membres de la Tchéka : police politique soviétique de 1917 à 1922.

     

    Le souvenir du traître Andrei Vlasov et de ses escadrons de fer révulse encore les Russes : c’est peu dire !

  • Par les vallées et les collines

    Художник / Illustration : Виктор Васильевич Шаталин

    A mes amis Jean G., royaliste nostalgique et
    Léon J.P., bolchevik non moins nostalgique...

    Petite histoire d’une chanson :

     

    Par les vallées et les collines

    По долинам и по взгорьям

    Voici l’histoire d’une chanson russe qui aura connu au cours du XX° siècle les vicissitudes de son temps, modifiant à chaque fois ses paroles pour s’adapter aux évènements militaires et politiques de l’époque. En particulier, elle fut reprise par tous les ‘camps’ lors de la Guerre civile russe (1917 – 1922), et, avec d’autres paroles, lors de la Grande Guerre Patriotique (1941 - 1945)* ; elle connut, par la suite, une diffusion internationale, traduite en de multiples langues.

    Un internaute, Ivan Amraamski, a tenté la gageure de rassembler (les) différentes versions enregistrées de ce chant depuis un tout premier enregistrement datant de 1934, sans toutefois parvenir à l'exhaustivité.

    Malheureusement le site est en japonais ce qui n'en facilite pas lecture (à moins de parler aussi le japonais, évidemment !). Lire en japonais : 谷を渡り丘を越え.

    Par les vallées et les collines’ aurait été composée en 1828 lors d’un des nombreux conflits russo-turcs. L’auteur-compositeur aurait pu être un certain Tcherniaev, sans que tout cela soit certain. Nous n’en connaissons pas le texte original...

    * Cela rappelle les différentes versions de l’hymne soviétique, redevenu, avec d'autres paroles, depuis l’an 2000, l’hymne de la Russie de Vladimir Poutine…

    La marche des fusiliers sibériens (1915)

    Марш сиби́рских стрелко́в

    Sur cet air ancien, en 1915, de nouvelles paroles furent rajoutées par l’écrivain, poète et journaliste Vladimir Guiliarovski (Владимир Алексеевич Гиляровский). La Russie tsariste était à ce moment-là engagée, sur le front de l’Est, dans la Première Guerre Mondiale

    Из тайги́, тайги́ дрему́чей,
    От Аму́ра, от реки́,
    Молчали́во, гро́зной ту́чей
    Шли на бой сибиряки́.

    Их суро́во воспита́ла
    Молчали́вая тайга́,
    Бу́ри гро́зные Байка́ла
    И сиби́рские снега́.

    Ни уста́лости, ни стра́ха (не зна́я стра́ха) ;
    Бью́тся ночь и бью́тся день,
    То́лько се́рая папа́ха
    Ли́хо сби́та набекре́нь.

    Эх, Сиби́рь, страна́ ро́дная,
    За тебя́ ль мы постои́м,
    Во́лнам Ре́йна и Дуна́я
    Твой приве́т (покло́н) передади́м!

    Дополне́ние в зави́симости от ве́рсии:

    Знай, Сиби́рь, в лихи́е го́ды
    В памя́ть сла́вной старины́
    Честь вели́кого наро́да
    Отстоя́т твои́ сыны́.

    Русь свобо́дная воскре́снет,
    На́шей ве́рою горя́,
    И услы́шат э́ту пе́сню
    Сте́ны дре́внего Кремля́.

    Depuis la taïga, l’épaisse taïga,
    Depuis l’Amour, depuis ce fleuve,
    Silencieux, tel un nuage menaçant
    Les Sibériens sont partis au combat,

    La taïga silencieuse
    Les a éduqués âprement.
    Redoutables tempêtes du Lac Baïkal,
    Neiges de Sibérie !

    Sans fatigue ni peur (Sans connaître de fatigue),
    Ils frappent la nuit, ils frappent le jour,
    Seulement avec leur bonnet de laine grise
    Posé crânement sur l’oreille.

