IIya Varchavsky – L’amour et le temps (02)

Илья Варшавский - Ilya Varchavsky
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­Любо́вь и вре́мя - L’amour et le temps­

Второ́й эпизо́д - Episode deux

Petites-nouvelles-russes - antennes

Тот ве́чер, с кото́рого, со́бственно, и начина́ется мой расска́з, был заверша́ющим эта́пом до́лгих по́исков, разду́мий и неуда́ч. Зажа́в ме́жду коле́нями сло́жное ажу́рное сооруже́ние из про́волоки, напомина́ющее анте́нну радиотелеско́па, Кларне́т припа́ивал вы́вод для ште́кера. Он торопи́лся, наде́ясь ещё сего́дня провести́ не́сколько заду́манных зара́нее экспериме́нтов. Как всегда́ в таки́х слу́чаях, неожи́данно переста́л гре́ться пая́льник. Кларне́т чертыхну́лся, положи́л на́ пол своё творе́ние и подошёл к ште́псельной розе́тке с пая́льником в руке́.

В э́тот моме́нт что-то тре́снуло, и в ко́мнате пога́с свет.

Кларне́т вы́дернул ви́лку из розе́тки и напра́вился к столу́, где должны́ были́ лежа́ть спи́чки. По доро́ге он запу́тался в ковро́вой доро́жке, лежа́вшей у крова́ти, и с разма́ху шлёпнулся на тот са́мый про́волочный параболо́ид, кото́рый с неи́стовством дилета́нта мастери́л бо́лее двух неде́ль.

Кларне́т вы́ругался ещё раз, нащу́пал в темноте́ спи́чки и вы́шел в коридо́р.

Там то́же бы́ло темно́.

- Опя́ть пережгли́ свет, граждани́н хоро́ший?

Хоро́ший граждани́н нево́льно вы́ронил зажжённую спи́чку. Го́лос принадлежа́л майо́ру в отста́вке Буди́лову, зану́де, человеконенави́стнику и люби́телю стро́гого поря́дка. Майо́р жил одино́ко и ску́чно. Пе́рвые де́сять дней по́сле получе́ния пе́нсии он находи́лся в постоя́нно подогрева́емом состоя́нии зло́бного возбужде́ния, остальны́е же два́дцать пребыва́л в глубо́кой депре́ссии. Пита́лся он неизве́стно где и, хотя́ име́л на ку́хне персона́льный сто́лик, хозя́йства никако́го не вёл. Раз в ме́сяц приезжа́ла его́ дочь, жи́вшая отде́льно, привози́ла вы́стиранное бельё и забира́ла очередну́ю по́рцию гря́зного. О себе́ Буди́лов расска́зывать не люби́л. Бы́ло лишь изве́стно, что он - же́ртва каки́х-то обстоя́тельств, и, е́сли бы не э́ти обстоя́тельства, его́ майо́рская звезда́ давно́ уж преврати́лась бы в созве́здие полко́вника. В како́й и́менно ча́сти небосво́да должно́ бы́ло сия́ть э́то созве́здие, остава́лось невы́ясненным, так как, су́дя по всему́, в боевы́х де́иствиях майо́р никогда́ не уча́ствовал.

- Опя́ть, говорю́, свет пережгли́? Кларне́т зажёг но́вую спи́чку.

- Сейча́с посмотрю́ про́бки.

Ме́жду тем на́чали открыва́ться многочи́сленные две́ри, выходя́щие в о́бщий коридо́р. По сте́нам забе́гали уро́дливые те́ни в призра́чном све́те лампа́док, фона́риков и свечны́х ога́рков. Ава́рии освети́тельной се́ти бы́ли привы́чным явле́нием, и жильцы́ встреча́ли их во всеору́жии.

Petites nouvelles russes - Ilya Varchavsky - Gargouille

Ce soir-là – au moment où commence véritablement notre récit -, devait être pour notre héros l'étape finale, l’aboutissement de longues recherches, ponctuées de doutes et d’échecs.

Clarinette, qui serrait entre ses genoux une délicate structure faite de fils de fer évoquant l'antenne d'un radiotélescope, s’efforçait de souder le câble de la fiche. Il était impatient, espérant enfin arriver au bout de ses différentes tentatives toutes savamment réfléchies. Mais, comme toujours dans de pareils instants, son fer à souder cessa de fonctionner. Clarinette jura, posa son invention par terre et se dirigea vers la prise sur le mur, le fer à souder toujours à la main.

À ce moment, les plombs sautèrent et tout devint noir.

Clarinette débrancha le fil de la prise et à tâtons se dirigea vers la table où devait, se souvenait-il, se trouver une boîte d’allumettes. En chemin, il se prit les pieds dans le tapis près de son lit et s’écrasa de tout son poids sur l’invention paraboloïde sur laquelle depuis plus de deux semaines, avec tant de frénésie et zèle, il trimait.

Dans l’obscurité, Clarinette maudit à nouveau tout son monde et, ayant enfin mis la main sur la boîte d’allumettes, à la lueur d’une petite flamme, rejoignit le couloir commun.

Là aussi tout était noir.

- Vous avez donc encore fait sauter les plombs, brave citoyen¹ Clarinette ?

Le ‘brave’ citoyen Clarinette laissa tomber bien involontairement l’allumette qu’il tenait. La voix qui venait de l’admonester était celle du major à la retraite Boudilov, un raseur misanthrope, ardent fervent de l’ordre le plus strict.

Le major vivait seul et s'ennuyait. Pendant les dix premiers jours du mois suivant le versement de sa pension, il était intenable, dans un état d’excitation malveillante, les vingt autres, il sombrait dans une profonde dépression. Il mangeait on ne sait où, et bien que dans la cuisine collective il possédât son propre coin de table, il ne s’occupait jamais du ménage.

Une fois par mois, sa fille, qui habitait ailleurs, venait lui apporter son linge propre et repartait avec celui à laver. Boudilov n'aimait pas parler de lui. On savait seulement qu'il avait été victime de ‘certaines circonstances’, et sans ces certaines et malencontreuses circonstances, son unique étoile de sergent-major se serait depuis longtemps transformée en une éblouissante constellation l’élevant au grade de colonel. Dans quelle partie du ciel cette constellation eût-elle censée devoir briller ? Cela restait bien incertain, car, apparemment, notre major n'avait jamais pris part à de quelconques batailles.

- Je vous le demande : est-ce vous qui, à nouveau, avez fait sauter les plombs ? Clarinette gratta une nouvelle allumette.

- Je vais tout de suite jeter un coup d’œil aux fusibles.

Pendant ce temps, le long du couloir de nombreuses portes commençaient à s'ouvrir et d’affreuses ombres couraient sur les murs à la lueur fantomatique de lumignons, de lampes-torches, et de bouts de chandelles. Au sein de l’appartement communautaire, les pannes d'éclairage étaient monnaie courante et les résidents y faisaient face équipés comme à la guerre.

1- L’emploi du terme ‘citoyen’ (гражданин), utilisé à la place de ‘monsieur’ (господин), fut en usage dans l’Ex-URSS (comme ce fut d’ailleurs le cas en France durant la période révolutionnaire.)