Le blocus de Léningrad – Entre la vie et la mort 6
Ничего не могу забыть – Je ne peux rien oublier
Между жизнью и смертью (6) Entre la vie et la mort
Небо стало затягиваться облаками, и пошёл лёгкий, совсем театральный снег. От его равномерного падения меня стало клонить ко сну. Я прислонилась к стенке дома, закрыла глаза и вдруг услышала тихие звуки рояля. Неужели из дома?.. Меня охватили покой и тишина. Остаться здесь навечно, не двигаться... Вдруг ноги скользнули, я качнулась и открыла глаза. Музыки не стало. Только снег по-прежнему кружил, и ажурные снежинки не таяли на моих плечах и рукавах.Мамины валенки, хотя и очень тёплые, были мне велики и непомерно широки. Они соскальзывали, и, чтобы удержать их, я тяжело шаркала, едва переставляя ноги. Шла уже полубессознательно. И вдруг я заметила, что стою перед Домом Красной Армии . Стала растерянно оглядываться. На пустынном перекрёстке увидела женщину милиционера. Как могла, я заспешила, чтобы, не дай бог, она не ушла. Тяжело дыша, спросила несколько раз:
— Институт на Соляном? Где институт на Соляном ?
Она объяснила. Спросила, к кому иду, и утешила, сказав, что я почти пришла. Облегчённо вздохнув, я повернула назад.
На углу улицы Пестеля стоял разбомблённый дом. Груды щебня, снега, огромные наледи около разорванного водопровода. Идти осталось совсем немного. И вдруг я поскользнулась и упала. Отчаяние подкатило к сердцу. Я слышала, что если человек упадёт, то сил подняться у него уже не будет. Прохожие, такие же слабые, качающиеся от истощения, не смогут помочь — и человек замёрзнет. Одеяло, которым меня заботливо укутала сестра, теперь стало основным препятствием. Изо всех сил пытаюсь подняться, но лёд скользит под ногами, руками, телом. От усталости и отчаяния в глазах — туман. Вдруг слышу голос:
— Девочка, ну как же ты упала? Поднимайся быстрее!
Le ciel se couvrit de nuages et une neige fine commença à tomber, c’était comme dans un film. Les flocons tombaient doucement, régulièrement, me berçant et m’invitant au sommeil. M’adossant contre un mur, je fermai les yeux…
J’entendis alors le son à demi-couvert d’un piano, d’où venait-il ? Un sentiment de paix et de silence m’envahit. ‘Rester ici pour toujours, ne plus bouger…’
Soudain mes pieds se dérobèrent. Je vacillai. Je rouvris les yeux. La musique s’était tue. Seule la neige tournoyait toujours autour de moi et ses délicats flocons se posaient, sans qu’ils ne fondent, sur mes épaules et sur les manches de mon manteau.
Même si les bottes en feutre de maman que j’avais chaussées étaient très chaudes, elles étaient trop grandes et m’allaient définitivement trop large. Tout le temps, elles me glissaient des pieds et je devais me traîner gauchement, arrivant à peine à mettre une jambe devant l’autre. J’avançais ainsi, à demi-consciente.
C’est alors que je me rendis compte que je me trouvais devant la Maison de l’Armée Rouge¹ . Eperdue, je regardais autour de moi. A une intersection déserte se tenait une milicienne. Comme je pus, je hâtai le pas, priant dieu pour qu’elle ne parte pas. A bout de souffle, je lui demandai plusieurs fois :
– L‘institut de l’allée Solianoïe ? Où est l’institut de l’allée Solianoïe² ?
Elle me renseigna, me demanda chez qui j’allais, puis me rassura en disant que je n’en étais pas loin. Je poussai un soupir de soulagement. Il fallait seulement que je revienne un peu sur mes pas.
Je pris la première rue à droite : la rue Pestel . A l’angle de celle-ci, une maison avait été bombardée. Il ne restait d’elle qu’un tas de gravats mêlé de neige et une épaisse couche de glace qui s’était accumulée autour de son arrivée d’eau disloquée.
J’étais presque arrivée…
Soudain mes pieds glissèrent sur le verglas.
Là, je me retrouvai par terre. Le désespoir alors m’envahit. J’avais entendu dire que si une personne tombait il lui était ensuite impossible de trouver la force de se relever. Et les passants, tout aussi faibles, titubant d’épuisement, ne pouvaient lui être d’aucun secours. La malheureuse était condamnée à mourir ainsi, à même le sol, congelée...
La couverture dans laquelle ma sœur avait pris soin de m’emmitoufler m’encombrait à présent. Rassemblant mes dernières forces, j’essayais de me relever mais mes pieds, mes mains, tout mon corps glissaient sur le sol verglacé. Comme dans un brouillard, saisie de fatigue et de désespoir, mes yeux se voilèrent.
Soudain j’entendis une voix :
– Eh bien ma fille, comment as-tu fait pour te casser la figure ? Allez ! relève-toi vite !
1. La Maison de l'Armée rouge s'appelle aujourd’hui la Maison des Officiers (Дом офицеров)
2. De nos jours, au numéro 9 de l’allée Solianoïe se trouve le musée du Blocus de Léningrad (Музей обороны и блокады Ленинграда) Lire.