    Ô Sibérie, pays natal,
    Pour Toi nous nous battrons,
    Et aux vagues du Rhin et du Danube
    Nous transmettrons ton salut !

    Rajout selon les versions :

    Sache, Sibérie, que dans les mauvaises années,
    En mémoire du glorieux passé,
    Tes fils défendront
    L'honneur de notre grand peuple.

    La libre Rouss’ (ancien nom de la Russie) ressuscitera,
    Brûlant de notre Foi.
    Et les murailles de l’ancien Kremlin,
    Entendront ce chant.

    Marche du Régiment Drozdovski (1919)

    Марш Дроздо́вского Полка́

    Après la Révolution d’octobre 1917, en 1919 – en pleine guerre civile -, le colonel de l’Armée blanche - pro-tsariste - Anton Tourkoul (Антон Васильевич Туркул), engagé sur le front roumain, demanda au compositeur Dmitri Pokrass (Дмитрий Яковлевич Покрасс) un hymne régimentaire. Pokrass repris à son compte le motif de la Marche des fusiliers sibériens et y arrangea de nouvelles paroles. Le 29 juin retentit pour la première fois le Chant du régiment de Drozdovski en présence du commandant en chef, le général Anton Dénikine (Антон Иванович Деникин).

    Из Румы́нии похо́дом
    Шёл Дроздо́вский сла́вный полк,
    Во спасе́ние наро́да
    Исполня́я тя́жкий долг.

    Мно́го он ноче́й бессо́нных
    И лише́ний выноси́л,
    Но геро́ев закалённых
    Путь далёкий не страши́л!

    Генера́л Дроздо́вский сме́ло
    Шёл с полко́м свои́м вперёд.
    Как геро́й, он ве́рил твёрдо,
    Что он Ро́дину спасёт!

    Ви́дел он, что Русь Свята́я
    Погиба́ет под ярмо́м
    И, как све́чка воскова́я,
    Угаса́ет с ка́ждым днём.

    Ве́рил он: наста́нет вре́мя
    И опо́мнится наро́д -
    Сбро́сит ва́рварское бре́мя
    И за на́ми в бой пойдёт.

    Шли Дроздо́вцы твёрдым ша́гом,
    Враг под на́тиском бежа́л.
    И с трёхцве́тным Ру́сским Флаго́м
    Сла́ву полк себе́ стяжа́л!

    Пусть вернёмся мы седы́е
    От крова́вого труда́,
    Над тобо́й взойдёт, Росси́я,
    Со́лнце но́вое тогда́!

    Припе́в:

    Э́тих дней не смо́лкнет сла́ва,
    Не поме́ркнет никогда́.
    Офице́рские заста́вы,
    Занима́ли города́!
    Офице́рские заста́вы,
    Занима́ли города́!

    Depuis la Roumanie
    Marchait le glorieux régiment Drozdovski,
    Au secours du peuple
    Accomplissant son grand devoir.

    Il endura beaucoup de privations
    Et de nuits sans dormir
    Mais la longue route n'effrayait pas
    Les héros endurcis.

    Le général Drozdovski hardiment
    S'avança avec son régiment,
    Tel un héros,
    Convaincu de sauver la Patrie !

    Il voyait la Sainte Russie
    Succomber sous le joug,
    Et comme une bougie de cire
    Dépérir de jour en jour.

    Il en était sûr : le temps viendrait
    Où le peuple comprendrait,
    Rejetterait le joug barbare,
    Et avec nous irait au combat !

    Ses troupes avançaient d'un pas ferme.
    L'ennemi, sous la pression, s'enfuyait.
    Sous le drapeau tricolore de la Russie,
    Le régiment se couvrait de gloire.

    Même si nous devons rentrer tout grisonnants
    De ce sanglant labeur,
    Sur Toi, Russie,
    Un soleil nouveau se lèvera !

    Refrain :

    La gloire de ces jours ne s'éteindra pas.
    Jamais, elle ne pâlira.
    Ses officiers aux avant-postes,
    Occupaient les villes !
    Ses officiers aux avant-postes,
    Occupaient les villes !

