Le blocus de Léningrad – Entre la vie et la mort 7

Petites nouvelles russes - Blocus de Léningrad - Le couloir

Ничего не могу забыть – Je ne peux rien oublier

Между жизнью и смертью (7) Entre la vie et la mort

Женщина наклонилась и протянула руку. Оказывается, для того чтобы не погибнуть — мне нужна была протянутая человеческая рука. Значит, я не умру здесь, не замёрзну... Сердце горячо, отчаянно застучало, хотя чувство страха ещё не отступило. Смотрю на свою спасительницу. Возраст определить невозможно. Закутана в платок до самых глаз, а глаза добрые, усталые…

Нетвёрдым голосом говорю: — Спасибо вам большое.

Через пять минут с трудом открываю тяжёлую дверь, вхожу в пустынный институт и ужасаюсь от мысли — где же мне в таком огромном здании найти папу? В тёмном коридоре показалась чья-то фигура. Не осознав, кто этот человек, я в оцепенении наблюдала, как он открывает дверь какого-то кабинета. Ещё секунда — и дверь за ним закроется...

Из последних сил я крикнула: — Папа!

Эхом прокатился мой призыв по вестибюлю. Человек обернулся и пошёл навстречу. Это был отец.

...Одеяло сползло и волочилось по ступеням. Захлёбываясь, я стала говорить о том, как упала почти у самого института, как меня подняла незнакомая женщина, а потом, без всякого перехода, произнесла: — А мама умерла. Вот её кольцо.

Я достала чашку, где лежало кольцо, но негнущиеся пальцы не удержали её, и чашка упала на каменный пол, а цветные бусы и кольцо покатились в разные стороны.

Я ползала на коленях, собирая бесполезные разноцветные шарики, затем подняла мамино обручальное кольцо. Отец стоял и молча смотрел на меня. Выпавшая из рук пластмассовая чашка стала для меня последним испытанием в этот день. Подняв всё с пола, я отдала папе обручальное кольцо.

И тут я заплакала так, как плачут только дети.

Séparateur 3

Une femme se penchait vers moi qui me tendait la main. Pour survivre, à ce moment précis, j’avais besoin qu’une main, que cette main vînt à mon secours. Cela voulait dire que je n’allais pas mourir là, qu’à cet endroit le gel n’allait pas me tuer. Bien que toujours transie d’angoisse mon cœur se mit à battre ardemment, éperdument.

Après qu'elle m'eut aidée à me relever, je dévisageai la femme qui venait de me sauver la vie. Je n’aurais su lui donner d’âge. Elle était enveloppée d’un châle qui lui montait jusqu’aux yeux, des yeux pleins de bonté et, en même temps, qui paraissaient si fatigués...

D’une voix tremblante, je la remerciai :

– Merci, merci beaucoup…

Cinq minutes plus tard je poussai à grand-peine la lourde porte de l’institut où papa travaillait¹.

Où allais-je le trouver dans ce grand bâtiment désert ? Cette pensée me terrifia. Dans l’obscurité d’un couloir j’aperçus une silhouette. Comme dans un état second je la voyais sans pouvoir la distinguer, sans réaliser qui cela pouvait être. Elle venait d’ouvrir une porte, une seconde encore et la porte allait se refermer. Alors, avec le peu de mes dernières forces, je lui criai : « Papa ! » Mon cri résonna dans tout le hall de l’Institut. La silhouette se retourna et vint à ma rencontre. C’était lui : mon père !

La couverture qui me couvrait glissa et j’avançai la traînant derrière moi. Toute essoufflée, j’expliquai que j’étais tombée peu avant, tout près de l’Institut, qu’une inconnue m’avait relevée et, sans transition, je lui confiai :

– …et maman est morte. Je t’apporte son alliance.

Je sortis de mon manchon la tasse en plastique qui contenait l’anneau mais mes doigts tout engourdis ne purent la retenir et tout tomba et rebondit sur le sol de pierre. L’alliance et les perles de couleur du collier de maman se dispersèrent dans toutes les directions.

Je me mis à genoux pour les récupérer : d’abord les petites boules colorées et sans valeur, puis seulement l’anneau. Mon père regardait la scène sans rien dire. Ce fut, ce jour-là, ma dernière épreuve. Après avoir tout ramassé je lui remis l’alliance de maman.

Et alors je me mis à pleurer comme seuls pleurent les enfants.

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1. Au numéro 9b de l’allée Solianoïe se trouvait l’Institut technologique de Leningrad V.M. Molotov, fondé en 1931. Au cours de son d'histoire, cette université a changé plusieurs fois d’appellation et est devenue aujourd’hui l'École supérieure de technologie et de l’énergie (Высшая школа технологии и энергетики). Elle se situe désormais rue Ivan Chernykh (улица Ивана Черных, 414 - l'École supérieure de technologie et de l’énergie.