IIya Varchavsky – L’amour et le temps (09)

Petites-nouvelles-russes - La commission de l'immeuble
"Bien... Asseyez-vous, camarade Clarinette..." (illustration d'après Lardon)

Илья Варшавский - Ilya Varchavsky
­

­Любо́вь и вре́мя - L’amour et le temps­

Девя́тый эпизо́д - Episode neuf

- Име́ются сигна́лы, что вы по́льзуетесь незарегистри́рованным радиопереда́тчиком. Ве́рно э́то?

- Нет у меня́ никако́го переда́тчика, - солга́л Кларне́т.

- Ну до чего́ же наха́льно темни́т! - патети́чески воскликну́л Буди́лов. Ведь сам слы́шал, как передаёт! То откры́тым, то закры́тым те́кстом.

Председа́тель вопроси́тельно взгляну́л на Кларне́та.

- Э́то… я стихи́ чита́ю.

- Почему́ же вслух? - удиви́лась интеллиге́нтного ви́да немолода́я же́нщина.

- Они́ так лу́чше запомина́ются.

- Врёт, врёт! - кипяти́лся майо́р. - Пусть тогда́ ска́жет, что он там у себя́ пая́ет, почему́ про́бки всё вре́мя горя́т?

- Ну-с, това́рищ Кларне́т?

- Не пая́ю я. Ра́ньше, когда́ телеви́зор ремонти́ровал, то пая́л, а сейча́с не пая́ю.

Председа́тель кря́кнул и сно́ва распра́вил усы́.

- Так… Зна́чит, то́лько стихи́ чита́ете?

- То́лько стихи́.

- Каки́е бу́дут сужде́ния? - Он погляде́л на же́нщину, но та то́лько плеча́ми пожа́ла.

- О́быск бы ну́жно сде́лать, - сказа́л Буди́лов. - С поняты́ми.

- Таки́х прав нам не дано́, - помо́рщился председа́тель. - А вы, това́рищ Кларне́т, учти́те, нико́му не возбраня́ется и телеви́зоры мастери́ть и радиоприёмники…

- И стихи́ чита́ть, - насме́шливо доба́вила же́нщина.

- И стихи́ чита́ть, - подтверди́л председа́тель. - Но е́жели действи́тельно радиопереда́тчик… тут друго́е де́ло. Ну́жно зарегистри́ровать. И вам лу́чше, и нам споко́йней. Согла́сны?

- Согла́сен, - вздохну́л Кларне́т, - то́лько нет у меня́ никакоѓо переда́тчика.

О, свята́я, неуме́лая, бесхи́тростная ложь! Ну, кому́ како́е де́ло до че́стного сло́ва, опроме́тчиво бро́шенного в тума́нное бу́дущее?

Нет, Кларне́т, не тебе́ тяга́ться с вида́вшим ви́ды майо́ром в отста́вке Буди́ловым. Ско́лько ты ни темни́, раско́лет он тебя́, непреме́нно раско́лет! Пора́ поду́мать, чем э́то всё мо́жет ко́нчиться.

* * *

Petites nouvelles russes - Ilya Varchavsky - Gargouille

- On nous a signalé que vous utilisez un émetteur radio sans l’avoir déclaré aux autorités. Est-ce vrai ? interrogea d’emblée le président de séance.

- Je n'ai pas d'émetteur, mentit Clarinette.

- Quel mensonge éhonté ! s'écria Boudilov d’une voix pathétique. J’ai moi-même entendu qu’il émettait ! Parfois en messages codés, parfois non...

Le président regarda Clarinette d'un air interrogateur.

- C'est... C’est que je lis des poèmes.

- Pourquoi à haute voix ? s’étonna la femme assise à la table. Une femme d'âge moyen qui paraissait plutôt cultivée, une intellectuelle à coup sûr.

- Pour mieux m’en souvenir.

- Mensonge, mensonge ! fulmina le major. Alors qu'il avoue au moins qu'il fait de la soudure ! Pourquoi donc les fusibles sautent-ils tout le temps ?

- Alors, camarade Clarinette, qu’avez-vous à répondre ?

- Non, moi je soude pas ! Avant, quand j’ai voulu réparer mon téléviseur, j’ai eu soudé, mais maintenant je soude plus.

Le président grogna et redressa à nouveau sa paire de moustaches.

Alors… Vous affirmez que vous ne faites que lire de la poésie ?

- Oui, seulement de la poésie.

- Quel sera votre verdict ? Le président se tourna vers la femme assise à ses côtés, mais celle-ci se contenta de hausser les épaules.

- Qu’on organise une perquisition ! insista Boudilov. Qu’on convoque des témoins !

- Nous n’avons pas compétence pour cela, grimaça le président. Et vous, camarade Clarinette, gardez à l'esprit qu'il n'est interdit à personne de réparer des télévisions ou de bricoler des postes de radio...

- Ni de lire des poèmes, ajouta la femme d'un ton ironique.

- Ni de lire des poèmes, confirma le président. Mais s’il s’agit d’un émetteur radio... c'est une tout autre affaire. Il faut le déclarer aux autorités. Ce sera mieux pour vous, et, pour nous, plus de tranquillité. C’est d'accord ?

- D'accord, soupira Clarinette, mais je vous jure que je n'ai pas d'émetteur.

Oh, pieux et candide mensonge ! Voyons, qu’a-t-on à faire d’une vérité qu’on jetterait trop imprudemment dans les méandres tortueux d’un avenir incertain ?

Non, Clarinette, il ne t’est pas donné de rivaliser avec ce vieux renard de Boudilov, ce major retraité et retors : peu importe jusqu’où tu tenterais de te tapir dans l’ombre, sûrement il te forcerait à avouer, et immanquablement tu passerais à table !

Il est temps pour toi, gentil Youri, d’imaginer la façon dont tout cela va bien pouvoir se terminer...

* * *