  • Stenka Razine 3

    Petites-nouvelles-russes - Stenka Razine - affiche 1939
    Affiche du film 'Stéphane Razine' (Степан Разин), 1939

    Stenka Razine et Louis Mandrin :
    deux destins parallèles.

    Stenka Razine (1630 ?-1671) :
    un héros (pré)-révolutionnaire ?

    La légende de Stenka Razine, interprétée par
    Charles Aznavour et les Compagnons de la chanson (1962)

    ‘Je suis venu donner à tous la liberté et la délivrance...’
    (Я пришёл дать вам всем свободу и избавление)

    Stenka Razine de son vrai nom Stéphane Razine (Степан Тимофеевич Разин) fut un chef cosaque, brigand et pirate qui mena un soulèvement contre la noblesse et le pouvoir impérial tsariste dans le sud de la Russie.

    Issu d'une riche famille, décrit par ses contemporains comme un homme d'expérience, énergique et intelligent, il se fit d'abord connaître comme ataman (chef militaire) des Cosaques du Don. Puis sa vie bascula et il choisit de devenir son propre maître, chef d'une communauté de bandits de grand chemin, vivant de pillages et de vols. Son armée de Cosaques fut bientôt rejointe par des paysans qui tentaient ainsi d'échapper aux lourdes taxes, à la conscription, au servage, ainsi que par de nombreux laisser-pour-compte d'une société fortement inégalitaire. Parmi eux figuraient nombre de membres d'ethnies non russes opprimées.

    Petites-nouvelles-russes - Stenka Razine 2
    Stenka Razine

    On raconte que Razine descendit la Volga à la tête d'une flotte de quarante-cinq galères, s'emparant de forts importants et dévastant la contrée. Puis il mena une expédition jusqu'en Perse (actuel Iran). Peut-être est-ce de ces régions lointaines qu'il ramena sa belle princesse captive dont parle le poème (et la chanson) ? Nul ne le sait précisément.

    Petites-nouvelles-russes - Stenka Razine 3
    Stenka Razine

    Le petit peuple du sud de la Russie se passionna pour ses aventures. Les potentats locaux ainsi que le pouvoir central ne pouvaient plus ignorer la puissance de Stenka et le risque qu'il représentait pour l'ordre impérial. En 1670, il s'empara d'Astrakhan (ville située sur le cours inférieur de la Volga) et y fonda une république cosaque dont il devint le souverain (государь). Mais quelques semaines plus tard, alors qu’il marchait sur Moscou, ses troupes furent mises en déroute et Razine s’enfuit, abandonnant sur le champ de bataille près de 20 000 combattants.

    Mais la rébellion qu’il avait initiée se propagea. Razine proclamait que son objectif était de renverser les boyards et les officiers, d'installer l'absolue égalité dans toute la Moscovie, en abolissant toute hiérarchie. Le petit peuple et les simples soldats firent bon accueil à ses idées. Les populations de la Volga se joignirent aux insurgés. Dans les villes investies, les élites locales fuyaient sous peine d’être massacrées. Toute une grande partie du sud de la Russie venait de se soulever contre ses oppresseurs.

    Petites-nouvelles-russes - L'exécution de Stenka Razine
    L'exécution de Stenka Razine

    Mais tout à une fin...

    En 1671, après de sanglantes batailles, Stenka Razine et son frère cadet Frol (Фрол Тимофеевич Разин) furent capturés et furent conduits jusqu’à Moscou. Stenka fut équarri et brûlé sur la Place rouge. Son frère obtint un sursis. Emprisonné, il ne fut exécuté que quelques années plus tard, en 1676.

    Le pouvoir impérial et la noblesse avaient triomphé mais la mémoire des exploits de Stenka Razine survécut, et de nombreux récits, poèmes et chansons racontèrent l’histoire de ce héros devenu populaire. Les Bolcheviks voyaient même en lui l’un des précurseurs de la Révolution prolétarienne et paysanne à venir…

    Pour en savoir plus (en russe) : Степан Разин: Я пришёл дать вам всем свободу и избавление.

