La prophétie – I.2
Алые паруса – Les voiles écarlates
Предсказание (I.2) La prophétie
Через неделю на двухспальной кровати Лонгрена осталось пустое место, а соседка переселилась в его дом нянчить и кормить девочку. Ей, одинокой вдове, это было не трудно. «К тому же, — прибавила она, — без такого несмышлёныша скучно».
Лонгрен поехал в город, взял расчёт, простился с товарищами и стал растить маленькую Ассоль. Пока девочка не научилась твердо ходить, вдова жила у матроса, заменяя сиротке мать, но лишь только Ассоль перестала падать, занося ножку через порог, Лонгрен решительно объявил, что теперь он будет сам всё делать для девочки, и, поблагодарив вдову за деятельное сочувствие, зажил одинокой жизнью вдовца, сосредоточив все помыслы, надежды, любовь и воспоминания на маленьком существе.
Десять лет скитальческой жизни оставили в его руках очень немного денег. Он стал работать. Скоро в городских магазинах появились его игрушки — искусно сделанные маленькие модели лодок, катеров, однопалубных и двухпалубных парусников, крейсеров, пароходов — словом, того, что он близко знал, что в силу характера работы отчасти заменяло ему грохот портовой жизни и живописный труд плаваний.
A présent chez Longren il y avait une place vide dans le grand lit. Au bout d’une semaine la voisine emménagea chez lui pour s’occuper de la petite. Pour elle qui était veuve et vivait seule, ce ne fut pas difficile. "En plus, ajouta-t-elle en regardant le berceau, sans ce p’tit bout d’chou, je m’ennuierais."
Longren se rendit en ville, récupéra le solde de sa paie, fit ses adieux à ses camarades et décida de s’occuper lui-même de l’enfant qu’on avait baptisée Solène.
Jusqu'à ce que la fillette eut appris à marcher sur ses deux jambes, la veuve vécut chez le marin, remplaçant la mère auprès de l'orpheline. Et c’est seulement lorsque Solène cessa de tomber en tentant de franchir le seuil de la maison que Longren annonça à la brave femme qu'il s’occuperait désormais seul de sa fille et la remercia pour tout son mérite. Dès lors, il vécut la vie solitaire d’un veuf et concentra toute son attention, tous ses espoirs, son amour et ses souvenirs sur son enfant chérie.
Dix ans d'une vie d’errance ne l’avaient guère enrichi. Il dut se mettre au travail. Bientôt, les jouets qu’il se mit à fabriquer se retrouvèrent dans les boutiques de la ville. C’étaient des petits modèles de barques, de bateaux, de voiliers à pont unique et à double pont, des croiseurs, des bateaux à vapeur ; bref : des navires qu’il connaissait bien, et qui, en partie, remplacèrent pour lui les appels et les mugissements dans les ports et la vie pittoresque des travailleurs de la mer.
Ce travail lui rapportait suffisamment pour pouvoir vivre modestement. D’un naturel peu communicatif, il devint, après la mort de sa femme, encore plus renfermé et solitaire.
Quand il ne travaillait pas, on le voyait parfois à la taverne, mais il ne s’asseyait jamais et buvait à la hâte un verre de vodka au comptoir et puis s’en retournait, jetant brièvement d’un côté ou d’un autre un "oui" – "non" – "bonjour" – "au revoir" – "c’est cela..." – à ses voisins qui l’interpellaient ou qui hochaient la tête.
Chez lui, il ne supportait pas de recevoir des visiteurs, les escortant jusqu’à la porte, tranquillement, sans les brusquer. Ainsi, par des signes et des propos de circonstances, les importuns n’avaient alors guère d'autre choix que de se trouver une bonne raison pour ne pas prolonger leur visite.
Lui-même ne se rendait jamais chez personne, de sorte qu’une distance, une froideur s’instaurèrent entre ses voisins et lui. Cela aurait pu avoir de fâcheuses conséquences si son travail, - la fabrication de jouets -, avait été plus tributaire des gens du village. Mais tout ce qu’il achetait - ses fournitures et la nourriture nécessaires - venait de la ville. Menners, le cabaretier, ne pouvait même pas se vanter de lui avoir jamais vendu une boîte d'allumettes.
Enfin aussi, il s’occupait tout seul d’entretenir sa maison et, avec patience, il prenait soin de l’éducation de sa fille, tâche bien complexe et inhabituelle pour un homme.
Solène avait déjà cinq ans et, avec le temps, en regardant ce petit visage nerveux et tout gentil, Longren avait appris à sourire avec douceur quand, assise sur ses genoux, elle tentait secrètement de déboutonner son gilet ou bien lorsqu’elle se mettait à lui chanter avec drôlerie des chansons de marins en imitant leurs rugissements sauvages mais en avalant çà et là la lettre « r ». Et entonnées par sa voix d’enfant, Longren avait l'impression d’entendre là un ours qui dansait, endimanché d’un joli ruban bleu.