    Louis Mandrin (1725-1755), le Stenka Razine français ?

    Comment ne pas faire le parallèle entre ces deux héros, dont les parcours de vie, et les légendes qu’ils suscitèrent après leur mort paraissent, par bien des aspects, similaires ?

    « Beau de visage, blond de cheveux, bien fait de corps, robuste et agile. À ces qualités physiques, il joint un esprit vif et prompt, des manières aisées et polies. Il est d'une hardiesse, d'un sang-froid à toute épreuve. Son courage lui fait tout supporter pour satisfaire son ambition... »¹

    Petites-nouvelles-russes - Louis Mandrin
    'Ici sévit Mandrin'

    Aîné d'une famille autrefois riche, mais sur le déclin, Louis Mandrin, à la mort de son père, alors qu’il avait dix-sept ans, devient chef de famille. Très tôt, dès 1748, alors qu’il n’a que vingt-trois ans, il connaît ses premiers démêlés avec la Ferme générale, chargée au nom du roi (à l’époque : Louis XV), de lever l’impôt et les taxes.

    Le 27 juillet 1753, à la suite d'une rixe mortelle, Louis Mandrin est condamné à mort. Pierre Mandrin, son frère cadet, est lui pendu. Réussissant à échapper au gibet, Louis déclare alors la guerre aux fermiers généraux, haïs par une population écrasée d’impôts et de taxes.

    Mandrin se fait alors contrebandier, passant les frontières, de Suisse en Savoie (alors indépendante du Royaume) et de Savoie en France, au sein d’une bande dont il devient vite le chef. Il se proclame alors lui-même « capitaine général des contrebandiers de France ».

    Sa cible principale est la Ferme générale, et non le peuple. Des prisons, il libère seulement les prisonniers victimes de conflits avec l'administration des impôts, et se garde de s'entourer de brigands et d'assassins. En France, son brigandage rayonne bien au-delà du Dauphiné, sur une zone couvrant pratiquement les régions actuelles de Rhône-Alpes et Auvergne, de Franche-Comté, ainsi qu'une partie de la Bourgogne.

    En 1754, à la tête de centaines d'hommes, « ni voleurs, ni assassins », il organise six campagnes en investissant des villes par surprise. La population est enchantée, son aura s’accroît et Mandrin gagne même l'admiration d'un personnage tel que Voltaire.

    Mais tout à une fin…

    Petites nouvelles russes - Le testament politique de Louis Mandrin (1755)
    Le Testament politique de Louis Mandrin (1755)

    La Ferme générale, exaspérée par ce « bandit » devenant chaque jour plus populaire, demande le concours de l'armée du roi. Mandrin parvient à se réfugier en Savoie, mais il est appréhendé par une troupe de cinq cents hommes déguisés en paysans qui ont illégalement franchi la frontière pour le capturer.

    Très rapidement jugé, condamné et exécuté, Louis Mandrin est soumis au supplice de la roue, le 26 mai 1755, dans la ville de Valence, devant 6 000 curieux. Il aurait enduré son calvaire sans une plainte et aurait même demandé à la population de poursuivre sa révolte.

    L'homme est mort. C'est alors le début de la légende du bandit justicier qui aura lutté contre l'iniquité des taxes de l'Ancien Régime. Son nom même, ‘Mandrin’, devient à l'époque un nom commun résonnant tel le terme de ‘malandrin’. Son portrait gravé et ses aventures finissent par être colportés par tout le pays.

    Dès 1755, paraît à Genève (à l’abri de la censure royale française) le ‘Testament politique de Louis Mandrin’ portant le sous-titre : ‘Généralissime des Troupes de contrebandiers, écrit par Lui-même dans sa prison’².

    « J'ai cherché la cause de cette grande affluence de Peuple qui venait chaque jour s'enrôler sous mes drapeaux ; en remontant à sa source, j'ai découvert qu'elle prenait elle-même son origine dans le système des Fermes... »

    En particulier, une chanson ‘La complainte de Mandrin’, devenue très populaire, et que chantaient les Communards lors du soulèvement de la Commune de Paris en 1871, raconte sa légende. On ne sait quand ni par qui cet air fut composé et ses paroles écrites. (Lire les paroles de la Complainte de Mandrin.)

    Pour en savoir plus : https://www.mandrin.org/

    1. D'après ‘La Gazette de Hollande’, citée par A. Besson, Contrebandiers et gabelous, 1993.
    2. En fait, le véritable auteur de cet ‘autobiographie’ posthume était un certain Ange Goudar (1708-1791 ?).

    Voici une version toute récente, interprétée par le chanteur Renaud. Comme quoi la légende de Mandrin est toujours vivace...

    La Complainte de Mandrin, Renaud (2022)

  • Stenka Razine 2

    Petites-nouvelles-russes - Stenka Razine
    Stenka Razine

    Alexandre Pouchkine :
    Les chants dédiés à Stenka Razine

    (1826)

    Александр Пушкин - Песни о Стеньке Разине

    "Молодец удалой, ты разбойник лихой,
    Ты разбойник лихой, ты разгульный буян..."

    А.С. Пушкин

    "Jeune homme courageux, toi - bandit audacieux,
    Brigand hardi, bagarreur effréné..."

    Alexandre Pouchkine

    En 1826, Alexandre Pouchkine (Александр Сергеевич Пушкин) (1799-1837) consacra trois poèmes à ce héros dont il admirait les exploits. Voici le premier de ces chants, qui, à la lecture, semble à l’évidence avoir directement inspiré Dimitri Sadovnikov pour son poème. En raccourci, on peut donc prétendre sans trop se tromper que Pouchkine est à l’origine de la chanson de Stenka Razine.

    Récitant : Viatcheslav Geracimov (Вячеслав Герасимов)

    Как по Волге-реке, по широкой
    Выплывала востроносая лодка,
    Как на лодке гребцы удалые,
    Казаки, ребята молодые.
    На корме сидит сам хозяин,
    Сам хозяин, грозен Стенька Разин,
    Перед ним красная девица,
    Полонённая персидская царевна.
    Не глядит Стенька Разин на царевну,
    А глядит на матушку на Волгу.
    Как промолвил грозен Стенька Разин:
    «Ой ты гой еси¹, Волга, мать родная!
    С глупых лет меня ты воспоила,
    В долгу ночь баюкала, качала,
    В волновую погоду выносила,
    За меня ли молодца не дремала,
    Казаков моих добром наделила.
    Что ничем тебя ещё мы не дарили».
    Как вскочил тут грозен Стенька Разин,
    Подхватил персидскую царевну,
    В волны бросил красную девицу,
    Волге-матушке ею поклонился.

    Sur le grand fleuve, la large Volga,
    Court un vaisseau à la proue acérée.
    Sur le vaisseau rament les braves,
    Des Cosaques, de jeunes gars.
    A la poupe se tient le maître,
    Le maître en personne, le rude Stenka.
    Face à lui est assise une belle jeune femme,
    Captive de Perse, la fille d’un roi.
    Stenka ne la regarde pas,
    Seulement regarde-t-il la Volga, sa petite mère.
    Voici les mots que prononça le rude Stenka :
    « Longue vie à toi, Volga, mère chérie.
    J’ai bu ton eau dès le berceau,
    Tu m’as bercé de longues nuits,
    Soutenu dans la fureur des vagues.
    Tu as veillé sur ton fils valeureux,
    Tu as comblé tous mes Cosaques,
    Alors qu’en retour tu n’as rien obtenu de nous ».
    Et, se levant d’un bond, le rude Stenka Razine
    Prit la belle princesse par la taille,
    Et la précipita dans les flots,
    S’inclinant très bas devant sa mère la Volga.

    1. L’expression ‘гой еси’ [Goy essi] est caractéristique de l'art populaire oral et se retrouve principalement dans les textes des anciennes épopées. ‘Еси’ est la forme de la 2e personne du singulier du verbe être au présent, perdu dans la langue russe moderne. Quаnt à ‘гой’, il s’agit-là d’une forme figée d'un autre verbe ancien - ‘гоить / гоити -, qui signifie "vivre, être en bonne santé".

    ***

    Le songe de Stéphane Razine (Степан Разин Видит Сон)
    Interprété par le groupe Pelagea (группа Пелагея) 2009

    Le songe de Stenka Razine

    (Сон Степана Разина)

    Auteur et compositeur inconnus
    Слова и музыка неизвестных авторов

    Voici une vieille chanson populaire honorant Stenka Razine. Elle raconte le rêve prémonitoire de ce héros de légende sur sa fin prochaine. Ce chant (et ses inévitables variantes) avait été référencé en tant que chant cosaque traditionnel dès la seconde partie du XIX°.

    Ой, то не вечер, то не вечер.
    (вариант: «Ой, да не вечер…»)
    Ой, мне малым-мало спалось.
    Мне малым-мало спалось,
    Ой, да во сне привиделось...

    Ой, мне во сне привиделось,
    Будто конь мой вороной
    Разыгрался, расплясался,
    Ой да разрезвился подо мной.

    Ой, налетали ветры злые.
    Да с восточной стороны
    Да сорвали чёрну шапку
    Ой, да с моей буйной головы.

    А есаул догадлив был,
    Он сумел сон мой разгадать.
    Ой, пропадёт, он говорил,
    Твоя буйна голова.

    Oh, ce n'est pas le soir,
    ce n'est pas le soir.
    Oh, je n'ai pas beaucoup dormi.
    j'ai dormi si peu,
    Oh oui, j'ai fait un rêve...

    Oh, j'ai fait un rêve
    Comme si mon cheval noir tel un corbeau
    Jouait, dansait,
    Oh, gambadait sous ma selle.

    Oh, combien les vents mauvais soufflaient,
    Les vents venant de l’est,
    Comment ils arrachaient mon chapeau noir,
    Oh, de ma tête impétueuse.

    Et le iessaoul² à l'esprit vif
    Réussit à démêler mon rêve.
    « Oh, ta tête impétueuse, dit-il,
    Tombera. »

    2. Iessaoul : grade militaire cosaque de l’armée impériale russe (le terme est dérivé du terme turc yasaul – chef).

    Voici une dernière version de la chanson 'Oh, ce n'est pas le soir...' ("Ой, да не вечер..."), interprétée par le groupe Piknik (группа Пикник)...

    Quand la musique classique russe rend hommage à Stenka Razine :

    En 1949, la compositrice Galina Oustvolskaya (Галина Ивановна Уствольская) (1919 – 2006) composa un chant épique (былина) symphonique à partir du thème de la chanson Oh, ce n'est pas le soir’ (Ой, то не вечер, то не вечер) - Ecoutez sur Youtube.

    Plus tôt, en 1885, Alexandre Glazumov (Александр Константинович Глазунов) (1865-1936) composa le poème symphonique ‘Stenka Razine’ (Стенька Разин) dont le premier thème reprend un autre air célèbre du répertoire populaire russe, Le chant des ‘Bateliers de la Volga’ (Эй, ухнем! - ho hisse, halons, tirons !) - Ecoutez sur Youtube.

    Enfin, en 1964, Dimitri Chostakovich (Дмитрий Дмитриевич Шостакович) (1919-1975) composa la cantate symphonique ‘L’exécution de Stenka Razine’ (Казнь Степана Разина) d'après le poème d'Evgeni Evtouchenko (Евгений Александрович Евтушенко) (1933-2017). Lire (page 14 et suivantes) le poème et sa traduction. Ecoutez sur Youtube ‘L’exécution de Stenka Razine’.